- 1 - “L’accouchement s’est précipité à 36 semaines de grossesse”
- 2 - Deuil périnatal : “L’équipe médicale a parfois été maladroite”
- 3 - Deuil périnatal : “Nous n’avons reçu aucune aide”
- 4 - Deuil périnatal : “14 ans de notre vie a explosé du jour au lendemain”
- 5 - Perte d’un enfant : “Je ne voulais pas partager mon deuil”
“J’avais 42 ans et ma femme 44 ans quand nous avons su qu’un bébé surprise allait compléter notre famille. Après plusieurs années d’essai bébé, nous avions fait le deuil de cette grossesse. Evidemment, dès le début, ma femme a été très suivi à cause de son âge. Nous avons rapidement su que le bébé était porteur de trisomie 21 et après des examens plus poussés, c’était une forme de trisomie assez rare qui touche 2 à 3% des personnes trisomiques. Notre enfant pourrait devenir autonome, avoir son permis de conduire, travailler… Nous avons donc décidé de garder ce bébé surprise qu’on a surnommé pomme d’amour.”
“L’accouchement s’est précipité à 36 semaines de grossesse”
“Ma femme était enceinte de 36 semaines et deux jours lorsque nous avons été à l’hôpital pour une visite de contrôle classique. Les médecins étaient rassurants, le bébé était légèrement plus petit que la moyenne, mais rien d’étonnant pour un enfant porteur de trisomie 21. En revanche, toutes les autres constantes étaient bonnes. Lors de l’échographie, le gynécologue remarque qu’il y a peu de liquide amniotique et préfère, par mesure de sécurité, garder mon épouse en observation. Le temps que j’aille chercher quelques affaires de rechanges à la maison et l’hôpital m’a appelé pour me prévenir que ma femme était au bloc opératoire pour une césarienne d’urgence car le coeur du bébé ralentissait. Je me souviens m’être imaginé le pire à cet instant et lorsque je suis revenu à l’hôpital, le médecin et l’infirmière m’ont expliqué que le cœur du bébé était trop faible et que l’équipe médicale n’avait pas réussi à le faire repartir… Ce n’était pas possible, cela ne pouvait pas nous arriver ; c’était notre dernière chance d’avoir un bébé. J’ai pu prendre Alix dans mes bras tout de suite et j’ai eu l’impression de rester deux heures entières avec elle contre moi. Elle a également pu être dans les bras de sa maman à son réveil mais ça été très brutal pour elle. J’ai récupéré ma fille et on m’a dirigé dans une chambre à part.”
Deuil périnatal : “L’équipe médicale a parfois été maladroite”
“Je me souviens qu’une infirmière est venue me prévenir qu’elle devait récupérer Alix pour “la mettre au frigo”, j’étais choqué par ces termes, personnellement je mets ma viande au frigo pas mon enfant… J’ai été obligé de me fâcher car la maman d’Alix n’avait pu la voir que 15 minutes, j’ai insisté pour qu’elles soient encore ensemble. Je savais que la maman d’Alix avait besoin de la toucher, de lui parler et de l’embrasser. Les jours qui ont suivi, nous pouvions la voir plusieurs fois par jour mais peu de temps pour éviter que son corps s’abîme. Nous avons fait le choix de refuser l’autopsie car cela nous aurait privé d’instants supplémentaires avec notre bébé. Dix jours après sa naissance, nous avons dit notre dernier au-revoir à notre fille. Voir son prénom mais pas son nom de famille noté dans le livret de famille a été une épreuve supplémentaire. Ce n’était pas un foetus mais un vrai bébé !”
Deuil périnatal : “Nous n’avons reçu aucune aide”
“Seulement un mois et demi après l’accouchement, ma femme a été de nouveau hospitalisée pendant plusieurs jours après une infection du rein. Pendant son séjour, l’équipe médicale lui demandait comment allait son bébé… ça été très compliqué. D’ailleurs, nous n’avons pas été accompagné, on ne nous a pas proposé de voir un psychologue, nous n’avions personne pour nous guider… Je me suis alors plongé dans le travail en faisant des journées de 14 heures. Des amis me prévenaient que ce n’était pas une bonne idée mais je ne les écoutais pas. Comment pouvaient-ils me donner des conseils alors qu’ils ne savaient pas ce que je traversais ? J’ai fini par me couper de tout le monde et même de ma femme. J’ai perdu pied au point de faire des crises d’angoisse et d’avoir des tocs. Ma colère a ressurgi sur ma femme, même si au fond de moi, je savais qu’elle n’y était pour rien…”
Deuil périnatal : “14 ans de notre vie a explosé du jour au lendemain”
“La perte d’un enfant est une épreuve pour le couple. Malheureusement le mien n’a pas survécu à ce drame. Je pense honnêtement que le fait de ne pas avoir été accompagné nous a précipité dans une spirale infernale dans laquelle nous ne pouvions pas nous en sortir. Aujourd’hui, avec le recul, je pense qu’il est essentiel d’avoir un soutien psychologique pour la maman, le papa et le couple. Il faut prendre en compte ces trois éléments pour rétablir le dialogue, se soutenir et s’aider mutuellement. Au début je ne voulais pas me faire aider, je ne m'autorisais pas à craquer, à pleurer. Je me disais qu’il fallait que je sois fort pour ma femme, mes enfants, mes amis…”
Perte d’un enfant : “Je ne voulais pas partager mon deuil”
“La maman d’Alix et moi, nous nous sommes séparés seulement 5 mois après la naissance d’Alix. J’ai décidé de me prendre en main et j’ai fait de l'hypnose pour évacuer ma colère. Puis, j’ai fait de la kinésiologie, cela m’a appris à lâcher prise. J’ai quitté mon travail et déménagé en Suisse pour y faire autre chose. J’ai trouvé un psychologue et j’ai pu évacuer mes émotions. En parallèle, j’ai lancé une chaîne Youtube pour parler du deuil périnatal et une page Facebook pour parler d’Alix car je n’ai rien trouvé sur Internet. Il n’existe que des groupes de paroles de mamanges et même si j’y écris un peu, j’avais besoin de faire entendre ma voix. Et pourtant, au début je ne voulais pas partager mon deuil. Je suis heureux d’avoir pu participer au premier Congrès sur le deuil périnatal pour qu’on entende davantage les papas. Bien sûr il y a les mamans, mais un bébé ça ne se fait pas seule et il ne faut pas oublier les papas.”
“Aujourd’hui, j’arrive à faire de nouveaux projets. Il faut retrouver une vie normale même si elle ne sera pas celle qu’elle aurait pu être. J’ai acheté une peluche en forme de pomme d’amour (surnom donné à Alix). Depuis, je l'emmène avec moi quand je fais certaines choses pour que ma fille soit auprès de moi. Je reste persuadé qu’elle n’est pas loin et qu’elle me donne la force de continuer et de me lever tous les matins. J’espère qu’elle est fière de son papa.”
Merci à Sébastien pour son témoignage et à Linda Conchaudron pour l'organisation du premier congrès international du deuil périnatal et de la fertilité
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