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L’arrêt de toutes les fonctions n’est pas immédiat après un décès. La durée du processus varie de quelques secondes à plusieurs heures. "Dans le sens commun, la mort arrive quand le cœur arrête de battre", nous faisait comprendre le Dr Michel Sapanet, médecin légiste, au cours d’une précédente interview. Or, il faut savoir que si le cœur cesse de fonctionner, ce n’est pas le cas de tous les organes.

Le prélèvement de certains organes se réalise d’ailleurs avant la mort totale. En effet, une fois la circulation sanguine interrompue, lors de la mort naturelle par arrêt cardiaque, les organes ne sont plus irrigués et l'activité de leurs cellules va cesser progressivement. Si l'arrêt cardiaque entraîne petit à petit l’arrêt des autres organes, le décès n'est pas un phénomène instantané : tous les organes ne meurent pas en même temps. C'est ce qui permet de greffer des organes alors que le donneur est décédé.

En outre, il faut savoir qu'à l’inverse, la mort des fonctions cérébrales peut être constatée alors que le cœur bat toujours.

Mort cérébrale : le cœur et les poumons peuvent continuer de fonctionner plusieurs jours

Si pour la plupart des gens, la mort survient lorsque le cœur arrête de battre, la réalité peut être toute autre. "Par exemple, en réanimation, la mort du cerveau peut être constatée alors que le cœur et les poumons peuvent continuer de fonctionner plusieurs jours", nous expliquait le Dr Sapanet.

On parle, dans ce cas de figure de mort cérébrale (ou de mort encéphalique). L’activité cérébrale est morte, or le cœur continu de battre. Ce phénomène survient parce que le cœur est un muscle qui dispose de sa propre "pile". Il continuera à battre tant qu'il aura suffisamment d'oxygène pour fonctionner. Ce scénario est possible tant que le patient est branché à une machine qui lui permet de respirer, en clair cette situation n'est plausible que chez un patient qui se trouve en réanimation.

Si le cœur continue de battre, aucun réveil n’est néanmoins possible. Il n'y a donc plus aucune raison d'attendre pour débrancher le patient. On peut le laisser en attendant que la famille vienne, mais c'est "symbolique".

Le cerveau reste actif quelques heures suivant l'arrêt du cœur selon une étude

Une étude américaine publiée en 2014 avait démontré que le cerveau pouvait encore fonctionner après l’arrêt du cœur. Il resterait actif plusieurs heures après. Les scientifiques de l’Université de Médecine Stony Brook de New York étaient arrivés à cette conclusion après avoir examiné des personnes victimes d’arrêts cardiaques, basés en Europe et aux USA.

Certains patients dont le cœur s’était arrêté, ont témoigné d’un état de conscience

Il se trouve que l'activité du cortex cérébral ralentit après l’arrêt cardiaque. Or, les cellules du cerveau pourraient rester actives. Ce processus de fermeture lente du cerveau peut durer des heures. Si le patient se trouve dans un état de mort clinique, il peut toutefois rester "conscient".

Les chercheurs ont fait mention de l’expérience de mort imminente (EMI), qui fascine encore de nombreux scientifiques.

Après avoir pu être réanimés, certains patients dont le cœur s’était arrêté, ont témoigné d’un état de conscience. Certains ont affirmé se souvenir des conversations des soignants et ont décrit en détail ce qui s’était passé dans leur chambre.

Cerveau : des cellules “zombies” se développent après la mort

Comme nous l’avons précisé dans les pages précédentes, certaines cellules du cerveau humain restent actives quelques heures après le décès. Une étude, menée par l'Université de l'Illinois à Chicago et publiée dans la revue Scientific Reports le 23 mars 2021, révèle que certaines d’entre elles augmentent même leurs activités et se développent fortement après la mort de la personne.

Les chercheurs du centre de recherche américain profitaient de chirurgie cérébrale de routine pour récupérer du tissu cérébral frais. L'expression générique (ensemble des processus biochimiques par lesquels l'information héréditaire stockée dans un gène) de ce dernier a été analysée à plusieurs reprises pendant 24 heures. L’équipe a découvert que l'expression des gènes dans certaines cellules augmentait après la mort.

Ces éléments, surnommés "gènes zombies", appartenaient tous à un type de cellule : des cellules inflammatoires, appelées cellules gliales. Les scientifiques ont observé qu'elles se développent et créent de longs appendices en forme de bras pendant de nombreuses heures après la mort. Les changements post-mortem atteignaient leur maximum environ 12 heures après le prélèvement.

“Le fait que les cellules gliales grandissent après la mort n'est pas trop surprenant étant donné qu'elles sont inflammatoires et que leur travail consiste à nettoyer les choses après des lésions cérébrales comme la privation d'oxygène ou un accident vasculaire cérébral", a estimé l’auteur principal de l’article, le Dr Jeffrey Loeb, professeur et responsable de la neurologie et de la réadaptation à l'UIC College of Medicine.

Activité cellulaire post mortem : des répercussions sur les recherches scientifiques ?

Cette découverte soulève un biais dans les travaux scientifiques qui utilisent des tissus cérébraux humains post-mortem pour trouver des traitements et des remèdes potentiels pour des troubles comme l'autisme, la schizophrénie et la maladie d'Alzheimer. En effet, la majorité d’entre elles ne tiennent pas compte de l'expression génétique post-mortem ou de l'activité de ces "gènes zombies".

"La plupart des études supposent que tout dans le cerveau s'arrête lorsque le cœur cesse de battre, mais ce n'est pas le cas", a rappelé l’expert avant de poursuivre "nos résultats ne signifient pas que nous devrions abandonner les programmes de recherche sur les tissus humains. Cela signifie simplement que les chercheurs doivent prendre en compte ces changements génétiques et cellulaires et réduire autant que possible l’intervalle post-mortem pour en réduire l’ampleur des changements". "La bonne nouvelle de nos découvertes est que nous savons maintenant quels gènes et quels types de cellules sont stables, lesquels se dégradent et lesquels augmentent avec le temps, de sorte que les résultats des études post-mortem sur le cerveau peuvent être mieux compris.", a-t-il assuré.

Les ongles et les cheveux, continuent-ils de pousser après la mort ?

C’est visiblement une des plus grandes idées reçues qui concerne la mort. Qui n’a jamais entendu sa grande tante raconter lors d’un dîner que les cheveux et les ongles continuaient de pousser 6 mois après le décès ?

En réalité, ce serait la déshydratation du corps après le décès qui donnerait cette impression.

C’est seulement la peau qui s’est déshydratée

Rapidement après la mort, le corps se déshydrate. Résultat : la cornée qui se dessèche devient trouble. Les doigts et les orteils sont également rapidement touchés par la déshydratation, nous détaillait le Dr Sapanet.

Ce phénomène aura aussi un impact sur les cheveux.

Alors que le corps commence à perdre de l'eau, la peau se rétracte. Cela peut donner l'impression que poils, cheveux et ongles se mettent à pousser. Mais c'est seulement la peau qui s'est déshydratée.

En réalité, les follicules ont besoin d'être approvisionnés par le sang pour faire pousser les cheveux. Or, dès la mort celui-ci s'arrête de circuler. La pousse des cheveux et des poils s'arrête.

Sources

Merci au Dr Michel Sapanet, médecin légiste

AWARE—AWAreness during REsuscitation—A prospective study, Eurpoean Resuscitation Council, 2014

Selective time-dependent changes in activity and cell-specific gene expression in human postmortem brain, Scientific Reports, 23 mars 2021

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