Il s’agit bien évidemment d’un risque potentiel mais certaines molécules présentent un risque de toxicité directe pour l’oreille interne et le nerf auditif. Cette surdité peut être irréversible, concerner une oreille ou bien les deux et survenir de manière brutale ou progressive, disparaître ou non. Bref, cette toxicité dépend généralement de la dose du médicament ingérée, de la durée de l’exposition. Le risque de cet effet indésirable est augmenté lorsqu’il est conjugué avec d’autres facteurs comme l’âge, des problèmes de fonctionnement du rein ou la combinaison avec un autre médicament ototoxique (forme de toxicité spécifique aux structures de l'oreille interne).
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Un verre de jus de grenade aussi efficace que le ViagraPour éviter ce genre de désagrément, il est important que le médecin qui prescrit un médicament "à risque" informe son patient. Ce dernier peut alors être attentif et réactif à l’apparition de tout signe évocateur. D’ailleurs, quels sont ces signes qui doivent nous alarmer ?
Ototoxicité d’un médicament : les signes inquiétants
Certains médicaments peuvent donc provoquer une altération des structures de l’oreille interne. Il peut s’agir d’une atteinte cochléaire (organe de l'audition) ou vestibulaire (organe de l'équilibration) ou du nerf auditif. Concrètement le patient peut ressentir différents symptômes comme des acouphènes (des bourdonnements, des sifflements dans l’oreille), une baisse de l’audition ou des vertiges. Il s’agit des trois signes les plus fréquents en cas d’ototoxicité. Ils peuvent par ailleurs se combiner.
Certains médicaments sont toxiques spécifiquement pour le vestibule (partie centrale du labyrinthe osseux de l'oreille interne). Ils sont suceptibles de provoquer des étourdissements, des acouphènes ou une perte de l’audition.
La toxicité d’un traitement dépend parfois de facteurs individuels. En effet, la préexistence d’une surdité de perception chez un patient le rend plus vulnérable. Une pathologie associée comme une insuffisance rénale ou l’âge du patient peuvent accroître la sensibilité d’un patient à un médicament.
D’autres facteurs, cette fois liés au médicament, sont à même d'augmenter le risque de surdité. La posologie par exemple, mais aussi le mode d’administration, la durée du traitement ou l’association à d’autres traitements ototoxiques peuvent être dangereux pour le patient et sont donc à prendre en compte. Il est à noter qu’un médicament présente plus de risque d’être nocif pour l'ouïe s’il est pris à hautes doses, sur un long temps, par voie intraveineuse ou par un patient insuffisant rénal.
Quels sont les médicaments qui présentent un risque ?
Certains médicaments sont (re)connus pour avoir une toxicité marquée pour l'ouïe qui s’accroît avec la dose absorbée. Les plus connus sont les aminosides (gentamicine, amikacine, netilmicine, tobramycine, néomycine). Il s’agit d’une famille d’antibiotiques généralement prescrits dans le cas d'infections provoquées par les bactéries à Gram négatif (particulièrement Pseudomonas aeruginosa). Le Dr Yoann Pons, ORL, explique "c’est le principal médicament pourvoyeur d’otoxicité dans la pratique courante".
Cela dit, il existe d’autres médicaments qui peuvent être mis en cause. Notamment :
- D'autres antibiotiques : les macrolides (érythromycine). Le médecin précise cependant : "c’est très théorique et finalement pas observé en pratique".
- Interféron, souches vivantes atténuées du vaccin ROR (mais le risque faible comparé à celui de l’infection naturelle),
- Quinine (paludisme et crampes) et chloroquine.
- Certains anticancéreux : cisplatine, carboplatine, vinblastine, vincristine, thalidomide, bortézomib.
Cette liste n’est bien sûr pas exhaustive. Il s’agit des médicaments qui sont le plus souvent ototoxiques. Par exemple, de nombreuses gouttes auriculaires peuvent contenir des aminosides, des anti-inflammatoires ou des antiseptiques toxiques pour l’oreille. Si ces produits parviennent jusqu’à l’oreille interne, ils peuvent conduire à une surdité irréversible accompagnée de vertiges. C’est pourquoi ils sont contre-indiqués en cas de perforation du tympan.
Il est important pour un médecin, comme pour son patient, de prévenir les différents risques pour éviter d’en arriver à des problèmes d’audition. Notre expert le rappelle : "Une atteinte ototoxique est irréparable, car elle est neurosensorielle. La seule alternative c’est l’appareillage audio prothétique voire l’implantation cochléaire dans les formes les plus graves bilatérales".
Quelques conseils de prévention
Pour éviter d'avoir des troubles de l'audition, il est important pour vous d’être au fait des "risques" associés au traitement prescrit par votre médecin.
C’est à lui de vous prévenir et de vous mettre en garde sur la surdité ou les acouphènes que cela pourrait entraîner.
Parfois certains médicaments problématiques sont en vente libre en pharmacie, il est alors de votre responsabilité de lire attentivement la notice pour en connaître les éventuels effets secondaires. Si un doute persiste, le pharmacien peut vous renseigner.
Pour contrer les problèmes que vous pourriez rencontrer, il est important d’être attentif aux différents signes que votre corps pourrait vous envoyer. Ainsi, si vous savez qu’un médicament est ototoxique et que vous ressentez des vertiges ou une perte d’audition, informez-en votre médecin assez rapidement.
Un examen clinique et des tests auditifs seront réalisés afin de définir la surdité et d’éliminer d’autres causes que la toxicité. Si un lien est envisagé ou mis en évidence, la prescription du traitement ou l’exposition au toxique doit alors être évitée dans la mesure du possible.
Conseils de prévention du Dr Yoann Pons, ORL : "le seul vrai conseil concerne la prévention de l'audition en cas d’utilisation des aminosides, surtout chez l’insuffisant rénal. Le reste c’est du flan… Mais cette situation est surtout rencontrée à l'hôpital et pas en médecine de ville. Dans toute ma carrière, jamais mon service n’a eu à prendre en charge une atteinte otologique iatrogène, mais ototoxicité médicamenteuse en provenance de la médecine de ville…"
Soigner les dommages causés
Si les acouphènes sont survenus après une perte d’audition ou des dommages auditifs, il n’existe malheureusement aucun traitement spécifique. Un médecin peut proposer divers médicaments, mais il ne peut garantir leur efficacité. Cela dépend des cas, des patients et de leur terrain.
Même si la recherche sur les acouphènes est cependant très active, il n’existe aucun traitement pour le moment. Ce trouble ne peut être guéri.
En revanche, différentes techniques peuvent les diminuer. Il existe des petits appareils que l’on appelle des générateurs de sons blancs. Ils ressemblent à un poste de radio portatif et génèrent un bruit capable de couvrir toute une gamme de fréquences.
Merci au docteur Yoann Pons, ORL
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