- 1 - Réagir de manière impulsive face à une personne qui souffre du trouble bipolaire
- 2 - Favoriser un comportement d'excitation avec un bipolaire
- 3 - Culpabiliser le malade et lui faire la morale
- 4 - Entrer dans le conflit et critiquer
- 5 - Tout mettre sur le compte de la maladie
- 6 - Vouloir tout gérer seul
- 7 - "Tu exagères"
- 8 - "Motive-toi"
- 9 - "Tu te comportes comme un fou/une folle"
- 10 - "Être bipolaire, c'est à la mode !"
- 11 - Un bipolaire peut-il vivre seul ?
Le trouble bipolaire est un trouble de l’humeur caractérisé par l’alternance d’épisodes d’excitation allant de l’irritabilité à l’euphorie (on parle de manie ou d’hypomanie) et de périodes de dépression parfois profonde. Cette affection psychiatrique est susceptible de compromettre la vie socio-professionnelle du malade et l’expose à un risque de suicide. Si vous côtoyez une personne bipolaire, il y a dix choses à ne faire sous aucun prétexte.
A lire aussi :
Bipolaire : 5 conseils pour gérer vos troubles de l'humeurRéagir de manière impulsive face à une personne qui souffre du trouble bipolaire
"Une personne bipolaire a avant tout besoin de calme et de réassurance", explique le docteur Christian Gay, psychiatre, spécialiste des troubles bipolaires et auteur du livre Vivre avec un maniaco-dépressif. L'essentiel est d'éviter de se laisser déborder par ses émotions.
En phase maniaque, le patient bipolaire "colle" en effet, à l'atmosphère générale et répond au quart de tour par des réactions disproportionnées. Face à un interlocuteur agité, il surenchérit et lorsqu’un patient agresse verbalement, répondre sur le même ton ne peut qu’aggraver ses réactions. En phase dépressive, le patient bipolaire peut aussi se montrer agressif ou irritable, mais il ne faut pas répondre avec les mêmes armes.
Ce qu'il faut faire : Il vaut mieux essayer de prendre de la distance et de relativiser, parce qu'on sait que la personne est bipolaire. Ce n'est pas toujours facile, mais adopter la réaction adéquate peut se travailler, par exemple, en thérapie de groupe. S'il vous arrive de "craquer" et de réagir de manière un peu trop impulsive, pas la peine de culpabiliser, cela arrive à tous les proches de personnes bipolaires.
Favoriser un comportement d'excitation avec un bipolaire
Dans la phase maniaque, une personne bipolaire se trouve dans un état d’hypersensorialité : ses sens sont affûtés et ses perceptions (visuelles, gustatives, auditives, olfactives, tactiles) sont exacerbées.
Ce qu'il faut faire : "Il vaut mieux favoriser un environnement de repos et de calme pour stabiliser l'humeur de la personne bipolaire : limiter les bruits, la musique, l’usage immodéré de la télévision, les longues soirées, les discussions interminables, les activités sportives en excès. Tout est bien sûr question de dosage, il faut rester discret et ne surtout pas avoir l'air d'infantiliser la personne", conseille le docteur Gay.
Il peut être utile de dresser avec le patient bipolaire la liste de ses facteurs d’excitation, de fatigue et de stress. Pour l’un, ce sera la pratique sportive qu’il faudra réduire, pour l’autre, les heures supplémentaires au bureau, pour un troisième, les virées arrosées entre amis, pour un autre encore, les déjeuners avec la belle-famille…
À savoir : "Rechercher l’équilibre et la modération dans les rythmes quotidiens ne signifie pas supprimer tout relief dans le déroulement de la vie familiale", nuance le psychiatre. Il est important de conserver certaines habitudes et moments forts de la vie du foyer (réunions de famille, anniversaires) à condition de modérer leur intensité. Les fêtes, en revanche, représentent pour les patients bipolaires en phase maniaque un exercice périlleux.
Combien de temps dure une phase maniaque ?
La durée d'une phase maniaque peut considérablement varier d'une personne à l'autre. En général, un épisode maniaque peut durer de quelques jours à plusieurs semaines.
Culpabiliser le malade et lui faire la morale
"Il faut retenir que la dépression dont souffre une personne bipolaire n’est pas liée à un manque de volonté, que c’est une maladie à part entière, en rapport avec des dysfonctionnements neurobiologiques. Inutile donc de culpabiliser le malade, de lui faire la morale, de l’infantiliser ou de lui demander de prendre sur lui", note le docteur Gay.
Les reproches du type "tu y mets de la mauvaise volonté" sont contre-productifs, car le malade bipolaire n'est pas en mesure de contrôler son trouble. Dans le même ordre d’idée, exhorter un patient déprimé à se secouer est inadapté et inefficace.
Ce qu'il faut faire : il vaut mieux manifester de l'empathie, de la compassion et de la compréhension, en évitant de porter un jugement. Ne minimisez pas les plaintes et les sentiments exprimés par la personne bipolaire et accepter son état comme elle le décrit, même si on ne le comprend pas.
Est-ce qu'un bipolaire s'isole ?
Oui, il est possible qu'une personne atteinte de trouble bipolaire s'isole. Surtout pendant les phases dépressives. Durant ces périodes, elle peut ressentir une perte d'intérêt pour les activités sociales, une fatigue intense, et un sentiment de désespoir, ce qui peut la conduire à éviter les interactions sociales.
Entrer dans le conflit et critiquer
"Face à une personne bipolaire qui se trouve en état d’excitation, la communication est souvent compliquée, voire impossible. Évitez de contredire, de critiquer ouvertement et contourner les mots qui fâchent, car une personne bipolaire prend la mouche facilement."
Ce qu'il faut faire : rester positif. Il vaut mieux, par exemple, parler au conditionnel plutôt qu’à l’impératif ("ce serait bien si… " plutôt que "tu dois… ") et montrer de l’empathie : "Je te comprends, tu as beaucoup travaillé ces derniers temps, tu devrais te reposer un peu." Lors des phases maniaques, il faut faire preuve de tact, de diplomatie et de patience", conseille le docteur Gay. L’objectif est "de calmer le jeu", d’éviter le conflit et de maintenir un lien. Restez à l'écoute et se montrer rassurant, bienveillant, encourageant.
Tout mettre sur le compte de la maladie
"Le principal danger est d’interpréter toute manifestation émotionnelle ou comportementale comme l’annonce d’une rechute : un patient bipolaire a le droit de rire, se mettre en colère sans que cela signifie qu’il monte progressivement dans une phase maniaque", rappelle le spécialiste.
Ce qu'il faut faire : essayer de ne pas s'inquiéter et se crisper au moindre changement d'attitude, car il existe des intervalles "libres" entre les phases maniaques et dépressives, durant lesquelles l'attitude du patient bipolaire est la même que celle d'une personne non malade.
Que devient un bipolaire sans traitement ?
Sans traitement, une personne atteinte de trouble bipolaire peut connaître des épisodes plus fréquents et plus sévères de manie et de dépression. Cela peut entraîner des conséquences graves sur sa vie personnelle, professionnelle et sociale. Les risques incluent des problèmes relationnels, des difficultés au travail, des comportements impulsifs ou dangereux, et un risque accru desuicide.
Vouloir tout gérer seul
"L’entourage joue un rôle important dans la prise en charge du trouble bipolaire. Il peut aider et accompagner le patient, mais son rôle s'arrête là : il ne doit pas se substituer aux soignants", rappelle le docteur Gay.
Ce qu'il faut faire : si une personne proche souffre de troubles bipolaires, il est important de faire alliance avec les professionnels formés à cette maladie. Il faut aussi se faire aider et prendre du temps pour soi. "Maintenir ses propres activités, ses propres lieux et temps de ressourcement et rechercher un soutien apportent de sérieuses garanties contre l’effet boule de neige qu’a parfois la maladie maniaco-dépressive sur les couples et les familles en général", assure le psychiatre.
Il est, par exemple, intéressant de participer aux groupes de parole et d’échange proposés par des associations (comme l'Union nationale des amis et des familles de malades psychiques, ou Unafam), voire de suivre soi-même une psychothérapie si on en ressent le besoin.
"Tu exagères"
Dire "Tu exagères" à une personne souffrant de bipolarité peut particulièrement être blessant et contre-productif.
Pour une personne vivant avec cette maladie, les émotions sont souvent difficilement régulées en raison d’un déséquilibre du système qui agit comme un régulateur de l'humeur. Minimiser leurs ressentis revient à nier leur réalité, ce qui peut les isoler davantage dans un monde qu’ils ressentent déjà comme complexe et parfois incompréhensible.
Ces paroles peuvent entraîner des conséquences graves, comme un accroissement de leur mal-être ou une détérioration des liens de confiance.
Il est essentiel de montrer de l’écoute et du respect pour favoriser un environnement plus bienveillant et sûr.
"Motive-toi"
Dire "Motive-toi" à une personne bipolaire semble encourager, mais cette phrase peut avoir des effets très négatifs, en particulier si la personne traverse un épisode dépressif majeur.
Dans ces moments, l'énergie, la motivation et même les actions les plus simples peuvent devenir hors de portée. Au lieu d’apporter un soutien, ce type de remarque peut être perçu comme un jugement ou une incompréhension de leur réalité.
Il est bien plus bénéfique d’offrir une oreille attentive et d’être là pour les écouter sans pression. En adoptant une attitude bienveillante, on contribue à préserver leur qualité de vie et à créer un environnement dans lequel ils peuvent se sentir soutenus et compris.
"Tu te comportes comme un fou/une folle"
Dire "tu te comportes comme un fou/une folle" à une personne bipolaire peut profondément être blessant et stigmatisant. Une telle remarque renforce les préjugés et réduit la complexité de cette maladie à une simple caricature.
Une personne bipolaire suit souvent un suivi médical précis et un traitement de fond pour stabiliser son état et améliorer son quotidien. Cette pathologie est un défi réel pour ceux qui en souffrent, car leur perception du monde et leurs interactions sociales peuvent déjà être altérées par leurs symptômes. Employer de tels termes péjoratifs, loin d’aider, peut au contraire aggraver leur sentiment d’isolement et de mal-être.
Adopter un discours respectueux et bienveillant est essentiel pour soutenir ces personnes et leur permettre d’évoluer dans un environnement favorisant leur mieux-être.
"Être bipolaire, c'est à la mode !"
Affirmer "Être bipolaire, c'est à la mode !" à une personne touchée par cette maladie est non seulement déplacé, mais peut également banaliser un trouble sérieux qui affecte profondément la vie de ceux qui en souffrent.
Vivre avec la bipolarité signifie faire face à des variations imprévisibles de l’humeur et nécessite souvent une prise en charge médicale constante. Réduire cette réalité complexe à une simple tendance revient à méconnaître les défis que les malades affrontent quotidiennement pour trouver un équilibre dans un monde parfois peu compréhensif.
Ces propos, loin d’être anodins, peuvent renforcer les fausses idées sur le trouble bipolaire et accentuer le sentiment d’incompréhension chez ceux qui le vivent.
Un peu de considération et d'empathie contribuent à créer un environnement plus respectueux et soutenant.
Un bipolaire peut-il vivre seul ?
Oui, une personne atteinte de trouble bipolaire peut vivre seule, mais cela dépend de la gravité de ses symptômes et de la gestion de son traitement. Avec un traitement approprié, un bon réseau de soutien, et des stratégies de gestion efficaces, de nombreuses personnes bipolaires mènent une vie indépendante et épanouissante.
Cependant, il est important qu'elles aient accès à un soutien médical et psychologique régulier pour aider à gérer les épisodes et maintenir une stabilité émotionnelle.
Sarah Bonnot, psychothérapeute systémique et stratégique, nous fait part de son expertise : "les comportements des proches peuvent, sans le vouloir, renforcer certains cycles, par exemple, en tentant de surprotéger ou de contrôler, ou la sur-vigilance d’un conjoint ou un éloignement par peur des conflits".
Vivre avec un maniaco-dépressif, du docteur Christian Gay, Éditions Fayard.
Merci à Sarah Baudot Bonnot, psychothérapeute systémique et stratégique à Clamart.
Recevez encore plus d'infos santé en vous abonnant à la quotidienne de Medisite.
Votre adresse mail est collectée par Medisite.fr pour vous permettre de recevoir nos actualités. En savoir plus.