Deconfinement : un retour a l-ecole le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

Lors de sa quatrième allocution depuis le début de la crise du coronavirus, lundi 13 avril, Emmanuel Macron a annoncé les premières mesures qui vont permettre de sortir du confinement en France, à compter du 11 mai 2020. À commencer par la réouverture des écoles.

Après avoir rappelé que le nombre de malades de Covid-19 hospitalisés en réanimation a baissé depuis le cinquième jour consécutif, le Président de la République explique que "l'épidémie n'est pas encore maîtrisée, nous devons donc poursuivre nos efforts et continuer d'appliquer les règles".

Toutefois, il donne enfin une indication temporelle de déconfinement : le lundi 11 mai 2020. Un déconfinement qui sera progressif et qui sera marqué par la réouverture des écoles et crèches, fermées depuis le 16 mars.

"Les enfants doivent retrouver le chemin de l’école. A partir de lundi 11 mai, les crèches, les écoles, les collèges et les lycées, seront rouverts progressivement", a déclaré Emmanuel Macron.

Cette annonce de déconfinement agite et inquiète de nombreux parents d'élèves, médecins et scientifiques quant aux conditions de sécurité de cet fin de quarantaine. "Faire respecter les gestes barrières avec des enfants de 3 ans me paraît très compliqué", témoigne un père de famille au micro de TF1.

Un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ? Que signifie une rentrée des classes "progressive" ? Quels sont les dangers d'un déconfinement de la population s'il s'avère prématuré ? On fait le point dans notre diaporama avec les informations dont nous disposons à ce jour.

L'OMS met en garde contre un déconfinement prématuré

La Chine et plusieurs pays asiatiques font déjà les frais du déconfinement. La reprise des contaminations au nouveau coronavirus ne s'est pas fait attendre. C'est pourquoi l'Organisation mondiale de la santé (OMS) met en garde contre un déconfinement prématuré qui pourrait "entraîner une résurgence mortelle", selon les mots de son directeur, Tedros Adhanom Ghebreyesus. 

En effet, une deuxième vague de l'épidémie de Covid-19 présenterait autant de dangers que la précédente. Une étude réalisée conjointement par l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), l'Institut Pierre Louis d'épidémiologie et de santé publique et Médecine Sorbonne Université se focalise sur la région Ile-de-France qui verrait ses besoins en lits de soins intensifs atteindre 40 fois ses capacités réelles, en cas de déconfinement prématuré.

Les chercheurs prônent une sortie très progressive le 11 mai : le maintien des écoles fermées, un niveau de télétravail élevé et un isolement des personnes âgées.

Déconfinement : un plan de rentrée jugé "flou"

La reprise de l'école le 11 mai annoncé par Emmanuel Macron est loin de faire l'unanimité, semble-t-il. "Reprendre dans un mois, comme si de rien n’était, ce n’est pas possible, car il n’y aura pas plus de gens immunisés, les enfants vont être ensemble à l’école, sans gestes barrières possibles, et ensuite aller dans les familles, chez les grands-parents, cela ne paraît pas du tout raisonnable”, a clamé le syndicat des enseignants.

"Quid de la réouverture des écoles. Comment y faire respecter les gestes barrières ? Allons-nous assurer la sécurité sanitaire des enseignants ? Les enfants sont des vecteurs asymptomatiques. Les enseignants ne doivent pas être sacrifiés", soulève de son côté Valérie Boyer, députée LR des Bouches-du-Rhône, sur Twitter.

De son côté, Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, première fédération syndicale de l’éducation, estime que “le plan de rentrée paraît encore flou. “Emmanuel Macron dit que toutes les conditions sanitaires seront réunies mais on a un grand nombre d’inquiétudes, on sait que le virus circule parmi les élèves”.

Les salles de classe seront-elles désinfectées ?

"Il faudra dans un premier temps nettoyer les locaux", rapporte Jean-Michel Blanquer sur le plateau de France 2, pas plus tard qu'hier. "Nous avons 2 semaines devant nous pour travailler à l'élaboration de ce retour, dans de bonnes conditions sanitaires, aussi bien pour les élèves que pour les adultes".

Depuis le 9 mars, certaines écoles chinoises ont commencé à ouvrir de nouveau à travers le pays, mais pas dans n'importe quelles conditions. Comme le révélaient nos confrères d'Euronews, dans la province du Guizhou, située au sud-ouest de la province du Hubei, la rentrée s'est effectuée sous certaines conditions : files d'attente devant les écoles, attestations de santé vérifiées avant de passer la porte des établissements, port du masque obligatoire, nettoyage des salles de cours plusieurs fois par jour et bâtiments équipés de thermomètres infrarouges pour vérifier la santé des enfants.

"Notre école a mis en place des mesures telles que la division de nos élèves en groupes séparés pour participer à différentes activités. Et nous avons des horaires échelonnés", expliquait alors Shi Yanmei, l'une des professeures.

Les enfants devront-ils porter un masque ?

Après le 11 mai, en complément des gestes barrières, l'État devra permettre à chaque Français de se procurer un masque, a précisé Emmanuel Macron. Mais leur port ne sera pas obligatoire, ni pour les professeurs, ni pour les élèves.

Pour rappel, le port d’un masque ne remplace pas le respect des gestes barrières. Il n’est efficace que trois heures maximum et doit être lavé après chaque utilisation à 60° pendant 30 minutes en machine. Si vous ne pouvez pas le laver tout de suite, mettez-le dans une boîte hermétique en plastique.

Déconfinement le 11 mai : la crainte d'une deuxième vague

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Déconfinement : un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

L’annonce par Emmanuel Macron de la date du 11 mai pour le début du déconfinement a suscité de nombreuses inquiétudes. La première : celle du retour de l'épidémie et d'une deuxième vague causée par l'arrêt du confinement. On évoque l’Asie, où le virus semblait avoir été vaincu et il revient pourtant. 

Le président français faisait ainsi référence au Japon et à Singapour, où le nombre de cas, après un premier pic rapidement maîtrisé, bondit depuis plusieurs jours. À Tokyo, les autorités ont placé le pays en état d’urgence depuis début avril.

Plusieurs études parues en mars et avril soulignent le danger d’un retour de l’épidémie dans ce pays à la faveur du relâchement des mesures de confinement. 

Si le risque d’une deuxième vague de contamination est pris au sérieux dans l’ensemble des pays touchés par le virus, c’est parce qu’il est justifié par les scientifiques. Un nouveau pic épidémique après le relâchement des mesures de confinement semble constituer la seule voie logique en l’absence de mesures fortes. 

Une étude publiée par l'Inserm insiste sur le fait que cette deuxième vague paralyserait encore plus le système hospitalier, et saturerait probablement les hôpitaux du pays. 

Covid-19 : les enfants, réservoirs viraux

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Déconfinement : un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

Les bébés et jeunes enfants sont peu touchés par l'épidémie de coronavirus. La majorité des enfants infectés sont, par conséquent, peu symptomatiques. Or, certains peuvent être porteurs sans développer aucun symptôme et donc être potentiellement contagieux, soit avant l'apparition des signes cliniques, soit en phase de guérison. On parle alors de porteurs sains.

Ces enfants sont alors vecteurs de la maladie et peuvent contaminer leur entourage. D'où la recommandation du gouvernement d'éviter qu'ils ne soient en contact avec des personnes fragiles (système immunitaire affaibli) et âgées pour ne pas les contaminer. C'est en partie ce risque qui inquiète les parents, mais aussi les syndicats de l’enseignement.

"Quid de la réouverture des écoles. Comment y faire respecter les gestes barrières ? Allons-nous assurer la sécurité sanitaire des enseignants ? Les enfants sont des vecteurs asymptomatiques. Les enseignants ne doivent pas être sacrifiés", soulève Valérie Boyer, députée LR des Bouches-du-Rhône

“C’est tout sauf sérieux de rouvrir les écoles le 11 mai car on nous dit que tous les lieux publics sont fermés, les cinémas, les salles de spectacle, mais pas les écoles, alors que l’on sait que c’est un lieu de haute transmission, de haute contamination, il y a un manque de précaution, ça paraît être en contradiction totale avec le reste”, s'indigne Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, interrogée par l’AFP.

Il faut limiter le nombre d'élèves dans les écoles

"Il est hors de question d'avoir des classes bondées dans la situation actuelle. On peut imaginer qu'une partie des cours se fasse en petits groupes et que le reste se passe en ligne pour les lycéens, par exemple", a indiqué Jean-Michel Blanquer sur le plateau de France 2. Des mesures seront effectivement prises pour favoriser l'apprentissage en petits groupes, principalement auprès des jeunes enfants, pour qui il est difficile de respecter les gestes barrières permettant de lutter contre le coronavirus".

Pour des raisons sanitaires, il faudra donc limiter le nombre de personnes dans les établissements lors du déconfinement. "Et pour pouvoir y arriver, il faudrait peut-être rallonger la semaine, faire 6 jours. C'est une piste", mentionne la journaliste Delphine Sitbon au JT de TF1 le 14 avril.

"On pourrait aussi imaginer un système de rotation : toutes les classes ne viennent pas en même temps. Par exemple : dans un collège, les 6e et les 5e pourraient venir étudier une semaine complète, les 4e et les 3e, la semaine suivante". 

"Il est certain que tout ne va pas se passer du jour au lendemain. Nous devons définir la façon donc cela va se réaliser progressivement et nous avons deux semaines devant nous pour y travailler", a déclaré Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l'Éducation avait également évoqué l'idée de séparer les élèves au sein d'une même classe. "Une partie des élèves qui seront là le matin, et l'autre l'après-midi", peut être une solution envisagée par le gouvernement. 

Continuer à former les enfants sur les mesures barrières

Si le 11 mai marquera sans doute le début d'un déconfinement progressif, il est probable que le virus circule encore à ce moment-là. Les élèves et les professeurs devront alors adopter certaines mesures de prévention. Aux parents et aux enseignants incombera la tâche de continuer à sensibiliser les enfants et à veiller à ce qu'ils comprennent et appliquent les gestes barrières : laver ses mains régulièrement, tousser dans son coude, respecter une distance minimale d'au moins un mètre.

Néanmoins, il paraît difficile d'imposer de telles règles aux plus jeunes (élèves des écoles maternelles et petites classes de primaire), qui ont l'habitude de se tenir la main et de jouer ensemble. Et c'est là l'inquiétude de nombreux parents.

Un risque de reconfinement après le 11 mai ?

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Déconfinement : un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

Si Emmanuel Macron a annoncé la date du 11 mai pour le déconfinement dans son allocution lundi soir, la France n'est pas à l'abri d'une rechute qui pourrait bouleverser nos plans. Christophe Castaner a d'ailleurs précisé ce mardi matin que cette date n'était pas une "certitude", mais un simple "objectif". Selon Christian Bréchot, médecin virologue, même si le déconfinement est finalement mis en place le 11 mai, "on va vivre pendant longtemps en devant en fait anticiper le risque d'une épidémie nouvelle", et donc d'un retour aux mesures de confinement.

C'est ce qui se déroule actuellement en Chine : après avoir été partiellement déconfinés, 600.000 habitants de la province du Henan ne peuvent désormais plus sortir. Les autorités redoutent une nouvelle vague de contaminations. Seules les personnes munies d'un permis spécial peuvent continuer à se rendre au travail et les véhicules ne peuvent circuler qu'un jour sur deux, en fonction de leur plaque d'immatriculation. 

Covid-19 : en Italie, pas de retour à l'école avant septembre

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Déconfinement : un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

Contrairement à nous, nos voisins italiens prévoient un retour à l'école à la rentrée de septembre seulement.

Si le président du Conseil italien a accordé quelques assouplissements à certaines régions, la réouverture des écoles ne serait pas envisagée avant septembre selon les médias italiens. En effet, depuis mardi 14 avril, des autorisations de reprise de l'activité permettent la réouverture de certains commerces tels que les librairies, les laveries, les papeteries, les commerces pour les nouveau-nés, et l'exploitation forestière.

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Covid-19 : les enfants sont-ils vraiment les plus contagieux ?

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Déconfinement : un retour à l'école le 11 mai est-il vraiment sans risque ?

Selon les dernières données scientifiques, les enfants pourraient être moins porteurs du virus que ce que les autorités pensaient au début de la crise sanitaire. Des scientifiques pensent que les enfants étaient des vecteurs importants dans la propagation du Coivd-19. Or, plusieurs experts avancent désormais la possibilité que leur rôle ne soit finalement pas si important que cela. 

Selon ce consensus, les enfants se contaminent a priori plus au contact des adultes que l'inverse. Il y a, certes, encore trop peu de données pour affirmer cela avec certitude, mais un certain nombre d'indices vont dans ce sens, selon les scientifiques.

"Au fur et à mesure, on s'est rendu compte que parmi les gens avec des symptômes évoquant le Covid-19, les enfants étaient beaucoup moins atteints que les adultes. Chez les adultes, on a 30 % de prélèvements positifs, alors que chez les enfants, on est à 10 %", explique Robert Cohen, pédiatre infectiologue à l'hôpital intercommunal de Créteil, sur Franceinfo.

"Les gens qui contribuent vraiment à la dynamique de l'épidémie, ce sont les personnes présymptomatiques, qui vont développer des symptômes, et les personnes malades. L'argument initial sur les enfants, c'était que ce coronavirus se comportait un peu comme une grippe. Et on sait que les enfants sont de forts transmetteurs de ce genre de virus respiratoires tels que la grippe. On s'aperçoit maintenant que ce coronavirus ne se comporte pas exactement de la même façon", ajoute de son côté le Dr Pascal Crépey, épidémiologiste et enseignant-chercheur, à Radio France.

Concrètement, plusieurs indices amènent à penser aujourd'hui que moins les symptômes sont prononcés, moins les risques de transmission sont importants.

Et ce que l'on sait, c'est qu'il y a peu de cas, y compris de cas graves, chez les enfants. "Selon le Dr Cohen, dans les cas d'enfants contaminés, ce serait le parent qui leur a transmis le Covid-19, et non l'inverse. Tout ça fait que, on n'a pas la certitude que les enfants ne jouent pas de rôle dans l'épidémie, mais qu'il n'est pas celui que l'on attendait au début de l'épidémie", assure le Dr Crépey.

Sources

JT TF1, 14 avril 2020

Jean-Michel Blanquer, France 2, 14 avril 2020

Expected impact of lockdown in Île-de-France and possible exit strategies, Inserm, 12 avril 2020

Déconfinement : comment les différents pays amorcent le virage du monde d'après, Le Figaro International, 15 avril 2020

Le rôle des enfants dans la propagation du virus "n'est pas celui que l'on attendait au début de l'épidémie", selon un pédiatre, Franceinfo, 14 avril 2020

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