Vous prenez vos médicaments consciencieusement, en respectant la posologie et en évitant d’éventuelles interactions médicamenteuses avec d’autres traitements ? Bien. Mais prenez-vous en compte votre alimentation ? La distance entre les prises et vos repas ? La Dre Hélène Verdoux, psychiatre et professeur de psychiatrie à l'Université de Bordeaux, décortique les interactions possibles entre somnifères et anxiolytiques et aliments et prévient : “Les médicaments sont absorbés et transformés par les mêmes organes que les aliments, d’où le risque parfois de court-circuit. Il peut aussi exister une compétition entre les molécules des médicaments et des aliments.”
Une problématique courante car les psychotropes (il en existe plus de 1000 références) sont très couramment prescrits en France, pour des pathologies psychiatriques mais aussi pour des troubles du sommeil, des épisodes dépressifs ou anxieux ou des douleurs chroniques.
Les graisses alimentaires peuvent accélérer la libération du principe actif du médicament hypnotique. Cela peut entraîner un effet sédatif trop rapide ou trop intense.
“Dans la plupart des cas, ces interactions n'entraînent ni surdosage, ni surdosage, tient à rassurer la psychiatre. Si un risque existe, le prescripteur vous informe. Néanmoins, ces interactions entre psychotropes et alimentation peuvent entraîner des discordances entre la dose prescrite et les effets observés.”
Mieux vaut donc rester vigilant et ne pas hésiter à demander à son médecin ou son pharmacien le moment idéal de prise d’un médicament psychotrope.
Alimentation : antidépresseurs et hypnotiques moins bien absorbés
L’alimentation peut modifier l’absorption du médicament au niveau digestif. C’est le cas avec la quétiapine à libération prolongée (seule disponible en France, commercialisée sous le nom de Xeroquel), un neuroleptique utilisé dans le traitement des épisodes dépressifs et des troubles bipolaires. “Il faut prendre la quétiapine, dont les prescriptions augmentent chez les seniors, en dehors des repas car les graisses accélèrent la libération du principe actif, argumente la Dre Veroux. Cela peut entraîner un effet sédatif trop rapide ou trop intense.”
A l’inverse, les graisses ralentissent l’absorption de certains hypnotiques (prescrits dans les troubles du sommeil notamment) comme le zolpidem, la zopiclone et le daridoxant. “’L’effet survient plus tard et est moins intense”, précise la Dre Verdoux qui conseille de prendre ces médicaments en dehors des repas. Tout comme les imipraminiques, aussi appelés antidépresseurs tricycliques (Clomipramine, Imipramine, Amitriptyline, Nortriptyline, Protriptyline, Maprotiline, Amoxapine, Doxepine, Desipramine, Trimipramine, Dotherpine, Lofepramine, Tianeptine), car leur absorption est diminuée en cas de repas riche en fibres.
Psychotropes et pamplemousse : les liaisons dangereuses
Le pamplemousse contient des substances qui peuvent modifier le métabolisme des médicaments psychotropes. “Il peut entraîner un surdosage de nombreux médicaments en inhibant le CYP3A4 (enzyme du tube digestif et du foie), note encore la psychiatre. Un seul pamplemousse ou un verre de jus augmente le risque, surtout dans les six heures suivant la prise, avec des effets qui peuvent durer jusqu’à vingt-quatre heures. Les principaux psychotropes concernés sont la quétiapine, la sertraline, le diazépam, la carbamazépine, le buspirone, le daridoxant et la méthadone.”
Si vous avez l’habitude de consommer du pamplemousse, en fruit ou en jus de fruit, informez systématiquement votre médecin et votre pharmacien. Les intéractions avec les traitements médicamenteux sont nombreuses avec cet agrume.
Lithium : des teneurs en sel à contrôler
Le lithium est un médicament prescrit dans les troubles bipolaires et qui doit s’assortir de précautions alimentaires particulières. “Le rein ne reconnaît pas le lithium et le traite comme le sodium (le sel), ce qui peut poser problème, décrypte la spécialiste. Si l’alimentation est pauvre en sel, le rein “stocke” le lithium à la place, avec un risque de surdosage ; inversement, si l’alimentation est riche en sel, le lithium est davantage éliminé. Il faut donc faire attention aux changements dans la quantité de sel consommée.”
Bien que connue, cette interaction peut porter à conséquence car ces traitements sont généralement pris au long cours. Au fil des années, on peut ainsi avoir tendance à être moins vigilant sur les variations de sel de notre alimentation.
Echange avec la Dre Hélène Verdoux, psychiatre
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