Accro aux jeux, que faire ?
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De plus en plus de joueurs

Le jeu, voilà un domaine épargné par la crise ! "100% des gagnants ont tenté leur chance", le slogan (plus que cynique !) de la Française des Jeux a fait des ravages : pas moins de 30 millions de Français se laissent séduire en jouant au moins une fois dans l'année à un jeu de hasard et d'argent.

En 7 ans, de 1999 à 2006, les mises engagées par les joueurs ont explosé : + 77 % pour la Française des Jeux, + 91 % pour le PMU et + 75 % pour les casinos !
Résultat : le chiffre d'affaires de l'industrie du jeu est passé de 60 millions en 1960 à 37 milliards d'euros en 2006. De quoi faire rêver !

De plus en plus de jeux

Depuis 2000, c'est devenu le délire : Internet, téléphone portable et TV interactive ont révolutionné nos façons de jouer.

Désormais, inutile d'attendre impatiemment que le bar-tabac-PMU ou que le casino ouvrent leurs portes. Le jeu est dans les chaumières, comme le loup dans la bergerie !

A n'importe quel moment du jour ou de la nuit, il suffit de se connecter ou de tapoter sur son clavier de mobile pour miser.

Le lancement de nouveaux jeux (Loto sportif, Euromillions, Rapido, jeux de grattage, Tiercé, Quarté, Quinté, et encore tout récemment du poker en ligne) a fait exploser les mises.

Le jeu occupe désormais une part croissante de nos loisirs : 1 % de notre budget y passe en moyenne, soit 130 € par an, autant que pour l'achat de livres ou de disques !

Comportement compulsif

"Cette multiplication de l'offre et l'accès de plus en plus facile et immédiat aux jeux incitent à des comportements d'impulsivité", analyse le Dr Philippe Cléry-Melin, psychiatre directeur d'un groupe de cliniques psychiatriques.

"Seul chez soi, sur la Toile, on peut satisfaire un certain nombre de pulsions qu'il serait inenvisageable de concrétiser dans le monde réel. Avant, le joueur de Tiercé devait se rendre à l'hippodrome ou au PMU pour jouer, c'était une détente, un moment de convivialité. Maintenant, il se connecte, dès que l'envie l'en prend, parfois au beau milieu de la nuit. La réalisation rapide des pulsions, sans prendre de distance, sans place pour le rêve ou la réflexion, favorise l'émergence de comportements compulsifs d'addiction".

L'addiction au jeu

Cette nouvelle frénésie de jeux peut assez vite déraper, surtout chez les personnes les plus fragiles psychologiquement. On parle même "d'addiction comportementale", c'est-à-dire sans substance (alcool ou drogues).

Elle vient rejoindre d'autres addictions émergentes comme la cyberaddiction (jeux vidéo, addiction aux "tchats" ou aux sites X sur Internet) ou l'achat compulsif.

La prévalence du jeu problématique et du jeu pathologique est estimée à 1 à 2 % de la population générale. Soit entre 600 000 et 1,2 million de joueurs qui se contrôlent difficilement, voire plus du tout !

L'affaire est devenue suffisamment sérieuse pour que le ministère de la Santé s'en inquiète : le jeu problématique fait désormais partie de son plan 2007-2011 de prise en charge et de prévention des addictions.

Le profil psy du joueur

"Au début, le joueur va connaître une phase de gain. Au lieu de réagir de façon lucide et de l'attribuer au hasard ou à la chance, il le met sur le compte de son habilité. Il développe alors un sentiment de toute-puissance qui l'incite à continuer tout en augmentant les mises", analyse le psychiatre.

Mégalo, le joueur problématique se sert de superstitions, de rituels "magiques", de calculs savants pour déjouer l'aléatoire, pensant pouvoir tout contrôler.
S'il perd, il est incité à continuer les paris pour "se refaire". Aux frissons et à l'excitation du début succède alors l'enfer du jeu. Une réelle obsession qui envahit toute la vie psychique.

"C'est excitant, de l'argent gagné aussi facilement. J'aurais tout fait pour retrouver cette extase. J'avais l'impression de troquer ma vie réelle pour du rêve. Mais bien vite ça a été la dégringolade. Je ne me contrôlais plus. Tout mon temps libre et tout mon argent passait dans les machines à sous", reconnaît Sylvie, une ancienne accro.

Machine à sous et Rapido

Les spécialistes sont unanimes : il existe des jeux plus "addictogènes" que d'autres.
Ce sont ceux qui font monter très fortement la pression en raison d'un délai très court entre la mise et le résultat et qui permettent de retenter sa chance de façon quasi-immédiate.

C'est typiquement le cas des machines à sous et, plus encore, du Rapido.
La frénésie sur ce jeu est devenue telle que la Française des Jeux s'en est elle-même préoccupée : elle a rédigé une "charte éthique" pour promouvoir le "Jeu responsable" et pris des mesures de modération. Désormais, la mise maximale pour le Rapido est passée de 4 000 à 1 000 € (tout de même !) et le nombre de tirages auquel donne droit un bulletin a été ramené de 100 à 50.

Drogués du jeu

Les "addicts" ou drogués du jeu ont beaucoup de mal à se reconnaître "accro" et encore moins malades !

Ils ne demandent donc pas à être soignés et continuent à jouer de façon débridée. Jusqu'à, pour certains, perdre toute notion de réalité, y laisser tout leur salaire, s'endetter, et plonger même parfois dans l'illégalité (détournements de fonds...) ou la dépression.

L'addiction aux jeux peut avoir de graves répercussions familiales (divorce) ou sociales (perte d'emploi, désinsertion...).

Cela peut durer des années avant que le flambeur finisse par admettre le besoin de prise en charge.

Parfois, l'entourage, souvent le conjoint, craque et tire la sonnette d'alarme. Mais ce n'est pas toujours facile en raison d'un fort sentiment de culpabilité et de honte...

Les traitements

Les traitements reposent sur des psychothérapies cognitivo-comportementales.

Très concrètes, elles consistent à travailler avec le patient sur les situations qui l'amènent à jouer afin qu'il en prenne conscience et développe du recul.

"On met également l'accent sur les croyances irrationnelles, notamment celles qui incitent à penser pouvoir déjouer le hasard par ses compétences propres. Les joueurs pathologiques oublient leurs pertes pour ne se souvenir que de leurs gains. Toute une partie de la prise en charge consiste à renvoyer le patient à la réalité", poursuit le Dr Cléry-Melin.

Parallèlement, les psychiatres peuvent être amenés à donner des psychotropes lorsqu'il y a des pathologies associées, comme l'anxiété ou la dépression, voire les tendances suicidaires.

Les "Joueurs Anonymes"

Des groupes de parole comme il en existe pour les alcooliques se mettent également en place.

Sur le modèle des Alcooliques Anonymes, l'association "Joueurs Anonymes" s'est lancée depuis peu dans les pays francophones. Encore embryonnaire, ce mouvement devrait être amené à se développer, à l'image des Etats-Unis où les Gamblers Anonymous existent depuis 1957.

Dans ces groupes, on s'entraide, on discute, on se socialise à travers le bénévolat. Tout cela dans une ambiance d'abstinence, avec un programme en douze étapes pour y arriver.

Il est tout à fait possible d'associer thérapie comportementale et participation aux Joueurs Anonymes pour se "refaire".

Cette fois définitivement et pour de vrai...

'Plus' d'infos !

"Jeux de hasard et d'argent, contextes et addictions", Inserm

Le site de l'association SOS Joueurs qui vient en aide aux joueurs compulsifs et à leurs familles.

Tél. 0 810 600 115 (prix d'un appel local)

Le site du Centre de prévention du jeu excessif en Suisse

N° gratuit 0 800 801 381

Le site officiel des Joueurs Anonymes pour la France, la Suisse et la Belgique.

mots-clés : Tendances, divorce
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