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Les vertus du sexe pour le bien-être émotionnel sont bien connues. L’amour, ou plus précisément l’orgasme sexuel, libère les "hormones du plaisir", l’endorphine et la dopamine (les mêmes libérées par l’effort sportif). Ces neuromédiateurs déclenchent un afflux d’émotions positives qui galvanisent le corps et l’esprit, apaisent, rapprochent de l’extase. Mais chez certains, en lieu et place de cette bulle euphorisante, la fusion charnelle se solde par une sorte de spleen, d’abattement inavouable et de mélancolie.

Ce coup de blues inattendu, incontrôlé et parfois difficile à escamoter, se révèle plus courant qu’on ne le croit. Il porte même un nom : la dysphorie post-coïtale. "La dysphorie renvoie aux troubles de l’humeur. On l’observe chez des personnes qui font part d’une forme de tristesse, de dépressivité et d’un certain malaise à la suite de la relation sexuelle", explique Sebastien Garnero, docteur en psychologie, psychologue clinicien, psychothérapeute, sexologue, contacté par Medisite.

Dysphorie post-coïtale : une tristesse qui touche plus les femmes

Une étude parue en 2022 dans The Journal of Sexual medicine a défini la dysphorie post-coïtale comme "un dysfonctionnement sexuel impliquant des émotions négatives telles que la mélancolie, l'irritabilité, la détresse et la dépression, associées à des crises de larmes et à un besoin d'évasion à la fin d'une relation sexuelle consensuelle précédemment satisfaisante sous tous les aspects".

Les chercheurs italiens ont conclu que cette déprime post-sexe concernait plus les femmes que les hommes. 48,3 % des femmes participantes à leur étude portant sur un petit panel de 202 volontaires, avait déclaré pleuré au moins une fois après un rapport sexuel, contre seulement 5,7 % de l'échantillon masculin.

Ces émotions négatives ressenties après le sexe n’en restent pas anodines. "La tristesse peut être ponctuelle et être associée à une problématique passagère de stress ou de fatigue, observe Sebastien Garnero. Cela peut traduire une décharge émotionnelle ou encore exprimer une émotion que l’on n’a pas su extérioriser à un autre moment".

Déprime post sexe : des conflits intérieurs non résolus

Quand cette dysphorie revient fréquemment après les ébats sexuels, la problématique peut camoufler des problèmes sous-jacents, des conflits intérieurs ou des problèmes de couple non résolus. Comprendre la source de cette dysphorie post-coïtale est nécessaire pour se sentir mieux dans sa sexualité mais aussi dans son quotidien. Sebastien Garnero nous éclaire sur les causes possibles.

Une insécurité affective et sexuelle

La "séparation" qui suit ce temps de fusion charnelle intense et cet d’enchevêtrement des corps, peut être mal vécue chez certaines personnes qui souffrent d’une forme d’insécurité affective et sexuelle. "La relation sexuelle crée un certain attachement, ce qui peut attiser quand elle prend fin la dynamique de l’abandon: certaines personnes se sentent seules, tristes et abandonnées", explique le thérapeute.

Dysphorie post-coïtale : une estime de soi émoussée

L’insécurité affective, des complexes corporels et un manque de confiance en soi peuvent refléter une estime de soi fragile, draguant dans leur sillage une forme d’anxiété et de tristesse après le sexe.

L’anxiété de la performance sexuelle

Le besoin narcissique de validation de ses capacités sexuelles, des attentes trop élevées non comblées dans l’acte sexuel, une pression sociale ou personnelle démesurée autour de la sexualité, symptomatiques d’une confiance en soi ébréchée, peuvent aussi générer une certaine anxiété après l’acte.

"La période réfractaire à l’acte sexuel, ce temps de latence, rend difficile une nouvelle excitation et chez certains hommes cela peut être relativement frustrant", ajoute Sebastien Garnero.

Un traumatisme vécu peut être en cause

Certaines personnes ayant souffert d’abus sexuel ou de traumatisme, ou encore d’antécédent de dépression peuvent également ressentir cet état de dysphorie après le sexe.

Dysphorie post-coïtale : des problèmes de couple

Des tensions non réglées au sein du couple peuvent trouver une résolution dans l’acte sexuel ou s’accompagner d’une décharge émotionnelle, extirpant quelques larmes aux partenaires.

Mais il arrive aussi que les émotions négatives ressenties après l’amour soient le révélateur de problèmes plus structurels, liés à des difficultés à communiquer, des non-dits, de différents non réglés ou encore de besoins non entendus ou comblés chez l’un des deux partenaires.

Une mésentente voire une frustration au sein du couple peuvent également engendrer ce désenchantement après la relation charnelle.

Parfois une incompatibilité sexuelle

L’anxiété peut cacher un certain malaise et dénoter une insatisfaction dans la relation de couple. "Cela peut aussi être le signe d’une incompatibilité au niveau sexuel où les deux partenaires ne partagent pas les mêmes envies ou les mêmes attentes. Par exemple, l’un veut du "hard" et l’autre préfère de la tendresse et de la sensualité".

Le décalage entre les deux partenaires peut aussi révéler "un manque d’intimité émotionnelle", dans une relation où le sexe est déconnecté des émotions et de la dimension affective, par exemple : "on couche avec quelqu’un sans l’aimer. Alors que chez beaucoup, le sexe et l’amour ont besoin d’être corrélés".

Dysphorie post sexe : des changements hormonaux

Après l’orgasme, on observe des variations hormonales, telle qu’une baisse de l’endorphine à laquelle s’ajoute une augmentation de la prolactine chez les hommes. Cette hormone qui inhibe le désir sexuel après l’orgasme (expliquant la période réfractaire) peut amener dans certains cas une "fatigabilité, une forme de détachement émotionnel ou de tristesse" chez les concernés.

Dysphorie post-coïtale : comment réagir ?

L’angoisse ou la tristesse qui surgissent après le sexe peuvent déconcerter. Echanger avec celui ou celle en proie à ce coup de blues après le sexe constitue une première étape pour essayer de comprendre ce qu’il/elle ressent, de tenter de désamorcer les éventuelles incompréhensions et d’aborder certains éventuels sujets sous-jacents à cette mélancolie. "Essayer de reconnaître ses besoins par rapport à sa sexualité ou à ses propres désirs peut également apporter des pistes de compréhension face à cette tristesse", suggère encore Sebastien Garnero.

Mais l’autoanalyse a des limites. Si la dysphorie post sexe est fréquente, il peut être utile de se faire aider par un professionnel formé (médecin sexologue ou psychologue sexothérapeute) dans le cadre, par exemple, d’une thérapie individuelle ou de couple.

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