Les femmes vieillissent seules...
"Les femmes vieillissent seules, les hommes vieillissent à deux. Un bilan européen". Le titre du bulletin d'information de l'Institut national d'études démographiques a de quoi attirer l'attention. Il s'appuie sur le projet "Felicie", initié dans le cadre des recherches européennes sur la qualité de la vie. L'acronyme de Future Elderly Living Conditions In Europe (l'avenir des conditions de vie des personnes âgées en Europe) a pourtant une sonorité un brin optimiste.
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Tout le monde il est beau...Qui prendra soin des aînés demain en cas de dépendance et quels seront leurs besoins ? La commission européenne s'interroge. Avant d'envisager les conditions de vie des plus de soixante-quinze ans dans les vingt-cinq ans à venir, le programme de recherches Felicie présente, d'ores et déjà, une photographie démographique de la situation actuelle, dans neuf pays choisis comme représentatifs :
- Finlande,
- Pays-Bas,
- Allemagne,
- Belgique,
- Royaume-Uni,
- France,
- Italie,
- Portugal,
- République Tchèque.
Dix équipes de ces pays travaillent ensemble sur l'évolution de la population et confrontent les points de vue sur différents thèmes, l'état matrimonial, la santé, l'économie, etc.
"Nous travaillons sur des données existantes comme celles des recensements. Il y a en quantité qui dorment !", indique Joëlle Gaymu, chercheur pour l'Ined et coordinatrice de Felicie. Sur son bureau, l'aspect prospectif se traduit en autant de graphiques, courbes, statistiques, histogrammes et pyramides des âges qui s'empilent et attendent d'être analysés au peigne fin. La matière ne manque pas. S'il n'y a pas effectivement de grosses surprises : "Quelques différences entre les pays du Nord et ceux du Sud sont déjà à noter", précise la démographe.
Différences Nord-Sud
La variété des situations est, bien sûr, liée aux modèles familiaux, à l'Histoire et aux cultures qui diffèrent déjà d'un pays à l'autre. Aux politiques du vieillissement, également. Ainsi, le Portugal est caractérisé par une forte dominante familiale, quand les pays du Nord ont davantage développé les services à domiciles et les institutions.
"La cohabitation intergénérationnelle est très liée au niveau économique des personnes. Logiquement, la personne âgée qui a peu de moyens habite chez ses enfants. Or, 46 % des Portugaises de plus de soixante-quinze ans vivent en dessous du seuil de pauvreté, contre 6 % des Néerlandaises... Et il est difficile de prévoir comment cela va évoluer", donne, en exemple, Joëlle Gaymu.
Quant à la vieillesse solitaire actuelle de nos aînées, elle est essentiellement due à leur longévité et à leur veuvage plus fréquent que chez les hommes. Entre soixante-quinze et soixante-dix-neuf ans, environ trois hommes sur quatre vivent en couple, alors que c'est le cas de seulement une femme sur trois. Les hommes n'atteignent ce niveau qu'entre quatre-vingt-dix et quatre-vingt-quatorze ans. Il n'y a quasiment plus aucune femme en couple dans cette tranche d'âge... Les hommes vieillissent donc plus aux côtés de leur partenaire. Et, en cas de rupture, ils se remettent en couple avec des compagnes généralement plus jeunes.
"A l'avenir, les valeurs masculines et féminines vont un peu moins différer. Avec la baisse de la mortalité, le veuvage féminin baissera également. Les deux sexes se rapprochent, c'est déjà une bonne nouvelle", s'exclame Joëlle Gaymu.
Résolument optimiste face aux échéances sociétales, la démographe rappelle : "Restons calmes ! Certes, deux questions se posent, celle du financement des retraites et celle de la dépendance. Mais les premiers baby-boomers ont soixante ans seulement aujourd'hui. Les problèmes viendront lorsqu'ils en auront soixante-quinze quatre-vingts ans... Nous disposons de quinze à vingt ans devant nous pour nous y préparer !"
* Site de l'Ined
* Le projet Felicie