"En tant qu’ancienne artiste, une de mes patientes tirait le portrait de chacun des animaux qui m'accompagnaient, ce qui lui a permis de demeurer dans sa passion un peu plus longtemps avant que la maladie ne prenne trop de place. Une autre, sortie de son isolement, a décidé de présenter aux autres patients l’animal que j’emmenais à chacune de mes venues", racontent Audrey Desrosiers, zoothérapeute clinicienne au Québec, et Mélissa Snauwaert, assistante en psychologie clinique et zoothérapeute au Canada, dans leur livre Zoothérapie, l’animal, une révolution dans le domaine du soin, paru aux Éditions Guy Trédaniel.
Pour les deux spécialistes, le pouvoir de la zoothérapie dans la prise en charge de la maladie d’Alzheimer n’est plus à démontrer. "La médiation animale auprès des personnes âgées vivant avec ce type de démence est une alliance si naturelle que cela m’étonne qu’en France, ce ne soit pas systématiquement utilisé comme au Québec", déplorent-elles dans leur ouvrage.
Cette thérapie avec l’animal permet une stimulation cognitive indispensable chez les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer. "Comme l’animal vient activer la mémoire émotionnelle, les gens qui perdent lentement la mémoire se rappellent très vivement des souvenirs, car celle-ci n'est pas linéaire", expliquent Audrey Desrosiers et Mélissa Snauwaert.
"On peut faire piocher aux patients dans le sac à dos du chien des mots, des débuts de phrase, et ils doivent les compléter pour en faire un poème que nous lirons ensuite"
Pour maintenir le plus longtemps possible des capacités cognitives stables, des activités de mémoire, des jeux stimulants et des exercices de résolution de problèmes sont proposés. "On peut faire piocher aux patients dans le sac à dos du chien des mots, des débuts de phrase, et ils doivent les compléter pour en faire un poème que nous lirons ensuite", expliquent les thérapeutes.
Dans le cas de la zoothérapie, il n’est pas question d’améliorer le trouble, vu qu’il est dégénératif, mais bien de le maintenir stable le plus longtemps possible. L’animal n’est pas un outil, mais bien un réel partenaire d’intervention. Il a cette capacité de communiquer par son langage corporel et sa manière d’entrer en relation avec les autres.
Les activités possibles avec les animaux lors d’une séance de zoothérapie
Différentes activités peuvent être proposées en fonction de la personne et de son trouble. "Nous pouvons suivre la routine des soins de l’animal, la mise en image par l’équipe soignante, faire la toilette de l’animal. Par sa seule présence, il abaisse l’anxiété des patients."
En zoothérapie, une séance commence avec une musique douce. Ensuite, le thérapeute établit un contact entre l’animal et le patient. "On touche l’animal en respirant lentement en leur demandant à quel degré de confort ils se situent. Le but est d’évaluer leur confort avec l’animal", précisent les thérapeutes. "Nous recommandons de laisser sur place une photo d’eux avec l’animal qui était présent, en réaffirmant la prochaine visite pour les aider à se repérer dans le temps."
Une pratique qui ne date pas d’hier
La zoothérapie existait déjà en 1796 en Angleterre. William Tuke, philanthrope et humaniste, employa pour la première fois de manière scientifique des animaux auprès de personnes souffrant de troubles mentaux afin de les responsabiliser et de travailler leur concentration.
Peu après la Première Guerre mondiale, la présence des chiens est sollicitée dans les hôpitaux. Aujourd'hui, cette pratique est vraiment répandue. Pour donner un exemple, à l’Institut Curie, centre de recherche contre le cancer, un premier chien a été embauché à temps plein, son nom : Snoopy. Il contribue à rassurer les patients, faciliter les consultations et créer du lien.
Cependant, les deux spécialistes en zoothérapie canadienne déplorent le manque de médiation animale en France. "Tous ceux qui possèdent un animal de compagnie peuvent le constater dans leur quotidien : les animaux nous font du bien." La zoothérapie est un travail de collaboration entre l’animal, le patient et le soignant, et ça marche.
D'ailleurs de nombreux EPHAD proposent aujourd'hui ce type d'accompagnement, notamment dans les unités Alzheimer.
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