Deuil périnatal : comment le surmonter et gérer le post-partum ?Adobe Stock
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C’est un sujet tabou et une douleur que les femmes vivent souvent seules. La mort d’un nourrisson ou d’un fœtus in utero est un drame dont on parle trop peu. Selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on parle de deuil périnatal lorsque des parents perdent leur bébé entre 22 semaines d’aménorrhée et le 7e jour après sa naissance. Aurélie Marenne, sage-femme ayant travaillé en bloc accouchement dans un maternal intensive care de l’hôpital de la Citadelle à Liège, en Belgique, a souvent été confrontée à ce type d’accouchement d’un bébé mort-né.

Deuil périnatal : comment se passent les accouchements ?

"Dans l’hôpital où je travaillais il y avait une cellule du deuil périnatal qui intervenait différemment selon qu’il s’agissait d’une interruption médicale de grossesse programmée ou d’un décès survenu inopinément lors d’un accouchement. Dans le dernier cas, il y avait des psychologues qui intervenaient ainsi que des gynécologues et des sages-femmes préparés à gérer des grossesses à risque et des décès in utero", confie la sage-femme à Medisite. Même si le bébé est décédé in-utero ou à la naissance, les mères sont toujours décisionnaires dans le cadre de leur accouchement et conservent une sorte de projet de naissance.

"Dans le cadre d’accouchements déclenchés, les souhaits des parents vont toujours être respectés", explique Aurélie Marenne. Elle précise notamment que dans le cas d’accouchement d’enfants décédé in-utero, on place la péridurale le plus rapidement possible pour éviter d’ajouter de la douleur physique à celle psychologique de la maman dans cet accouchement très compliqué. "Autant gérer la douleur pour un bébé vivant est difficile mais acceptable, autant pour un bébé décédé c’est compliqué", explique Aurélie Marenne.

Accouchement : peau à peau, empreintes… Une prise en charge particulière

On va lui proposer de mettre le bébé en peau à peau et de conserver le bébé un peu sur elle pour que les mamans aient le temps de leur dire au revoir

Aurélie Marenne, sage-femme.

"Le terme du bébé va conditionner la façon dont la maman va accoucher. S’il s’agit d’une femme qui est en fin de grossesse ou à terme, il s’agit d ’un accouchement classique où elle va devoir pousser et accompagner son bébé et si elle le souhaite on va lui proposer de mettre le bébé en peau à peau et de conserver le bébé un peu sur elle", détaille la sage-femme. Un process important pour que les mamans aient "le temps de leur dire au revoir". La sage-femme propose également la possibilité de faire des empreintes du nouveau-né. Elle s’occupe également du bébé comme s’il s’’agissait d’un nourisson viable. "On va le peser et faire les petits soins nécessaires, notamment des soins spécifiques de recherche de diagnostic suite à ce décès”, confie Aurélie Marenne.

La sage-femme explique qu’elle "habille les nouveaux-nés avec les habits proposés par les parents et peut faire des photos" de leur enfant. Tout cela sera remis aux parents et si les parents ne souhaitent pas les voir car c’est trop difficile, on leur remet malgré tout sous enveloppe "pour qu’ils aient chacun une trace de ce bébé et ils l’ouvriront au moment qu’ils jugeront opportun". "Les parents ont toujours le choix de donner un prénom à l’enfant", explique-t-elle.

Un bébé n’est déclarable qu’à partir de 22 semaines de grossesse. À partir de cette durée, les parents bénéficient de tous les droits liés à la naissance d’un bébé comme la prime de naissance, le congé maternité pour la maman et paternité pour le père. Le bébé aura également droit à des funérailles et la possibilité d’avoir un prénom et un nom. En dessous de 22 semaines, le bébé n’a pas d'existence légale et n'est pas "déclarable", même si les parents peuvent toujours leur donner un nom.

Suite de couches : quel accompagnement à la maison ?

Le deuil périnatal est propre à chaque parent. "Il y a des mamans qui ne veulent pas en parler, d’autres qui évoquent leurs trois enfants, en précisant que l’un d’entre eux est décédé, peu importe le terme", explique Aurélie Marenne. Concernant la gestion du post-partum, l’accompagnement des mamans ayant perdu un bébé est primordial. "Ça m’est arrivé d’accompagner des mamans dans le retour à la maison parce que quand c’est un accouchement à terme elles ont parfois des déchirures, des soins et il faut s’en occuper et ne pas les laisser seules", détaille Aurélie Marenne. "On continue à voir les patientes en post-partum à la maison même si parfois les femmes ne reprennent pas forcément contact car ça les ramène trop à cet accouchement et à la grossesse et elles préfèrent changer de sage-femme ou de gynéco", explique la sage-femme.

Accompagner les mamans de bébés morts-nés est parfois compliqué psychologiquement pour les sages-femmes. "Ça fait partie de notre travail de les accompagner comme les autres mamans. Malheureusement dans les écoles de sages-femmes c’est un sujet qui n’est pas assez abordé et qui s’apprend sur le tas. Moi c’était compliqué au moment où j’étais enceinte ou jeune maman car on transpose et s’identifie. Notre travail reste d’être très empathique et de les accompagner”, confie Aurélie Marenne. Pour elle, il est important de "préparer ces femmes à l’après".

Deuil périnatal : travail, sport… Certaines mamans veulent "oublier"

Il y a des mamans qui se replongent très vite dans le travail pour oublier et font beaucoup de sport pour retrouver leur corps d’avant-grossesse et effacer les traces de cette grossesse

Quand on rentre de l’hôpital avec un corps post-partum mais pas de bébé, les réactions des mamans sont parfois très différentes pour gérer la douleur. "Il y a des mamans qui se replongent très vite dans le travail pour oublier et font beaucoup de sport pour retrouver leur corps d’avant-grossesse et effacer les traces de cette grossesse", confie la sage-femme. Selon elle, "elles en parlent rarement car c’est un sujet tabou dans la société et qu’elles ne savent pas toujours à qui se confier".

Sources

 Aurélie Marenne, sage-femme libérale ayant travaillé en soins maternels intensifs (maternal intensive care) à l'hôpital de la Citadelle à Liège. 

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