Les differentes formes de solitude, selon un psychologue

Problème de santé publique mondial selon l’Organisation mondiale de la Santé, la solitude est un fléau invisible qui gangrène le quotidien. En France, 1 personne sur 5 affirme se sentir régulièrement seule, selon l’Etude Solitudes 2023 de la Fondation de France. Parmi eux, 83 % disent en souffrir, un chiffre en progression depuis 2020. La solitude fait de plus en plus mal et ses conséquences dévastatrices sur la santé physique et la psyché sont documentées : la solitude, définie par l’OMS par "la douleur sociale liée au fait de ne pas se sentir en lien avec autrui", et le manque de lien sociaux qui en découle, sont associés à un risque accru d'infarctus, d’accident vasculaire cérébral, d’anxiété généralisée, de phobie sociale, de dépression, de démence, et de décès précoce.  

Tout le monde peut être touché par un sentiment de solitude ponctuellement sans que celui-ci n’engendre ce cercle vicieux pour le bien-être et la santé, observe Sebastien Garnero, psychologue clinicien et psychothérapeute, contacté par Medisite. Mais c’est quand cette solitude prend ses quartiers et nous submerge comme un raz-de-marée qu’elle devient pernicieuse. "Tout le monde peut vivre une sorte de sentiment de solitude ponctuel mais quand il s’installe, plus d’un mois ou deux mois, cela peut être inquiétant car cela signifie qu’on s’est déconnecté des autres ou qu’on subit cette déconnexion".

Une solitude rampante alimentée par les évolutions sociétales

Phénomène de société qui frappe souvent les plus précaires (cles chômeurs mais aussi les personnes âgées les plus fragiles, retraités, personnes confrontées à la perte d’un proche ou à l’affaiblissement du lien social), la solitude a pu croître ces dernières décennies en se nourrissant de l’évolution des modes de vie, de la dissolution des lieux traditionnels de sociabilité et de l’éclatement des structures familiales. "Auparavant, les différentes générations vivaient ensemble géographiquement. Mais ces 40 dernières années on a assisté à une atomisation de la structure familiale classique", constate Sebastien Garnero.

L’émergence du numérique et le boom des réseaux sociaux s’est traduite paradoxalement par un délitement du lien social. "Nous n’avons jamais eu autant de connaissances grâce au numérique, et paradoxalement, autant de personnes qui se sentent seules", déplore Philippe Carli, président de l’association Astrée, qui œuvre à restaurer le lien social, cité par la Fondation de France.  Un avis partagé par Sebastien Garnero" : l’hyperconnexion aux écrans ne remplace pas les liens sociaux. Si les seniors peuvent utiliser la vie numérique comme outil pour créer du lien social cela ne remplace pas le concret".

Si la solitude met dans une situation de fragilité émotionnelle, celle-ci peut puiser ses racines dans différentes sources. Sebastien Garnero nous fait part des différents visages de la solitude.

La solitude affective et émotionnelle

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Les différentes formes de solitude, selon un psychologue

C’est celle que l’on connaît le plus. La solitude affective et émotionnelle nous fait sentir "une espèce de décalage, de différentiel émotionnel par rapport aux autres, précise Sebastien Garnero. Cela peut être le cas par exemple après une rupture amoureuse, ou dans le cas d’un deuil. Cela peut aussi être une solitude liée au fait qu’on n’a pas rencontré l’amour".

La solitude sociale

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Il s’agit de la forme de solitude la plus prégnante chez le senior. La solitude sociale se caractérise par un "manque d’interactions avec ses pairs, avec sa communauté de référence". Cette fragilité relationnelle qui conduit à l’isolement social (l’insuffisance de relation sociales) se manifeste par le tarissement des réseaux de sociabilité (amis, voisins, famille, collègues ou milieu associatif).

En 2023, 12 % des Français se trouvent en situation d’isolement total, et une personne sur 3 n’a aucun ou qu’un seul réseau de sociabilité, selon l’étude Solitudes 2023 de la Fondation de France.

La solitude liée au fait de se sentir à part

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Le sentiment de solitude peut aussi germer lorsque l’on ressent "une sorte de déconnexion avec les autres, on se sent atypique". Il s’agit d’une forme de solitude émotionnelle. 

La solitude liée à la difficulté à vivre ses émotions

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Le sentiment de solitude peut se nourrir de la difficulté à ressentir ses émotions. "Cette sorte d’anesthésie émotionnelle se retrouve dans la dépressivité.  On peut se sentir seul même en étant en couple ou au sein d’un groupe. Dans ce cas, la personne a du mal à avoir cette connexion avec l’autre et à soi-même", explique Sebastien Garnero.

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La solitude liée à l’ennui

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L’absence de stimulation physique mentale et intellectuelle peut donner un sentiment de solitude. "On le voit dans le milieu professionnel avec des situations de "bore out", où les personnes se sentent inutiles et ne se sentent plus stimulées".  Cette routine, ce sentiment d’ennui au travail, et cette perte d’intérêt peuvent engendrer une forme de lassitude et une perte d’élan vital et occasionner des troubles psychosomatiques (maux de ventre, maux de dos, blocages physiques), ou encore des phobies, des anxiétés ou des attaques de panique.

La solitude existentielle

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Cette forme de solitude pousse à se poser des questions spirituelles, amène à des carrefours existentiels où on s’interroge sur le sens de sa vie. On peut ressentir l’imminence de faire quelque chose. On peut observer ce sentiment à l’adolescence ou en cas de maladie. La pandémie de Covid aussi a provoqué "cet arrêt sur images", propice à se remettre en question, créant parfois un sursaut, en donnant de nouvelles directions à l’existence (changement de métier, de lieu de vie…).

Si cette solitude a un versant positif, elle peut aussi être à double-tranchant. "Ces questionnements peuvent se manifester d’un point de vue physique ou psychique : on peut à la fois être dans une recherche de sens mais aussi nourrir une angoisse, un sentiment de vide intérieur, décrypte le thérapeute. Cette quête de signification constante où on voudrait que tout fasse sens peut générer une déconnexion, une fuite des idées à risque de dépression et de détresse", met en garde le psychologue.

Solitudes : par quels moyens la surmonter ?

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Indépendamment de la forme qu’elle revêt, la solitude demeure une source de souffrance qui nécessite une prise en charge adaptée. Différentes solutions existent pour trouver du soutien et remonter la pente. "Il importe de relancer les liens sociaux. Il est possible de combler ce sentiment de solitude en participant à des activités qui permettent d’échanger et de nouer du lien social, tels que les activités associatives, le bénévolat ou encore la pratique d’activités physiques collectives", conseille Sebastien Garnero. Suivre une thérapie constitue aussi une option intéressante : "Cela peut être important de suivre une thérapie adaptée, en psychothérapie individuelle ou en thérapie de groupe appelée thérapie de soutien où on met en place des groupes de parole, que ce soit pour relancer sa vie affective, amicale ou amoureuse ». Des approches holistiques comme la médecine douce, le yoga, la méditation et l’hypnose peuvent aussi être d’un bon secours, en participant au bien-être global.

Solitude : à quel moment doit-on s’inquiéter ?

L’expert donne les signes évocateurs de la solitude qui doivent alerter et inciter à trouver du soutien. « Dès qu’on commence à se poser trop de questions, qu’on se sent seul, qu’on a besoin des autres mais qu’on n’arrive pas à s’organiser son agenda, c’est qu’on est déjà bien isolé. De même, lorsque l’on ressent des symptômes anxieux, dépressifs, phobiques, ou encore un ralentissement physique et une perte de motivation, ce sont là différents indicateurs de solitude qui doivent nous inciter à consulter".

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