- 1 - "C’était comme si je passais mon corps au karcher"
- 2 - Jeûne intermittent : ce qu’il a changé sur mon sommeil
- 3 - Jeûne intermittent : « J’ai perdu 18 cm de hanches »
- 4 - Les adeptes du jeûne intermittent ont une tension artérielle plus basse
- 5 - Jeûne intermittent : « les personnes qui le pratiquent parviennent à mieux gérer leurs émotions »
"Journaliste pour une rubrique santé depuis un an et demi, il m’était impossible de passer à côté du jeûne intermittent. Inconcevable il y a tout juste 10 ans mais de plus en plus populaire aujourd’hui, le jeûne, appelé “fasting” dans les pays anglo-saxons, consiste à ne rien manger pendant une période choisie. Il ne s’agit pas d’un régime, mais plutôt d’un mode d’alimentation, qui permet de revenir à un rythme plus naturel pour le corps", Emmanuelle Jung, auteure du Jeûne intermittent : 1 an après, (éd. Alpen).
A lire aussi :
Perte de poids : 5 erreurs à table qui empêchent de maigrirIl existe plusieurs types de jeûne intermittent. Le plus répandu est le 16-8 : seize heures sans s’alimenter, et une fenêtre de huit heures pour le faire. Mais il y a des variantes comme le 18-6.
Si le jeûne intermittent a le vent en poupe à l’heure actuelle, cette pratique est étudiée depuis 1943 et a montré une certaine efficacité dans la perte de poids mais aussi dans l’amélioration de certains biomarqueurs comme la sensibilité à l’insuline. En remontant encore plus loin, on se souvient que le jeûne était involontairement pratiqué par nos ancêtres préhistoriques, qui, sans souffrir de famine, ne faisaient pas trois repas quotidiens. Les repas dépendaient essentiellement de la cueillette et de la chasse. Ce n’est donc pas un hasard si nous avons évolué avec un foie et des muscles capables de stocker les glucides rapidement et un tissu adipeux conçu pour garder des réserves d'énergie prêtes à prendre le relais quand la nourriture n'est pas disponible.
Suivi de près par Alexandra Retion, diététicienne et auteure de SOS Nutrition (éd. First), je me suis prêtée au jeu en jeûnant le soir pendant 1 an. Ce n’était pas une simple expérience journalistique. Sujette à des troubles intestinaux depuis plusieurs années, j’espérais notamment prendre soin de mon foie en le mettant au repos plusieurs heures par jour.
"C’était comme si je passais mon corps au karcher"
D’après mes recherches, jeûner occasionnait apparemment de nombreux bienfaits sur la santé. Plusieurs études scientifiques allaient dans ce sens, et certains médecins aussi. Je cite notamment Mark P. Mattson, professeur de neuroscience à l'Université Johns Hopkins (USA) et surtout ancien chef du laboratoire de neuroscience de l’Institut national du vieillissement. Pionnier du jeûne intermittent, il sautait le petit déjeuner et parfois même le déjeuner. Mark Mattson prenait ses 2000 calories quotidiennes dans une fenêtre de six heures.
Alexandra Retion m’avait néanmoins alerté sur certains risques auxquels nous expose le jeûne intermittent. « Si je n’encourage pas le jeûne intermittent à tous mes patients c’est parce qu’il peut favoriser les TCA [troubles du comportement alimentaire, ndlr] et les carences », explique l’experte.
En effet, si j’avais décidé de mener le jeûne intermittent de manière relativement stricte les deux premiers mois, j’ai ensuite fait en sorte de l’intégrer à mon mode de vie habituel. Je ne souhaitais pas anéantir complètement ma vie sociale. Vous pouvez tout à fait devenir adepte du fasting et continuer les sorties. Si vous dînez avec vos amis, trois ou quatre fois par semaine, il vous suffit de jeûner les autres soirs. Vous y verrez déjà un résultat sur votre santé et sur votre ligne. Au total, je me suis délestée de près de 15 kg en moins d’un an.
"Entre 14h et 9h du matin le lendemain, aucun aliment ne pénètre mon organisme"
Concrètement entre 14h et 9h du matin le lendemain aucun aliment ne pénètre mon organisme.
Il faut l’admettre, le jeûne intermittent reste un bouleversement à ne pas minimiser. Il nous amène à modifier nos habitudes, et c’est pour cette raison que vous êtes nombreux à être réticents. Pour ma part, je ne peux pas qualifier les premiers jours de « difficiles ». Il faut dire qu’en démarrant le mois de janvier, j’avais choisi la bonne période. Après les excès des fêtes, il est moins éprouvant psychologiquement d’entamer une telle détox. Si je peux donner un conseil à ceux ou celles qui souhaitent se lancer, c’est de choisir le bon moment.
Après mes premières semaines de jeûne, trois kilos se sont envolés. Durant le premier mois, j’avais veillé à respecter le jeûne intermittent de manière assez stricte. Pas de sortie le soir afin de ne pas l’interrompre. Si certains soirs la sensation de faim apparaissait, je misais sur un yaourt nature (sans sucre) pour me caler, ce qui fonctionnait assez bien pour moi, je dois l’admettre.
Pas question de faire l’impasse sur le petit déjeuner et le déjeuner. Salades de pâtes aux légumes, blanc de poulet, sandwichs à l’avocat et au fromage de chèvre, pizzas entre collègues… L’idée est de varier chaque jour et de se faire plaisir le midi tout en gardant une alimentation équilibrée, condition essentielle pour que le jeûne porte ses fruits. En outre, si vous souhaitez tester le jeûne intermittent, il est essentiel de vous hydrater. Eau, jus de citron ou thé vert sont les bienvenus durant mes 16h quotidiennes de jeûne. Mise à part l’absence du dîner, je n’ai rien changé à mes pratiques alimentaires.
"Tous mes maux de ventre avaient disparu"
Après deux mois de jeûne intermittent, j’avais déjà perdu 6 kg. Je me sentais légère. Les premiers effets se sont fait sentir sur mon système digestif. Il faut dire que j’étais sujette aux indigestions depuis plusieurs années. Avec le jeûne, c’était comme si je passais mon corps au karcher. J’avais l’impression que tous les excès des dernières années avaient disparu de mon organisme.
En accordant une pause de 16 heures à mon système digestif, le jeûne a littéralement détoxifié mon organisme. Le fait de ne pas manger durant tout ce temps permet de relancer un système digestif si celui-ci est perturbé. Mes maux de ventre avaient donc disparu.
Une étude menée par Yoshinori Ohsumi, prix Nobel de médecine en 2016, révèle que le jeûne intermittent favorise l’autophagie, processus par lequel les cellules peuvent se nettoyer et se régénérer. Lorsque ce phénomène est déréglé, les déchets s’accumulent dans les cellules et de nombreuses pathologies peuvent survenir, comme Alzheimer, Parkinson ou certains cancers.
En "dégraissant" le corps - et notamment le foie - le jeûne intermittent permettrait une évolution positive des paramètres vitaux.
« Le jeûne intermittent va agir au niveau du foie et du pancréas. A force d’accumuler des aliments difficiles à digérer (graisses cuites, alcool, protéines), le foie est dépassé dans ses capacités d’absorption. C’est ce qui cause la crise de foie. On va être en permanence ballonné et barbouillé, explique de son côté Raphaël Gruman, nutritionniste et auteur. Lorsqu’on suit le jeûne intermittent, on laisse le temps au foie de traiter les aliments, de les assimiler donc on évite l’accumulation. On peut parler d’une détox. On met au repos tous les organes qui participent à la détoxification de l’organisme. C’est pour cette raison qu’on gagne une plus belle peau, des reins qui fonctionnent mieux et on est moins sujet aux difficultés digestives ».
Jeûne intermittent : ce qu’il a changé sur mon sommeil
Mes nuits n’ont jamais été aussi paisibles et mon sommeil profond. La plupart du temps, je n’avais plus besoin de mon réveil. J’ouvrais les yeux une demi-heure avant et j’étais prête à démarrer la journée. Quel impact avait eu le jeûne intermittent sur mon sommeil ? Décryptage avec le Dr Marc Rey, neurologue spécialiste du sommeil, Président de l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance) et auteur de 50 Règles d’or pour bien dormir (éd. Larousse).
« Si vous décidez de dîner plus léger le soir, vous allez vous endormir plus facilement »
« Nous vivons dans une société qui a mal évolué sur le plan des prises alimentaires, estime le Dr Rey. Normalement, nous devrions miser sur un repas léger le soir et un petit déjeuner copieux le matin. Or, du fait de notre mode de vie moderne, nous sommes nombreux à avoir basculé vers un gros repas au dîner. Cela a un effet négatif sur le sommeil. Donc si vous décidez de dîner plus léger le soir, voire de ne pas dîner du tout, vous allez vous endormir plus facilement. C’est logique ».
En effet, le matin et le midi, vous allez avoir des apports énergétiques à des moments qui précèdent une dépense énergétique. C’est pour cette raison que vous allez plus facilement éliminer ce que vous mangez. Au contraire, si vous ingérez des repas copieux le soir, vous allez les stocker. « C’est pourquoi ceux qui mangent beaucoup le soir ont tendance à grossir », ajoute le spécialiste du sommeil.
En outre, il faut savoir qu’au cours de la nuit, notre température chute. « Si vous mangez un gros repas le soir, vous allez générer une production de chaleur occasionnée par la digestion. C’est particulièrement vrai pour les protéines. C’est pour cela qu’on déconseille la viande le soir. La production de chaleur peut interférer avec le sommeil », insiste le neurologue.
Le jeûne intermittent, déconseillé en cas de dette de sommeil
Il nous met toutefois en garde par rapport au jeûne intermittent. Si pour ma part, je n’ai subi aucune fringale nocturne, c’est, selon notre expert, un risque à ne pas prendre à la légère.
En outre, le Dr Rey déconseille le jeûne intermittent si vous vous trouvez en privation chronique de sommeil. « L’explication est simple : la privation de sommeil favorise l’obésité car la sécrétion de ghréline augmente. Il s’agit d’une hormone qui stimule l’appétit, contrairement à la leptine qui génère la satiété. C’est grâce à cette dernière que vous pouvez dormir 7 heures par nuit sans ressentir la faim. Or, les personnes qui ne dorment pas suffisamment fabriqueront davantage de ghréline, ce qui est propice au grignotage ».
Jeûne intermittent : « J’ai perdu 18 cm de hanches »
Je vous mentirais si je vous disais que ma silhouette est restée la même. En 1 an, j’ai dit adieu à près de 15 kg. Je ne cherchais pas à mincir absolument. Je n’ai jamais été obnubilée par mon poids. Mais une fois les premiers kilos envolés, difficile de s’arrêter en si bon chemin. Aujourd’hui, je pèse 51 kg pour 1 m 64. Pas de doute, en termes de perte de poids, le jeûne intermittent est radical. Hanches, tour de taille, jambes… mon corps tout entier s’est vu fondre, et ce, dès le premier mois de jeûne. Dans le détail, j’ai perdu 13 cm en tour de taille et 18 cm de hanches.
Jeûne intermittent : deux ou trois soirs par semaine suffisent pour perdre du poids
« Je constate chez mes patients que le jeûne intermittent est très efficace pour perdre du poids, me confirme Raphaël Gruman. Le mécanisme est simple : le jeûne implique une restriction calorique. Admettons que vous aviez 500 calories sur un dîner, si vous y renoncez, c’est 500 calories que vous aurez en moins dans la journée. Votre corps va donc puiser dans ses réserves pour le supplément d’énergie. En outre, si vous bannissez le repas du soir de votre routine, vous perdrez plus vite selon moi. La nuit, certaines hormones vont venir générer un effet brûle-graisse ».
Si vous voulez faciliter une perte de poids, Raphaël Gruman conseille de mener le jeûne intermittent deux à trois jours par semaine. « Cela suffira pour avoir un résultat », assure-t-il.
Photo : après 8 mois de jeûne intermittent
Les adeptes du jeûne intermittent ont une tension artérielle plus basse
Le jeûne intermittent ne se contente pas d’agir sur notre sommeil et sur notre ligne. Il va également prévenir le vieillissement de notre système cardiovasculaire. « Cela fait plus de 12 ans que je travaille sur le jeune intermittent, m’explique le Dr Frédéric Saldmann, cardiologue et nutritionniste, auteur de On n’est jamais mieux soigné que par soi-même (éd. Plon). Au départ, j’ai dû aller à l’encontre de nombreuses idées reçues, pourtant, aujourd’hui, toutes les études scientifiques s’accordent à dire que le jeûne séquentiel garantit une meilleure immunité, et un meilleur système cardiovasculaire, en nettoyant les cellules anormales ».
Le jeûne intermittent permet de lutter contre le stress, facteur de risque cardiovasculaire
« Premièrement, il faut comprendre que le jeûne intermittent réduit l’inflammation, qui est un facteur de risque de maladie cardiovasculaire, détaille le cardiologue. Il a été prouvé que les personnes qui pratiquent le jeûne séquentiel présentent un taux d’inflammation qui diminue ».
En outre, on rappelle aussi que les maladies cardiovasculaires sont liées au stress. « Et il se trouve que les adeptes du jeûne sécrètent une molécule qu’on appelle BDNS. Il s’agit d’une molécule qui favorise la mémoire, un niveau intellectuel optimal, et surtout une meilleure humeur. Le fait d’être de meilleure humeur sera bénéfique pour notre cœur, puisque l’angoisse et le stress sont des facteurs de risque de maladies cardiovasculaires ».
« Avec le jeûne intermittent, on lutte contre notre obsolescence programmée »
L’autre point mis en avant par le Dr Saldmann concerne la digestion. « Elle sollicite de nombreux organes [foie, rein… ndlr]. En nous alimentant trois fois par jour, notre corps n’a pas le temps de se réparer. Et surtout, nous obligeons notre pompe cardiaque à faire énormément d’efforts, poursuit le spécialiste. Quelqu’un qui jeûne sollicite moins sa fréquence cardiaque, donc il économise son énergie. Avec le jeûne intermittent, on lutte ainsi contre notre obsolescence programmée ». Ce n’est donc pas un hasard selon le médecin, si les personnes qui suivent le jeûne intermittent ont une tension artérielle plus faible et une fréquence cardiaque plus lente. « En gros, c’est comme si vous étiez une bougie qui s’use moins vite », compare le Dr Saldmann.
« Le jeûne intermittent, c’est une cure de jouvence ! Je le conseille au quotidien pour tous ceux qui ont envie de rester en bonne santé le plus longtemps possible. Vous gagnerez un organisme plus jeune et plus opérationnel », déclare le Dr Saldmann.
Jeûne intermittent : « les personnes qui le pratiquent parviennent à mieux gérer leurs émotions »
Mes proches ont été nombreux à me demander si le jeûne intermittent n’était pas dur à mener moralement. C’était aussi une question que je me posais avant de débuter. Contre toute attente, jeûner produit l’effet inverse. Les nombreux effets positifs du jeûne sur mon organisme avaient également eu un impact sur mon moral. Un phénomène que j’ai également pu expliquer grâce au Dr Saldmann qui nous confirme page précédente l’impact du jeûne intermittent sur l’humeur.
Il faut aussi comprendre que le jeûne intermittent n’est pas incompatible avec une vie sociale épanouie, puisque vous pouvez tout à fait vous contenter de le pratiquer deux à trois jours par semaine pour voir un résultat.
Au fil du temps, je redécouvrais aussi le goût des aliments. J’avais l’impression de réellement savourer ce que je mangeais. Un sentiment qu’on a tendance à oublier lorsqu’on se nourrit trois fois par jour. Manger n’était plus pour moi une simple habitude, mais un vrai plaisir.
« On s’alimente lorsque nous avons faim, et non pas parce qu’il est l’heure de manger »
« Ce que je trouve intéressant dans le jeûne intermittent, au-delà de la perte de poids et des bénéfices pour l’organisme, c’est la dimension psychologique, m’explique Johanna Rozenblum, psychologue clinicienne. En laissant le corps au repos, nous ne sommes plus soumis à une digestion continue. Et surtout, on devient davantage à l’écoute de ses besoins et notre rapport à la nourriture est modifié. On s’alimente lorsqu'on a faim, et non pas parce qu’il est l’heure de manger. C’est cette écoute attentive à tous les ressentis physiologiques que je trouve bénéfique dans le jeûne intermittent. C’est aussi ça qui explique que les personnes qui le pratiquent sont de meilleure humeur et parviennent à mieux gérer leurs émotions ».
Jeûne intermittent : la perte de poids ne doit pas être la seule motivation
« Si le jeûne a été une réussite chez vous, c’est parce que vous n’étiez pas sujette aux troubles du comportement alimentaires, m’explique de son côté ma nutritionniste. Or, d’autres personnes pourraient développer des comportements boulimiques ou anorexiques. Néanmoins, en consistant à mettre le système digestif au repos plus longtemps, le jeûne intermittent reste, selon moi, intéressant ».
Après un an de jeûne intermittent, j’ai l’intime conviction que cette diète est bénéfique pour l’organisme si elle est bien menée. Avant de vous lancer, parlez-en à votre médecin ou à un nutritionniste. Attention, la plupart des experts déconseillent fortement le jeûne aux femmes enceintes et aux enfants. Le jeûne intermittent comporte également des contre-indications pour les personnes diabétiques, celles qui souffrent d’hyperthyroïdie, d’insuffisance hépatiques et celles qui ont un IMC trop bas (>18).
Par-dessus tout, si mon expérience vous donne envie de vous lancer, ne le faites pas uniquement dans un but de perdre du poids. Si vous choisissez de mener le jeûne intermittent, faites-le pour vous et pour prendre soin de votre organisme tout entier.
Emmanuelle Jung, auteure du Jeûne intermittent : 1 an après, éd. Alpen
Merci à Alexandra Retion, diététicienne et auteure de SOS Nutrition (éd. First)
Merci à Raphaël Gruman, nutritionniste et auteur de Je me soigne avec les mésonutriments, éd. (Leduc.s)
Merci au Dr Marc Rey, neurologue spécialiste du sommeil, Président de l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance) et auteur de 50 Règles d’or pour bien dormir (éd. Larousse).
Merci au Dr Frédéric Saldmann, cardiologue et nutritionniste, auteur de On n’est jamais mieux soigné que par soi-même (éd. Plon)
Merci à Johanna Rozenblum, psychologue clinicienne
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