Les relations entre la consommation de produits laitiers et le risque de cancer sont compliqués à déterminer. Alors que le Programme National de Nutrition Santé (PNNS) recommande d’en consommer deux chaque jour en les alternant, certaines études nous mettent en garde.
Tels que définis par le PNNS, les produits laitiers regroupent le lait et les boissons à base de lait, les yaourts, les petits suisses, les fromages blancs et les fromages (frais, affinés…). Une portion de produits laitiers correspond à 150 mL de lait ou 125 g de yaourt ou 30 g de fromage. À noter que les boissons à base de plantes, improprement appelées laits végétaux, ne sont pas des produits laitiers.
Certes, les produits laitiers sont les principales sources de calcium de notre alimentation, un minéral essentiel à l’entretien du capital osseux. Ces derniers sont même associés à la prévention du cancer colorectal. Or, selon plusieurs études, dont notamment une parue au sein du Journal of the American Osteopathic Association, certains produits laitiers pourraient favoriser le cancer de la prostate. Et si l’on se penche sur les fromages, on ne peut faire l’impasse sur leur teneur en sel et en matières grasses. Ils ne sont donc pas à consommer sans modération et peuvent avoir une incidence sur vos risques de cancer.
On dresse la liste des fromages potentiellement cancérigènes au sein de notre diaporama et on les décrypte avec Julien Carretier, Docteur et chercheur en Santé Publique au Département Prévention Cancer Environnement du Centre Léon Bérard. Attention néanmoins, le lien entre fromages et cancer s’avère complexe et un grand nombre d'hypothèses restent à confirmer. Ces recherches scientifiques sont donc à prendre avec prudence.
Le poids, l'activité physique et l'alimentation peuvent influencer le risque pour environ 30% de tous les cancers
"S'il est logique de penser que les substances cancérigènes présentes dans les aliments sont responsables de l'apparition des cancers, cela n'est vrai qu'en partie, tempère la Fondation contre le cancer. Un cancer est le résultat de diverses modifications à l’échelle d’une cellule, certaines liées à notre mode de vie, d’autres dépendant de prédispositions génétiques".
"Parmi les facteurs liés au mode de vie notons que le tabac arrive en tête avec 20% des cancers attribuables, puis l’alcool avec 8%, et l’alimentation déséquilibrée ainsi que le surpoids et l’obésité avec 5,4% chacun", nous rappelle Julien Carretier.
Traduction : l'alimentation n'est que l'un des facteurs déterminants dans l'apparition de la maladie. Nous sommes en mesure d’affirmer aujourd’hui que le poids, l'activité physique et l'alimentation peuvent influencer le risque pour environ 30% de tous les cancers.
Cancer : certains aliments sont à consommer avec modération
Une consommation régulière de certains aliments peut augmenter le risque de développement de ces cancers. "Il est par exemple prouvé que la consommation d’alcool augmente le risque de développement des cancers de la bouche, du pharynx et du larynx, de l’œsophage, de l’estomac, du foie, du sein (femmes) et du gros intestin...", note la Fondation contre le Cancer.
En limitant ces aliments, on peut espérer une réduction du risque de développer un cancer. Mais cela ne signifie pas que vous échapperez au cancer de manière certaine. Le développement d’un cancer est en effet lié à de nombreux autres facteurs.
Parmi les aliments classés comme cancérigènes ou potentiellement cancérigènes, on retrouve notamment :
- Les viandes rouges (qui regroupent le bœuf, le porc, le veau, l’agneau, le cheval et le mouton) ;
- La charcuterie (ou viande transformée) ;
- Les compléments alimentaires / suppléments de bêta-carotène
- Les aliments ultra-transformés (plats préparés, gâteau apéritifs, conserves de légumes, légumes industriels, barres chocolatées, sodas et boissons sucrées…) ;
- Le sel ;
- Les boissons chaudes.
Faites défiler notre diaporama et découvrez quels fromages sont susceptibles de jouer un rôle dans la survenue de cancers.
Le camembert : il pourrait favoriser le cancer de la prostate
Les fromages affinés comme le camembert, s’ils sont consommés en trop grandes quantités, peuvent devenir néfastes pour les personnes de plus de 50 ans, en augmentant les risques de cancer de la prostate. La forte teneur en graisses animales saturées, présentes dans les fromages gras, serait en partie responsable.
"Consommer deux produits laitiers par jour protégerait du cancer colorectal, aurait un effet neutre sur celui du sein mais favoriserait celui de la prostate", expliquait le Dr Hanène Boudabous, oncologue, interviewé par Medisite en février 2020. En cause ? L'industrialisation et le traitement de ces produits.
"Le lait et les produits laitiers sont liés à un risque accru de cancer de la prostate en raison de l'hormone IGF-I, qui deviendrait néfaste si elle est présente en trop grande quantité dans notre organisme", ont démontré des chercheurs de la Mayo Clinic, qui ont passé en revue 47 études publiées entre 2006 et 2017, auprès de plus d'un million de participants.
Ces derniers ont constaté que les produits laitiers constituent la principale source de calcium dans les pays occidentaux, où les taux de cancer de la prostate sont élevés. À l'inverse, les taux de cancer de la prostate sont plus faibles dans les pays asiatiques, où la consommation de produits laitiers est réduite.
Un niveau de preuve limité
"Dans les rapports de l’INCa (Institut National du Cancer. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données. Boulogne-Billancourt : INCa ; 2015) et du WCRF/AICR (World Cancer Research Fund / American Institute for Cancer Research. Food, Nutrition, Physical Activity, and the Prevention of Cancer: a Global Perspective. Washington DC: AICR, 2018), une consommation élevée de produits laitiers (supérieure à 2 produits laitiers/jour) était associée à une augmentation du risque du cancer de la prostate, avec un niveau de preuve limité, tempère Julien Carretier. Un des mécanismes évoqués serait qu’une consommation élevée de lait augmenterait le taux sanguin d’IGF-1 (Insulin-like Growth factor 1), qui a été associé à un risque accru de cancer de la prostate. Ce niveau de preuve limité ne remet donc pas en cause la recommandation concernant les produits laitiers, identique pour les hommes et les femmes".
Roquefort : il fait partie des fromages les plus gras
Les pourcentages de matière grasse des fromages à pâte dure oscillent entre 20 et 30 % de matière grasse. Ils fournissent en moyenne 350 calories pour 100 grammes. On note le roquefort, mais aussi le Beaufort, le gouda ou encore le cheddar.
"Jusqu’ici, les études n’ont pas clairement démontré que des types particuliers de gras augmentent le risque de cancer. Chose certaine, une alimentation riche en matières grasses peut entraîner un excédent de poids et on sait que l’embonpoint est un facteur de risque de cancer – d’où l’importance de limiter notre apport en matières grasses", souligne la Société Canadienne du Cancer.
En outre, tout comme le camembert, le roquefort fait partie des fromages affinés. Consommé en trop grande quantité, il peut donc avoir une incidence sur vos risques de développer un cancer de la prostate.
Bleu, cantal et parmesan : attention au cancer de l’estomac !
"La consommation de sel et d’aliments salés augmente probablement le risque de cancer de l’estomac. Une forte concentration en sel agit comme une substance mordante et attaque la muqueuse stomacale, rapporte de son côté la Fondation contre le Cancer. Ajoutons que les aliments très salés restent plus longtemps dans l'estomac, ce qui en prolonge l’exposition. La paroi de l’estomac devient aussi plus vulnérable aux autres substances cancérigènes éventuellement présentes dans l'alimentation, comme par exemple les sels nitrés utilisés comme conservateurs dans les charcuteries".
Certains fromages pourraient ainsi favoriser ce phénomène. Il s’agit de ceux qui s’avèrent les plus riches en sel. On retrouve parmi eux le parmesan, le cantal, le bleu, la feta, le maroilles, le roquefort ou encore le gorgonzola.
Mozzarella et burrata : elles pourraient jouer un rôle dans la survenue du cancer du sein
La mozzarella, ou mozzarelle, est un fromage à pâte filée d'origine italienne à base de lait de vache ou de bufflonne. Quant à la burrata, si traditionnellement, ce fromage garni de crème était fait à base de lait de bufflonne, on la retrouve souvent en grande distribution, à base de lait de vache.
L’année dernière, certains médecins ont déclaré que le fromage fabriqué à partir de lait de vache pourrait contenir des hormones de reproduction et de croissance qui augmenterait le risque de cancer du sein.
Le fromage au lait de vache est susceptible de provenir de vaches traitées aux hormones, qui peuvent se retrouver dans le lait, et les recherches ont montré que certaines de ces hormones, telles que l'IGF-1, seraient liées à un risque accru de cancer du sein.
Fin 2019, un groupe de médecins avait demandé à la FDA (Food and Drug Administration) d’ajouter une étiquette sur ces fromages, afin d'avertir les consommateurs qu’il contient des hormones susceptibles d’accroître le risque de cancer du sein.
On ajoute aussi que la burrata fait partie des fromages relativement gras (24 % de matière grasse). Elle est donc à consommer avec modération.
Cancer : quels fromages privilégier ?
De manière générale, les produits laitiers sont bénéfiques pour la santé. La consommation quotidienne de ces produits est associée à la prévention du cancer colorectal. Le Programme national nutrition santé (PNNS) recommande aujourd’hui de consommer deux produits laitiers par jour, en les alternant (lait, fromage, yaourt nature, fromage blanc).
On privilégie les fromages blancs et fromages frais qui aident à prévenir le cancer colorectal, selon l'Institut national du Cancer, car "outre son effet bénéfique direct sur la réduction de la prolifération des cellules cancéreuses dans le côlon et le rectum, le calcium a également des effets indirects sur la protection de la paroi intestinale".
"Un rapport récent du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a estimé qu’en France, chez les personnes de 30 ans et plus, environ 850 cas de cancer du côlon-rectum sur les 346 000 nouveaux cas de l’année 2015 étaient attribuables à une faible consommation de produits laitiers (< 2 portions/jour), nous rapporte Julien Carretier.
On se limite néanmoins à deux portions par jours. Si les produits laitiers peuvent avoir une chance de prévenir le cancer colorectal, certains peuvent favoriser le cancer de la prostate, en raison de l'hormone IGF-I, qui deviendrait néfaste si elle est présente en trop grande quantité dans notre organisme.
"Il est recommandé de varier les types de fromage. La crème fraîche et le beurre ne sont pas comptés dans les produits laitiers, indique encore notre expert. Ils sont issus du lait mais ils sont très riches en graisses et pauvres en calcium et en protéines. Les desserts lactés (crèmes desserts, flans…) ne sont pas non plus considérés comme des produits laitiers. Ils contiennent en général trop peu de lait et sont souvent très sucrés. À noter aussi que pour les enfants, les adolescents et les personnes âgées, c’est 3 ou 4 produits laitiers par jour qu’il est recommandé de consommer"
Merci à Julien Carretier, Docteur et chercheur en Santé Publique au Département Prévention Cancer Environnement du Centre Léon Bérard
La vérité à propos des matières grasses, Société Canadienne du Cancer
LES PRODUITS LAITIERS, Institut National du Cancer, décembre 2019
Sel et cancer, Fondation contre le cancer
Some doctors say women should avoid cheese due to its link to breast cancer, Insider, 14 octobre 2019
Les produits laitiers, Manger bouger
Effect of Plant- and Animal-Based Foods on Prostate Cancer Risk, Journal of the American Osteopathic Association, novembre 2019
Les cancers attribuables au mode de vie et à l’environnement en France métropolitaine. Lyon: International Agency for Research on Cancer, 2018.)
Repères alimentaires pour les populations spécifiques. Enfants, femmes enceintes & allaitantes, personnes âgées. Expertise Anses 2019
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