C'est une question qui fait rage. Faut-il faire peser sur la Sécurité sociale les surcoûts liés au Covid-19 ? Pour certains oui, pour d'autres non. Mais, quelle que soit l'issue de ce débat, actuellement discuté devant l'Assemblée Nationale, la santé financière de la France est en jeu. D'autant plus que le déficit de la Sécurité Sociale est estimé à 41 milliards d'euros en 2020, alors qu'il n'était (que) d'1,9 milliard en 2019.
Sécurité sociale : 92 milliards d'euros de déficits futurs
Ce lundi 8 et mardi 9 juin, une commission spéciale de l’Assemblée nationale est chargée d’examiner deux projets de loi – organique et ordinaire – sur "l’autonomie et la dette sociale".
Concrètement, ces textes, qui doivent être discutés en séance à partir du 15 juin, visent à financer 92 milliards d’euros "au titre des déficits futurs" que la Sécurité Sociale est susceptible d’enregistrer durant la période 2020-2023.
Le gouvernement devra également remettre au Parlement, au plus tard le 30 septembre, un rapport sur "les conditions de création d'un nouveau risque ou une nouvelle branche de Sécurité sociale". Ce projet ouvre la voie à une concertation et crée un financement d'amorçage, en détournant 2,3 milliards d'euros de CSG affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) à partir de 2024.
Ces deux projets de loi arrivent à un moment où les finances du système de protection sociale plongent dans le rouge. Le gouvernement essaye donc de limiter la "casse", même si l'avenir s'annonce assez difficile.
En juin dernier, déjà, Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, avait alerté l'exécutif en dévoilant une nouvelle estimation du déficit de la "Sécu" pour cette année : 52,2 milliards d'euros, soit 11 milliards de plus par rapport à la précédente annonce faite fin avril.
Crise du Covid-19 : pourquoi un tel coût ?
Toujours d'après "Le Monde", plusieurs facteurs expliquent cette dégradation financière impressionnante :
- La masse salariale française a engendré moins de profits durant la crise (repli des embauches, chômage partiel...).
- Le gouvernement a accordé des reports de cotisations aux entreprises afin de soulager leur trésorerie.
- Les dépenses ont flambé pour contrer l'épidémie de coronavirus et rémunérer les personnels hospitaliers.
En outre, en raison du contexte actuel si particulier, le gouvernement souhaite prolonger de neuf ans la durée de vie de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), chargée d’éponger le passif de la Sécurité Sociale.
La crise sanitaire a déjà fait plonger la Sécurité Sociale
Fin juin, Gérald Darmanin avait déjà prévenu les Français quant aux difficultés financières que la France allait rencontrer. Il avait notamment déclaré que "le plongeon" inédit des comptes de la Sécurité social, tenait du "jamais vu".
Selon lui, à cause de la crise du Covid-19, le déficit de la Sécurité sociale devrait monter à 41 milliards d'euros en 2020, en additionnant le régime général et le fonds de solidarité vieillesse. Or, la prévision initiale était de 5,4 milliards d'euros. Une différence affolante, surtout lorsque l'on prend en compte le fait que le déficit de 2019 s'élevait à "seulement" 1,9 milliard.
Certes, cette crise a un "un caractère exceptionnel". Il n'empêche que l'endettement de la France se poursuit.
Pour amortir ces coûts, le plafond d'endettement de l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss) a été relevé à 70 milliards d'euros fin mars afin d'éviter tout problème de trésorerie. On "dépasse le plafond autorisé en temps de paix", a révélé le ministre. La dette stockée s'y élève actuellement à 45 milliards.
Endettement de la France : un retour à la "normale" difficile
Ce déficit s'avère même plus élevé encore que le record de 28 milliards d'euros survenu en 2010 - deux ans après la venue de la crise financière.
Ce sont "des chiffres qui peuvent donner le tournis", a reconnu Gérald Darmanin, cité par Les Echos. Pour lui, il sera difficile, voire impossible que les "14 milliards de charges patronales reportées ces deux derniers mois" soient payées d'ici à décembre 2020.
En effet, de nombreuses sociétés ont souffert du manque à gagner avec la crise du coronavirus et ne pourront régler deux fois des cotisations lors du retour à la normale.
Qui peut bénéficier de la Sécurité Sociale en France ?
D'après le site Améli, "toute personne qui travaille ou réside en France de manière stable et régulière a droit à la prise en charge de ses frais de santé à titre personnel et de manière continue tout au long de sa vie".
Les conditions d'ouverture de droits sont simplifiées pour permettre à n'importe quelle personne d'y accéder :
- les salariés (et assimilés) n'ont plus à justifier d'une activité minimale, seul l'exercice d'une activité professionnelle est pris en compte ;
- les travailleurs indépendants (artisans, commerçants, professions libérales, micro-entrepreneurs...) ont également droit à la prise en charge de leurs frais de santé dès le début de leur activité professionnelle.
Quant aux personnes sans activité professionnelle (chômeurs), elles bénéficient de la prise en charge de leurs frais de santé, dès lors qu'elles résident en France de manière stable et régulière.
Elles n'ont plus besoin d'être rattachées à un assuré ouvrant droit. Ainsi, pour les 18 ans et plus, la notion "d'ayant droit" disparaît. Seuls les mineurs continuent d'avoir le statut d'ayant droit.
En outre, toute personne majeure est assurée à "titre individuel".
Elle peut choisir de percevoir ses remboursements sur son propre compte bancaire, recevoir son propre décompte de remboursement et disposer de son propre compte Ameli (ce qui garantit une meilleure confidentialité des informations sur les frais de santé pris en charge).
La "dette sociale" du coronavirus doit-elle être financée par la Sécurité sociale ?, 8 juin 2020, Le Monde.
Coronavirus : le déficit de la Sécurité sociale va plonger à plus de 40 milliards d'euros, Les Echos, 22 avril 2020.
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