"Vous faites de la rétention d’eau, vous avez un trouble veineux. Faites du sport, revoyez votre alimentation et mettez des bas de contention"… Voici le genre d’injonctions maintes fois assénées à Anaïs Barry pendant vingt années. Vingt longues années de discours tout faits, de jugements à l’emporte-pièce et de quolibets que la jeune femme a dû encaisser, en plus des douleurs quotidiennes ressenties dans ses jambes.
Aujourd’hui âgée de 34 ans, Anaïs sait enfin mettre des mots sur le mal dont elle souffre et qui lui a gâché son adolescence : le lipoedème. Il lui aura fallu deux décennies de détresse psychologique et d’errance médicale pour obtenir le bon diagnostic.
Dans un témoignage à France 3 régions, la trentenaire raconte sa douloureuse expérience face à la cette maladie chronique méconnue par le quidam mais aussi par le corps médical. Le manque de reconnaissance du lipoedème en France, aussi appelé "maladie des jambes poteaux", explique le tabou qui pèse sur cette pathologie dont souffriraient 10 % des femmes en France.
Détresse psychologique et errance médicale
Le lipoedème se caractérise par un dépôt anormal de tissu adipeux sous la peau, à l’origine d’une augmentation disproportionnée et progressive du volume des jambes (et dans certains cas, les bras). Les deux jambes sont impactées de manière symétrique mais les mains et les pieds sont épargnés par cette accumulation de tissus graisseux.
"Les zones de lipoedème ont un aspect différent de la graisse corporelle normale" et présentent un aspect capitonné, précise l’Association Maladie lipoedème France, qui sensibilise à cette pathologie sur son compte Instagram.
Le lipoedème survient en général à l’adolescence mais peut aussi se manifester après une grossesse ou à la ménopause. Son évolution à bas bruit charrie dans son sillage un lot de souffrance physique, esthétique et mentale chez les patientes.
Les femmes sujettes au lipoedème peuvent présenter des hématomes, ressentir des douleurs modérées à sévères, de la fatigue, une sensation de lourdeur et un inconfort aux jambes. Les jambes ou les bras affectés peuvent être tendus ou sensibles, selon l’Association Maladie lipoedème France. Des activités auparavant banales comme marcher longuement, monter des escaliers ou courir peuvent devenir difficiles. Vivre avec la maladie est un chemin de croix : à la réticence à en parler se greffent la peur du regard de l’autre, les stratégies de dissimulation des jambes trop volumineuses (ou des bras) et l’auto-flagellation dont s’infligent les femmes concernées. Au-delà de l’impact sur la psyché qui esquinte l’image de soi et l’estime de soi, les patientes se heurtent souvent à une longue errance médicale. Car si le lipoedème peut se manifester en l’absence de surcharge pondérale,il n’est pas rare que cette maladie soit confondue avec l’obésité. Ces erreurs de diagnostic s’ajoutent à la stigmatisation dont sont victimes les femmes atteintes de lipoedème en France, laissant des séquelles durables sur la psyché. La méconnaissance de cette pathologie dans l’Hexagone peut sembler paradoxale, alors que le lipoedème est reconnu comme une maladie à part entière par l’Organisation mondiale de la Santé depuis 2018. Pour les patientes, il est urgent que la France se mettre au diapason de l’OMS et reconnaisse enfin cette maladie. L’Association Maladie lipoedème France milite en ce sens et contribue à briser le silence autour de la maladie. Le collectif a adressé un courrier au ministère de la Santé fin 2023 rassemblant 500 témoignages de patientes. Avec cette missive, l’association appelait le gouvernement à mieux sensibiliser les professionnels de santé et l’opinion publique sur le lipoedème à impulser une réflexion pour améliorer le diagnostic et la prise en charge, mais aussi à attribuer des fonds pour la recherche sur la maladie. "C’est une question de santé publique", soulignait l’association, reprise par Le Parisien. Une meilleure reconnaissance du lipoedème sonnerait comme une première victoire pour les femmes qui escamotent leur maladie. Faciliter le diagnostic aiderait à faire sauter certains blocages qui corsètent les patientes. Cela pourrait les aider à mieux vivre avec la maladie, alors qu’il n’existe aucun traitement pour en guérir en dehors d’opérations chirurgicales très onéreuses. Pour Léna H., apprendre qu’elle souffrait de lipoedème a été libérateur. Elle raconte au Huffington Post : "Pour moi, ce diagnostic a été une renaissance. Cet été, pendant mes vacances, j’ai posté pour la première fois une photo de moi en maillot de bain sur Instagram et je me suis sentie libre. Grâce aux réseaux sociaux, j’ai rencontré une communauté de femmes atteintes de lipœdème qui avait vécu un parcours similaire : des années d’errance médicale, de souffrance, et de troubles du comportement alimentaire….".Lipoedème : une maladie invalidante
Une maladie sous-estimée en France mais reconnue par l’OMS
"Ce diagnostic a été une renaissance"
https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/tarn/albi/temoignage-j-ai-toujours-cherche-a-cacher-mon-corps-1-femme-sur-10-touchee-par-le-lipoedeme-ou-maladie-des-jambes-poteaux-2931207.html
https://www.chuv.ch/fr/cmvr/accueil/patients-et-familles/maladies-vasculaires-rares/le-lipoedeme
https://www.leparisien.fr/societe/sante/le-lipoedeme-cette-maladie-des-jambes-poteaux-qui-nest-pas-reconnue-en-france-07-11-2023-MECVH7RH2FC7HDQINQYZWZNJ3M.php
https://www.huffingtonpost.fr/life/article/pendant-20-ans-les-medecins-m-ont-encouragee-a-faire-des-regimes-cela-a-aggrave-mon-lip-deme-temoignage_221915.html
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