À l’image de ses symptômes, dont la palette est extrêmement large, les complications du Covid-19 peuvent, elles aussi, varier d’un patient à un autre. La plus répandue est le syndrome de détresse respiratoire aiguë, une forme d’insuffisance respiratoire sévère qui entraîne une accumulation de liquide dans les poumons et une diminution excessive de l’oxygène sanguin.
Mais les patients atteints d’une forme grave de Covid-19 peuvent également développer des lésions hépatiques, une insuffisance cardiaque, une surinfection bactérienne, une septicémie… ou encore des lésions rénales. Y compris chez des patients qui n’avaient aucun problème rénal jusque-là.
“On retrouve le virus dans le rein”
“Il faut faire savoir que cette maladie n’affecte pas seulement les poumons, mais aussi d’autres organes”, explique le Dr Brad Rovin, directeur du département de néphrologie à l'université d'État de l'Ohio, dans une interview accordée à RFI le 13 avril.
“On retrouve le virus dans le rein, il existe plusieurs publications scientifiques à ce sujet. Dans de nombreux cas, ces patients, qui n’avaient jamais eu de maladie du rein avant, développent de graves lésions rénales”. Certes peu fréquentes, les complications rénales ne constituent pas moins une urgence médicale.
Cette complication peut déboucher sur une maladie rénale chronique
D’autant qu’elles peuvent ensuite perdurer, une fois le patient guérit du coronavirus. “En fonction de la gravité et de la durée de l’infection pendant leur combat contre le Covid-19, ces patients peuvent développer une insuffisance rénale chronique. [...] Même si l’on a encore beaucoup de choses à apprendre de ce virus, je pense que nous verrons les conséquences de cette maladie dans les services de néphrologie sur le long terme”, indique le médecin.
Pour rappel, “la lésion rénale aiguë est une détérioration rapide (en quelques jours ou semaines) de la capacité des reins à filtrer les déchets métaboliques du sang”, selon le manuel MSD. L’insuffisance rénale peut entraîner une insuffisance cardiaque et des taux élevés de potassium dans le sang.
Le Dr Rovin indique qu’une “étude chinoise montre que de nombreux patients ont des quantités notables de protéine et du sang dans les urines, ce qui suggère là encore, que le virus atteint directement le rein”.
Comment reconnaître une insuffisance rénale chronique ?
Durant les premières années, l'insuffisance rénale chronique évolue souvent de manière asymptomatique. Un des premiers signes de cette pathologie est l’hypertension artérielle, due à l’accumulation de sel dans les reins ou à un dérèglement hormonal. Une anémie peut également être observée, liée à la production insuffisante de l’hormone EPO. Le calcium et le phosphore sont aussi mal absorbés par l’organisme, ce qui entraîne des carences.
D’autres signes, moins caractéristiques, peuvent aussi se manifester : fatigue, somnolence, miction fréquente et douloureuse, pâleur, œdèmes, nausées et vomissements, perte de poids inexpliquée, perte d’appétit, maux de tête, troubles du sommeil, crampes, mal de dos…
Enfin, le coma urémique est le signe le plus sévère d’insuffisance rénale. Il survient lorsque les reins sont déjà sévèrement atteints, et se manifeste par des troubles neurologiques, des démangeaisons, d’une inflammation des glandes salivaires et de taux sanguins et urinaires anormaux.
Les insuffisants rénaux, plus fragiles face au Covid-19
Les malades chroniques, et notamment ceux qui souffrent d’insuffisance rénale, font partie des personnes les plus à risque de développer une forme grave de Covid-19. De même, l’hypertension artérielle, le diabète et les maladies cardiovasculaires font partie des pathologies qui aggravent l’infection au coronavirus… Mais aussi de celles qui peuvent entraîner une insuffisance rénale.
“Nous avons donc de nombreux patients qui présentent à la fois une maladie rénale et l’une de ces comorbidités”, souligne le Dr Rovin. “De plus, les patients qui sont en grande insuffisance rénale n’ont pas le même système immunitaire que les autres. Ce sont aussi des patients pour lesquels la distanciation sociale est impossible : beaucoup sont obligés de se rendre trois fois par semaine à l’hôpital pour faire une dialyse et se retrouvent dans des lits les uns à côté des autres. Tout ceci crée un cocktail explosif pour faire de nos patients des personnes particulièrement à risque face à cette pandémie”, détaille le spécialiste.
Un programme de greffe en suspend
Dans l’établissement où il travaille, le programme de greffe a été suspendu. En cause, des publications scientifiques, qui ont montré que les sujets récemment greffés et sous immunosuppresseurs “risquent beaucoup plus que les autres de développer une forme grave du Covid-19 car leur système immunitaire n’est pas capable de se défendre”.
De nombreux patients ont été renvoyés chez eux, où ils doivent suivre des mesures de confinement strictes. Leur suivi médical est assuré, mais par téléconsultation - sauf pour les personnes très malades qui peuvent, bien sûr, être hospitalisées.
Les insuffisants rénaux doivent respecter le confinement
Dans une fiche intitulée “Assurer la continuité de la prise en charge des patients ayant une maladie rénale chronique”, la Haute Autorité de Santé rappelle que les patients dialysés ou transplantés doivent respecter les gestes barrières, ainsi que “le confinement de manière stricte : éviter toute sortie, y compris dans les commerces pour faire les courses, éviter tout contact avec des personnes extérieures”.
Faisant partie des sujets à risque de développer des formes sévères de la maladie, ils peuvent également bénéficier d’un arrêt de travail, lorsque le télétravail n’est pas possible. Le médecin qui les suit doit aussi “s’assurer de la capacité de confinement total des proches vivants sous le même toit que le patient”.
Insuffisance rénale : quels traitements ?
Les patients infectés au virus SARS-CoV-2, et dont les reins sont touchés, peuvent être dans l’obligation de porter une dialyse, jusqu’à ces organes soient en mesure de refonctionner normalement. Si l’insuffisance rénale devient chronique, la dialyse peut être nécessaire à vie.
Une prise en charge multidisciplinaire
La prise en charge de la maladie rénale chronique doit être pluridisciplinaire : médecin traitant, néphrologue, endocrinologue et cardiologue doivent travailler de concert. En effet, l’insuffisance rénale est toujours la conséquence d’une autre maladie (hypertension, diabète, Covid-19…) qu’il convient donc de traiter. Les médecins doivent aussi protéger les reins, pour ralentir l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale, et réduire les symptômes associés à la maladie pour améliorer la qualité de vie du patient.
Si la fonction rénale ne peut plus être assurée de manière autonome, elle peut être soutenue par une dialyse, comme évoqué plus haut, ou par une greffe de reins. Le patient est alors au stade d’insuffisance rénale terminale : autrement dit, ses reins ne fonctionnent plus.
Covid-19: «La maladie n’attaque pas que les poumons», prévient un spécialiste du rein, RFI, 13 avril 2019.
Dépistage, symptômes, diagnostic et évolution de la maladie rénale chronique, Ameli.fr, 14 novembre 2019.
Le traitement de la maladie rénale chronique, Ameli.fr, 14 novembre 2019.
Réponses rapides dans le cadre du COVID-19 - Assurer la continuité de la prise en charge des patients ayant une maladie rénale chronique, Haute Autorité de Santé, 9 avril 2020.
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