Un sur quatre. C’est le nombre d’actifs qui seront aidants d’un proche atteint de la maladie d'Alzheimer d’ici à 2030, d'après la mutuelle AG2R La Mondiale. “Journées harassantes, manque de sommeil et épuisement ne sont pas sans conséquences sur l’état de santé des aidants, particulièrement pour ceux qui accompagnent un proche souffrant de troubles cognitifs”, alerte le site santementale.fr.
Alzheimer : des aidants en détresse psychique
Plus précisément : “20% déclarent que leur état de santé s’est globalement dégradé au cours des deux dernières années (contre 16% pour les aidants s’occupant d’un parent âgé) et 20% déclarent avoir consommé occasionnellement ou tous les jours un médicament contre l’anxiété ou la dépression (contre 16%).”
Partant de ce constat, Lydie Catalano, ancienne professeure d’arts plastiques qui a elle-même aidé sa grand-mère atteinte d’Alzheimer, a voulu créer un nouvel outil numérique pour simplifier le quotidien des aidants. Ce dispositif prend la forme d’un chatbot, ou messagerie de discussion avec une intelligence artificielle, “Alix”.
L’objectif d’Alix est de rassembler les informations disponibles sur les aides auxquelles peuvent prétendre les aidants, sur les établissements les plus proches, sur les démarches administratives à suivre… Une façon de réduire considérablement leur charge mentale. Medisite s’est entretenu avec Lydie Catalano pour mieux comprendre le fonctionnement d’Alix.
Alix : faciliter les démarches administratives
Comment vous est venue l'idée d’Alix ?
Ma grand-mère est décédée récemment. Elle avait Alzheimer et j’étais son aidante. Avec le recul, on pense que ce n'était pas tout à fait Alzheimer, mais quelque chose d’apparenté. Ça fait depuis 2015 qu’avec une équipe, on réfléchit à une manière d'aider, par la technologie, le maintien à domicile et à soulager le fardeau des aidants. En moyenne, un aidant consacre 8 heures par semaine à cette tâche. Sur ces 8 heures, il y a 3 heures de démarches administratives. Notre premier constat, c’est qu’aujourd'hui, les informations sont souvent diluées dans plein de sites Internet différents. Typiquement, dans mon cas, nous n'habitions pas dans le même département que ma grand-mère, donc nous ne dépendions pas des mêmes conseils départementaux. On s'est dit : “Comment peut-on faire pour répertorier dans un même dispositif toutes les informations qui permettront en quelques clics de savoir à quelle aide financière on a le droit ?” Par exemple, savoir où est le service de soins à domicile le plus proche de chez nous. Ensuite, on s’est rendu compte que 30% des aidants meurent avant leur aidé, ce qui est loin d’être négligeable.
“Je cherche un EHPAD dans mon département”
Alix est uniquement destiné aux aidants des malades d’Alzheimer ?
Oui, surtout pour Alzheimer. Aujourd'hui, on a beaucoup plus d’aidés qui souffrent d'Alzheimer que d’autres pathologies, et c'est souvent les aidants de ces personnes-là, qui sont un peu plus âgées, qui décèdent.
Cet outil aide énormément pour les démarches administratives.
On s'est dit que les personnes malades d'Alzheimer - c'est peut-être un biais - ne sont pas des gens très digitalisés. L'idée, c'était d’aborder le sujet par le biais des aidants en leur fournissant un outil conversationnel. Typiquement, vous dites à Alix : “Je cherche un EHPAD dans mon département” et vous trouvez la réponse. Nous sommes en train de développer nos propres algorithmes.
Ce n’est pas un outil de prise en charge médicale.
Non. Aujourd'hui, le problème avec Alzheimer, c'est que le médical est très complexe, donc on n'est pas rentrés dans le médical. Il faut savoir qu’il n’y a pas de traitement pour cette pathologie, ça change tout le temps. On était tout de même accompagnés par des médecins travaillant dans des Maisons départementales pour les personnes handicapées. Aussi, dans le chatbot, si vous tapez votre requête et qu’elle est d’ordre médical, Alix vous donnera les derniers articles scientifiques et les études en cours.
Alix : "C'est comme une messagerie"
À quoi ressemble ce chatbot ?
Le chatbot est en accès libre et gratuit sur notre site et il va être déployé chez des partenaires. Tout le monde peut l'utiliser. On a eu des testeurs un peu partout, comme des infirmières. Depuis qu'on en parle, pas mal de gens nous ont contactés pour le tester, comme des conseils départementaux ou des dispositifs d'aide. Quand vous êtes sur mobile, c'est comme une messagerie. L'idée, c'était d'avoir des conversations guidées. En un clic, vous arrivez à localiser le Service de soins infirmiers à domicile le plus proche de chez vous. Cela permet même, pour des professionnels qui n'étaient pas notre première cible, de savoir ce qu’il se passe sur leur territoire quand ils sont en déplacement. Quand vous contactez votre assistante sociale, vous savez déjà quel papier vous devez lui apporter. Vous savez déjà à quelle aide vous avez droit.
"Je n’avais jamais pensé que ça pouvait générer autant de stress"
Est-ce que vous avez eu des retours ?
On a plein de témoignages, dont une aidante infirmière qui s'occupe de sa grand-mère, qui nous a dit merci, parce que le système français est compliqué à comprendre. Elle nous a dit que c'était bien d'avoir tout au même endroit. Une autre aidante nous a dit que ça lui a permis de trouver des réponses quand elle ne savait plus vers où se tourner.
Pour votre grand-mère, cet outil vous aurait aidée ?
Oui ! Par exemple, les aides financières, on ne les a jamais demandées. J'ai tout appris en créant Alix. On s'est repliés sur la famille pour s'organiser tant qu'elle était encore chez elle, et ma tante infirmière à domicile nous a aidés. Elle est d’ailleurs l’une des premières à avoir testé le chat. Elle nous a expliqué que les infirmières ont besoin d’un outil comme celui-là pour obtenir des informations médicales leurs visites. L'infirmière, quand elle arrive le matin chez son patient, elle ne sait rien tant qu'elle n’est pas entrée. Je n’avais jamais pensé que ça pouvait générer autant de stress.
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