Maxime Gaget, ex-homme battu : Maxime Gaget

Medisite : Pourquoi avez-vous décidé de raconter votre calvaire dans un livre ?

Maxime Gaget* : Au tout début, j'avais commencé à écrire mon histoire sur ordinateur, ne pouvant que très difficilement la verbaliser. Je suis un lecteur plutôt vorace et j’aime écrire, cela m'a grandement facilité cette tâche des plus délicates. J'ai entrepris des recherches personnelles, notamment sur Internet, et je me suis rendu compte de deux faits assez importants : il n'existait aucun témoignage à part entière d'hommes dans mon cas et il y avait un véritable tabou en la matière. Ces deux points m'ont conforté dans l'idée de faire ce livre, pour prouver que de tels faits sont bel et bien une réalité.


Medisite : Vous détaillez les scènes très douloureuses physiquement et psychologiquement que vous a fait subir "Nadia", votre "bourreau" (brûlures, douche froide...). Pourquoi ?

Maxime Gaget : Ma démarche d'écriture a, initialement, un caractère thérapeutique. J'ai rédigé aussi précisément que possible pour évacuer tout ceci de mon esprit. Un abcès doit être totalement vidé et désinfecté si l'on ne veut pas risquer de complications ultérieures. En outre, étant passionné d'aéronautique, j'ai retranscrit tout ceci exactement comme l'aurait fait la boîte noire d'un appareil ayant subi un crash. Ce n'est pas sans lointain rapport. J'avais d'ailleurs nommé ce projet "La boîte noire" au tout début...


Medisite : Pourquoi n'êtes-vous pas parti dès les premières violences ? Vous dites "par sentiments" mais comment peut-on endurer de telles atrocités qui ont failli vous coûter la vie ?

Maxime Gaget : Lors des premières violences, soit au 31 décembre 2007, j'ai mis cela de côté, considérant que tout couple pouvait, à un moment donné, avoir un écueil sur sa route. Ce fut une très grosse erreur de jugement de ma part. Cela n'a été ensuite qu'une succession crescendo d'actes tous plus violents les uns que les autres. Quand je me suis rendu compte du danger, il était trop tard : celle qui était devenue mon bourreau avait réussi à me mettre dos au mur, sans la moindre alternative pour réagir et/ou fuir. Exactement à l'image d'une plante carnivore attrapant une mouche pour la dévorer, le piège s'était refermé sur moi, inexorablement. J'étais devenu prisonnier de sa folie inhumaine... Un an et deux mois plus tard, le miracle est arrivé : mes proches m'ont sorti de cet enfer. Dans un état critique certes, mais vivant.


Medisite : En cas de violences conjugales, faut-il fuir sans attendre selon vous ?

Maxime Gaget : Dès qu'il commence à y avoir la moindre forme de violences, à commencer par l'aspect verbale, posez un ultimatum clair et net : la violence n'a jamais (et ne fera jamais) partie du domaine amoureux. Ce sont deux choses que tout oppose. Bien souvent, et cela se vérifie assez facilement, les gestes succèdent aux paroles...
En outre, si les rapports commencent à verser de plus en plus vers des intérêts exclusivement matériels (en particulier financiers), trouvez le frein et stoppez le train de suite. Il y a anguille sous roche.


Medisite : Que dire aux hommes et femmes battus ?

Maxime Gaget : N'ayez plus honte et osez en parler autour de vous. En gardant le silence, vous jouez le "jeu" de votre bourreau. Pour les éventuels spectateurs/témoins et/ou auditeurs de tels faits, ne riez pas niaisement, ne feignez pas l'indifférence, ne fermez pas la porte à une victime de violences (homme ou femme). Au contraire : aidez-la, portez-lui secours. Pour une fois, dans votre vie, faites preuve d'humanité.


Medisite : Un homme décède tous les 13 jours sous les coups de sa compagne. Qu'est-ce qui devrait changer dans notre société, selon vous ?

Maxime Gaget : Laisser tomber les (pseudo) sites de rencontre et plus généralement Internet pour ce qui est du domaine amoureux serait un très bon début. Cela minimiserait aussi les risques d'arnaques.
Ensuite, et c'est vrai tant pour les hommes que pour les femmes, il faut briser le silence et faire preuve d'humanité en portant assistance aux victimes, plutôt que de les rabaisser, les rejeter comme des pestiféré(e)s, les dénigrer un peu plus, ou pire opposer une parfaite indifférence. Soyez humains ! Un jour, cela pourrait très bien être votre tour ou celui d'un(e) proche ou un de vos enfants, n'oubliez jamais cela...


Medisite : Quels messages voulez-vous faire passer à vos lecteurs ?

Maxime Gaget : Il y en a plusieurs.
1) N'ayez pas honte de vos actes, vous n'avez rien à vous reprocher. Dites-vous, pour aller plus loin dans l'idée, que la honte DOIT changer de camp!
2) Les cas d'hommes battus ne sont nullement une chimère et existent bel et bien. Notre société a jusqu’ici marginalisé et étouffé cela pour la seule et unique raison que cette idée était "dérangeante", inconvenante, selon des préceptes poussiéreux qu’il faut désormais revoir de A à Z. Les temps changent et les moeurs avec.
3) Il y a eu un "avant", il y a malheureusement eu un "pendant", au même titre qu'il y aura nécessairement un "après". La vie continue, aussi dure puisse avoir été l'épreuve subie... Il y a toujours de l'espoir.
4) J'espère pouvoir apporter à la fois un message d'espoir envers toute personne victime de violences conjugales - indifféremment Hommes ou Femmes (la violence n'a pas de visage, et frappe aveuglément) - mais également un avertissement très clair envers les auteurs de tels faits.
5) "La violence est l'apanage des brutes et des faibles d'esprit" (Oscar Wilde). Les plus faibles sont les auteurs de violences, et non l'inverse.


Medisite : Qu'attendez-vous de la justice aujourd'hui ?

Maxime Gaget : Une seule chose : que mon statut soit reconnu en tant que tel. Je pourrais tourner cette lourde et douloureuse page une bonne fois pour toute, et me tourner vers un avenir bien meilleur et surtout plus calme. En parallèle, j'espère obtenir certaines réponses de la part de celle qui est à présent mon adversaire judiciaire. Espoir sans doute utopique... Mais espoir tout de même.

Medisite : Que peut-on vous souhaiter maintenant ?

Maxime Gaget : Une chose, très simple : VIVRE en paix et, idéalement, à deux.

Merci à Maxime Gaget, auteur de Ma compagne, mon bourreau aux éditions Michalon, 2015.

*nom d'emprunt.

mots-clés : violence
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