Sous le nom complexe "2,4-Dinitrophénol (DNP)", se cache un poison mortel, vendu sur Internet comme un produit aux incroyables vertus amaigrissantes. Pourtant, il est illégal de vendre cette substance pour la consommation humaine : ses dangers sont connus depuis plus d'un siècle. Alors, pourquoi fait-il encore des victimes chaque année ? Comment le reconnaître ? Et quels effets secondaires entraîne-t-il ? Le point.
DNP : qu'est-ce que c'est ?
Le DNP est un produit chimique légalement utilisé comme explosif, engrais, pesticide et colorant. Mais il est aussi considéré comme un formidable "brûleur de graisse", qui agit en accélérant le métabolisme dans l’organisme.
En effet, il court-circuite le processus naturel de production d’énergie. Le DNP réoriente le fonctionnement de la mitochondrie (l es mitochondries sont des organites intracellulaires dont la fonction principale est de fournir aux cellules l'énergie dont elles ont besoin, ndlr) qui, au lieu de produire de l’ATP, produit de la chaleur - c’est la thermogenèse.
C'est ainsi que ce processus favorise l’utilisation des corps gras et brûle des calories. Et c’est d’ailleurs pourquoi cette substance a été utilisée dès les années 1930 dans des compléments alimentaires, aides diététiques, boissons protéinées, potions, poudres et les comprimés promettant de contribuer à la perte de poids, à la construction musculaire et au corps.
Un produit amaigrissant illégal et potentiellement mortel
Le 2,4-dinitrophénol (DNP) cause fréquemment des effets indésirables, dont la mort. Or, les dangers de cette substance amaigrissante ne sont pas nouveaux. En 2015, Interpol avait émis une alerte mondiale à l’égard du 2,4-dinitrophénol (DNP).
La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) avait également alerté sur ses effets nocifs :
"Molécule hautement toxique, le DNP n’est pas autorisé dans les denrées alimentaires, ni a fortiori dans les compléments alimentaires". Sa vente en France est soumise à prescription médicale obligatoire et est limitée à la pharmacie (liste II des substances vénéneuses – code de la santé publique). Néanmoins, cette molécule circule dans des circuits de vente parallèles car elle est prisée chez certaines personnes, notamment les bodybuilders", avait souligné la DGCCRF.
Des mises en garde qui s'avèrent fondées puisque rien qu'entre 2007 et 2020, le National Poisons Information Service du Royaume-Uni a enregistré 138 cas d'empoisonnement et 26 décès causés par le DNP, selon un article du Guardian.
Eloise Aimee Parry, une jeune Britannique de 21 ans, est notamment devenue célèbre après avoir consommé cette molécule mortelle. Elle s'était présentée aux urgences après avoir été prise d'un malaise, mais les médecins n’ont rien pu faire pour la sauver.
En 2016, c’est Sean Cleathero, un jeune britannique adepte de bodybuilding, qui succombait après avoir consommé des pilules contenant du DNP.
Un produit "attractif" vendu sous forme de poudre, de crème ou de capsules
À quoi ressemble ce produit mortel, vendu partout sur Internet ? Vous le reconnaîtrez grâce à sa couleur, jaune généralement, et à son format qui varie entre la poudre, les capsules - faciles à avaler - ou bien encore la crème.
Lorsque le DNP est commercialisé sous forme de pilule, il ressemble de près à des analgésiques en vente libre. Aussi, la prudence est de mise.
Les sites Web frauduleux et peu fiables doivent vous mettre la puce à l'oreille. Ce sont eux qui font la promotion de cette substance nocive via des compléments alimentaires, des coupe-faim ou encore des comprimés "miracles" qui promettent de perdre beaucoup de poids en peu de temps...
Si vous êtes une adepte de ce type de produits, prenez garde à toujours vérifier la composition de ces derniers. Elle est très aléatoire en fonction des fabricants.
En effet, "si cette substance est déjà dangereuse en soi, les risques liés à son utilisation sont amplifiés par ses conditions de production illégales. Le DNP est non seulement produit dans des laboratoires clandestins n’appliquant aucune réglementation en matière d’hygiène, mais les fabricants exposent également les consommateurs à un risque accru d’overdose du fait de leur absence de compétences spécialisées", souligne Interpol dans un communiqué.
Des consommateurs vulnérables, souvent atteints de troubles alimentaires
Les personnes vulnérables sont particulièrement à risque face à cette molécule mortelle.
En effet, les personnes qui veulent absolument perdre du poids et tous ceux souffrant de troubles alimentaires (anorexie, boulimie...) peuvent facilement être séduits par les fausses vertus de cette pilule.
Le DNP est aussi très populaire dans le milieu culturiste, car il est soupçonné d'augmenter la masse musculaire des sportifs.
"2,4-Dinitrophénol" : des effets secondaires très dangereux
Comme souligné précédemment, le DNP est un réel poison.
Simon Thomas, professeur de pharmacologie clinique à l'Université de Newcastle, interviewé par le média "The Guardian" révèle ainsi que "vous pouvez passer du bien au critique au mort en quelques heures. Ce qui commence par la transpiration, une température élevée et un rythme cardiaque rapide peut rapidement évoluer vers des spasmes musculaires, des convulsions et une défaillance multi-organique. Le taux de mortalité est très élevé".
D'après des données de la Food Standards Agency (FSA), l'organisme de surveillance de la sécurité alimentaire du Royaume-Uni, de nombreuses personnes décèdent après avoir pris du DNP et ceux qui ont survécu ont souffert de cataractes, ainsi que de dommages durables au cœur et au système nerveux.
D'ailleurs, les nouveaux consommateurs se rendent compte très rapidement des effets secondaires de cette molécule.
Abigail Davies, 28 ans, interviewée par le Guardian, détaille avec précision la réaction de son corps face à cette nouvelle substance :
"Il était immédiatement clair que c'était différent de tout ce que j'avais pris", dit-elle. "C'était comme si quelqu'un avait frappé une allumette dans mon estomac. Je transpirais abondamment, hallucinant. Je me dissociais - je n'étais pas sûr d'être en vie. J'étais allongé sur le canapé et je ne pouvais pas faire bouger mes membres. J'avais des palpitations. Je suppose qu'il y a eu un moment où j'ai pensé "ça pourrait être ça", et je mourrais. Et j'étais d'accord avec ça.
C'est pourquoi les autorités rappellent à tous les internautes que la consommation de produits issus du Web (sur des sites peu fiables) est vigoureusement déconseillée, sous peine de mettre sa vie en jeu et qu’à ce jour, il n’existe aucune pilule miracle pour maigrir.
Savoir que cela pourrait vous tuer n'est pas dissuasif : le commerce mortel des pilules amaigrissantes, The Guardian, mardi 21 juillet 2020.
INTERPOL émet une alerte mondiale concernant un produit amaigrissant illégal potentiellement mortel, wada ama, 4 mai 2015.
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