Alzheimer : certains patients ont la maladie sans présenter de symptômesIstock
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Des oublis a priori anodins, mais qui deviennent de plus en plus envahissants au fil du temps. La défaillance de la mémoire à court terme est souvent un des premiers symptômes visibles de la maladie d’Alzheimer. Cette maladie neurodégénérative touche 900 000 personnes en France, dont deux fois plus de femmes selon l’Institut Pasteur.

Cette démence est liée à une dégradation des neurones dans l’hippocampe, une zone cérébrale impliquée dans le fonctionnement de la mémoire et des apprentissages.

Si les premiers signes peuvent mettre des années à apparaître, les patients touchés par cette lente dégénérescence neuronale se heurtent ensuite souvent à des troubles de la mémoire, des difficultés d’orientation ou encore des problèmes à se souvenir des événements. Des symptômes qui évoluent vers une progressive perte d’autonomie.

Alzheimer : des anomalies cérébrales sans altération des fonctions cognitives

Oui mais voilà. Il semblerait que tous les malades d’Alzheimer ne subissent pas les contrecoups du déclin cognitif. Certaines personnes qui présentent les anomalies cérébrales d’Alzheimer, à savoir l’agrégation anormale de peptide bêta amyloïde sous forme de plaques et de protéines tau (protéine de structure des neurones), continuent à mener leur vie normalement sans pâtir de perte de mémoire ou d’autres signes classiquement associés à la maladie.

Ces cas de malades d’Alzheimer diagnostiqués épargnés par ses symptômes ont été documentés il y a quelques années.

Ces cerveaux dits "résilients" ne ressentent aucune altération de leur qualité de vie jusqu’à leur décès. Comment est-ce possible ? Jusqu’ici les scientifiques peinaient à expliquer ce phénomène. Mais des chercheurs néerlandais du Netherlands Institute for Neuroscience apportent de nouveaux éléments éclairants.

Dans leur récente étude, parue le 25 avril dans Acta Neuropathologica Communications, Luuk de Vries et son équipe, suggèrent qu’une partie de la réponse réside dans des différences au niveau moléculaire et cérébral.

Les mécanismes de la résilience décortiqués dans le cerveau

Pour le savoir, ils ont analysé des cerveaux provenant de la Banque de données néerlandaise de cerveaux (qui conserve des tissus cérébraux provenant de plus de 5 000 donneurs décédés atteints d'un large éventail de maladies cérébrales).

"Nous avons recherché dans la banque de cerveaux des donneurs présentant des anomalies du tissu cérébral et ne présentant pas de déclin cognitif. Sur l'ensemble des donneurs, nous en avons trouvé 12, ce qui est assez rare. Nous pensons que la génétique et le mode de vie jouent un rôle important dans la résilience, mais le mécanisme exact est encore inconnu", explique dans un communiqué, Luuk de Vries, principal auteur de l’étude.

En comparant l’expression des gènes entre les cerveaux atteints d’Alzheimer avec les symptômes et les cerveaux résilients, il est apparu que ces derniers (les asymptomatiques) affichent des processus moléculaires et cérébraux distincts.

Des processus moléculaires différents

Dans le détail, les astrocytes (des cellules gliales qui protègent le cerveau) produiraient davantage de métallothionéine, une protéine antioxydante.

Les astrocytes demandent souvent l'aide de la microglie (d’autres cellules gliales qui interviennent dans la réponse immunitaire et s’activent pour éliminer les protéines amyloïdes dans le cas de la maladie d’Alzheimer). Problème, les microglies se révèlent parfois trop agressives et peuvent aggraver l’inflammation. Mais les cerveaux résilients semblent être davantage à l’abri de cet effet pervers.

Autre différence constatée, chez les malades d’Alzheimer avec symptôme, un autre processus appelé "réponse aux protéines non pliées" dysfonctionne : la réaction des cellules cérébrales qui élimine automatiquement une protéine toxique mal pliée s’en trouve affectée. Mais pas chez les cerveaux "résilients".

Enfin dernier indice, les personnes résilientes pourraient avoir plus de mitochondries (usines énergétiques des cellules neuronales) dans leurs cellules cérébrales des personnes résilientes, leur assurant une meilleure production d'énergie.

Sport, lien social et activités stimulantes : trois leviers préventifs

Ces différences de processus ne permettent pas d’apporter des conclusions robustes. De nombreuses questions restent en suspens, admettent les chercheurs : "Il reste difficile de déterminer, à partir de données humaines, quel processus est à l'origine de la maladie. On ne peut le démontrer qu'en changeant quelque chose dans les cellules ou les modèles animaux et en observant ce qui se passe ensuite. C'est la première chose que nous devons faire maintenant".

L’enjeu de faire avancer ces connaissances est immense puisqu’il pourrait ouvrir la voir à de nouvelles pistes thérapeutiques : "si nous parvenons à trouver la base moléculaire de la résilience, nous aurons alors de nouveaux points de départ pour le développement de médicaments qui pourraient activer les processus liés à la résilience chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer".

En attendant, il reste possible d’agir sur certains facteurs qui aident à retarder l’apparition de la maladie d’Alzheimer en jouant sur des leviers connus : faire de l'exercice physique régulier, être sur le plan cognitif et entretenir des liens sociaux en font partie.

Sources

https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/alzheimer-maladie

https://nin.nl/news/alzheimers-disease-without-symptoms-how-is-that-possible/

https://actaneurocomms.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40478-024-01760-9

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