Depuis 2004, le moustique tigre, cet insecte ravageur a fait son entrée en Europe, et il n’est pas près de faire demi-tour, hélas. "Le moustique tigre a déjà commencé à coloniser les départements du sud de la France (Alpes Maritimes, Corse, Bouches-du-Rhône et les départements du pourtour méditerranéen)", explique le Pr Stéphane Gayet, infectiologue au CHU de Strasbourg.
"Les transports internationaux ont permis au moustique tigre de migrer à travers les pays, explique l’expert. Et tout particulièrement les transports en bateau. Dans l’avion, c’est plus rare, car l’appareil est désinsectisé avant qu’il ne prenne son envol. Donc le moustique tigre ne peut survivre au vol en principe".
Connu scientifiquement sous le nom de "Aedes albopictus", il peut transmettre des arboviroses par sa piqûre, à savoir, le chikungunya, mais aussi la dengue et le virus Zika.
Moustique tigre : que se passe-t-il quand il nous pique ?
"Le moustique n’est pas un insecte hématophage à proprement parler, détaille le Pr Gayet. Cela signifie qu’il se nourrit de tout ce qu’il trouve et pas uniquement de sang. Mais, la femelle a besoin de sucer du sang au moins une fois dans sa vie pour assurer sa reproduction". En effet, le sang permet la maturation des œufs. Chaque moustique tigre femelle a donc besoin d’un repas sanguin à minima.
"Cette dernière repère sa proie à des dizaines de mètres, ajoute l’infectiologue. Le corps humain émet du gaz carbonique que le moustique perçoit, même de loin. Une fois qu’il a atteint sa victime, l’insecte va le mordre. Il crache alors de la salive qui est anticoagulante, et c’est bien là le danger : les arboviroses se trouvent dans la salive. La contamination peut alors survenir".
À noter : le moustique tigre peut aussi s’attaquer à un humain déjà porteur d’un virus. L’insecte va alors le pomper lorsqu’il va piquer. Pour cela, l’homme doit être en phase virémique (le virus a déjà atteint le sang). Dans ce cas de figure, le moustique est susceptible de transmettre l’arbovirose à sa prochaine victime.
Ci-dessous le Ministère chargé de la Santé rappelle les mesures de protection à prendre.
Arbovirose : la dengue en forte recrudescence
Transmise par le moustique tigre, la dengue est arbovirose, une maladie infectieuse qui provoque, entre autres symptômes, une fièvre élevée. Cette pathologie sévit particulièrement dans les régions intertropicales. La dengue connaît une importante recrudescence ces dernières années. En effet, près de la moitié de la population mondiale serait ainsi exposée directement au risque de contamination. Très récemment, l’Agence régionale de santé (ARS) a recensé 18 cas confirmés de dengue en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
"Les symptômes sont le plus souvent de type grippal", explique le Pr Gayet. Il va donc s’agir de maux de tête, malaise, éruptions cutanées et surtout, de fièvre. Les premiers signes vont apparaître au bout de quelques jours, une semaine en moyenne.
"Il n’existe ni traitement curatif spécifique ni vaccin contre la dengue, alerte l’expert. Le virus disparaît seul, avec le temps, dans la grande majorité des cas et ne laisse aucune séquelle. Toutefois, la dengue peut se compliquer et provoquer des hémorragies. Une dengue dite "sévère" peut causer des complications comme une détresse respiratoire, entraînant la mort dans les 24 à 48 heures.
Arbovirose : le chikungunya, associé à des risques de méningo-encéphalites
Si le moustique tigre vous a transmis le virus du chikungunya, il faut agir vite. L'infection peut devenir rapidement invalidante.
Les premiers signes vont se caractériser par des douleurs articulaires persistantes (poignets, doigts, chevilles), partage l’Institut Pasteur. "Elles surviennent après un délai d’incubation de 2 à 10 jours et sont, souvent, très invalidantes, précise la fondation. À cette atteinte articulaire s’associent fréquemment des maux de tête, accompagnés de fièvre, de douleurs musculaires importantes, une éruption cutanée ou encore une conjonctivite". Des saignements des gencives ou du nez ont aussi été décrits par certains patients.
Certaines formes de chikungunya peuvent néanmoins devenir très sévères.
"L’épidémie de 2005 survenue sur l’Ile de La Réunion a permis de montrer l’existence de formes neurologiques graves, notamment des méningo-encéphalites. Ces dernières sont principalement rencontrées chez des personnes âgées ou au système immunitaire affaibli", ajoute l'Institut Pasteur.
Habituellement, la rémission des symptômes cliniques est assez rapide. Le virus disparait avec le temps. Or l’atteinte articulaire peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années, selon l’âge du sujet.
Arbovirose : le virus Zika, difficile à diagnostiquer
Le virus Zika est aussi une arbovirose transmise par le moustique tigre. Il se manifeste 3 à 12 jours après la piqûre de l’insecte vecteur et implique des symptômes similaires à ceux de la dengue ou du chikungunya. Malheureusement, la majorité des personnes contaminées (70 à 80 %) ne développent aucun symptôme, ce qui rend le diagnostic difficile.
"Les complications sont peu fréquentes, mais dans le cas d’une importante épidémie, elles ne doivent pas être négligées, met en garde l’Institut Pasteur. Certains cas de complications neurologiques post-infectieuses, de type syndrome de Guillain-Barré, ont été constatées. Cette pathologie se caractérise par une paralysie ascendante progressive qui peut atteindre les muscles respiratoires".
En outre, les futures mamans ont de forts risques de transmettre le virus à leur fœtus, ce qui peut générer des graves anomalies du développement cérébral chez l’enfant.
Moustique tigre, vecteur de la fièvre jaune ?
Une autre arbovirose pourrait bien être associée au moustique tigre. Le Pr Stéphane Gayet évoque la fièvre jaune. "Cela concerne particulièrement l’Amérique du Sud. Très souvent, elle est mortelle", affirme-t-il. La fièvre jaune est une maladie virale transmissible de l’animal (souvent le singe) à l’Homme, et d’Hommes à Hommes par divers moustiques (dont le moustique tigre semble-t-il).
Elle cause de graves maladies hémorragiques, malgré l’existence du vaccin.
En effet l’année dernière l’Institut Pasteur avait démontré pour la première fois que le moustique tigre était capable de transmettre le virus de la fièvre jaune à l’Homme.
"Mais il n’y a encore jamais eu de cas similaire en France", ajoute le Pr Gayet.
Merci au Pr Stéphane Gayet, infectiologue au CHU de Strasbourg
L'Institut Pasteur
Fièvre jaune, Ministère des Solidarités et de la Santé, Février 2017
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