En juillet dernier, l’Agence européenne des médicaments (EMA) avait refusé la mise sur le marché européen du lecanemab, développé conjointement par des entreprises américaine et japonaise commercialisé sous le nom de Leqembi®, une nouvelle biothérapie innovante dans le traitement de la maladie d’Alzheimer, provoquant l’incompréhension des associations de malades. D'autant plus que le médicament est déjà autorisé aux Etats-Uni s et au Japon depuis l’année dernière et qu’il l'a été plus récemment au Royaume-Uni, en Israël, en Chine ou en Corée du Sud.
Les résultats d’étude montrent une baisse de 27% du déclin cognitif chez les patients qui ont suivi ce traitement par rapport au groupe sous placebo.
L’EMA revoit aujourd’hui sa copie et vient d’autoriser sa mise sur le marché, en limitant toutefois sa prescription aux “troubles cognitifs légers (problèmes de mémoire et de réflexion) ou de démence légère due à la maladie d'Alzheimer (maladie d'Alzheimer au stade précoce)” et “chez des patients qui n'ont qu'une seule copie du gène ApoE4 – un facteur de risque de la maladie - ou qui n'en ont aucune”. Or, ce gène augmente nettement le risque de développer la maladie, jusqu’à le doubler chez certaines personnes.
L’EMA entend ainsi contrôler les effets indésirables parfois graves de ce médicaments, en ciblant les personnes les moins susceptibles d’en souffrir. Le médicament devrait être disponible pour les patients français d’ici quelques mois. Il sera administré par perfusion sous surveillance médicale, des IRM de contrôle seront programmées pour surveiller d’éventuels effets indésirables.
Leqembi® : une efficacité jusqu’ici inégalée !
La fondation Recherche Alzheimer s’enthousiasme : les résultats détaillés fin 2022 dans la revue scientifique New England Journal of Medicine montrent “une baisse de 27% du déclin cognitif chez les patients qui ont suivi ce traitement par rapport au groupe sous placebo. C’est la première fois qu’un anticorps anti-amyloïde prouve ainsi son efficacité !”
De fait, cette molécule (un anticorps monoclonal, autrement dit un type de protéines) a un mode d’action jusque-là inédit puisqu'elle est capable de réduire puis d’éliminer les plaques amyloïdes, responsables de la maladie d’Alzheimer. “Ces plaques se déposent entre les cellules nerveuses situées dans la substance grise du cortex cérébral, provoquant un dysfonctionnement des connexions entre les neurones”, précise la Fondation Recherche Alzheimer.
Des effets secondaires liés au mode d’action du médicament
Ce mode d’action a toutefois un défaut : il peut être responsable de saignements dans le cerveau, autrement dit d'hémorragie cérébrale.
Interrogé par la Fondation Recherche Médicale en septembre dernier, le professeur David Wallon, neurologue et directeur du Centre Mémoire, de Ressource et de Recherche au CHU de Rouen explique que cet effet indésirable grave est lié à “une réaction inflammatoire au niveau cérébral. Ce qui va fragiliser la paroi des vaisseaux et provoquer, le plus souvent, des micro-saignements. Parfois, lorsque c'est plus grave, des hématomes.”
Ces risques concernent plus particulièrement les personnes atteintes de la mutation gène ApoE4 et celles dont la maladie est avancée.
Alzheimer : quels médicaments sont disponibles aujourd’hui ?
Même si les effets secondaires du Leqembi® sont documentés, cette molécule représente un tel progrès dans l’arsenal thérapeutique actuellement à disposition des médecins qu’elle va très certainement révolutionner la prise en charge.
Car il n’existe aujourd’hui aucun médicament capable de prévenir, de ralentir l’évolution et encore moins de guérir la maladie d'Alzheimer, contrairement à cette nouvelle molécule.
“A l'heure actuelle, on est toujours bloqués depuis 25 ans, avec une stratégie thérapeutique qui existe depuis longtemps”, indique encore le Pr Wallon.
Les quatre traitement disponibles aujourd’hui sont les suivants :
- Donépézil (Aricept)
- Rivastigmine (Exelon)
- Galantamine (Reminyl)
- Mémantine (Ebixa)
Ils améliorent les symptômes mais ne freinent pas la progression des plaques d'amyloïdes.
Bientôt d’autres immunothérapies dans le traitement d’Alzheimer ?
D’autres immunothérapies sont actuellement en développement et l’on peut espérer que d’ici quelques mois, de nouveaux médicaments capables de freiner voire de faire régresser la maladie d’Alzheimer vont obtenir leurs autorisations de mise sur le marché (AMM, obligatoire pour que le traitement soit distribué, et éventuellement remboursé, en France).
La Fondation Recherche Alzheimer met par exemple beaucoup d'espoir dans le donanemab (Kisunla®), développé par le laboratoire Eli-Lilly. “Le donanemab appartient lui aussi à cette nouvelle catégorie de traitements contre Alzheimer, basés sur l’immunothérapie, processus qui mobilise directement les cellules immunitaires pour agir sur les plaques amyloïdes. Les résultats de la phase III, publiés en août 2023 ont confirmé les espoirs suscités par la phase II. Un ralentissement du déclin de 35% a été observé chez les patients traités par rapport au groupe sous placebo.”
Les Etats-Unis, le Japon et la Grande-Bretagne ont déjà approuvé sa mise sur le marché.
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