En France, près de 3 millions de personnes souffrent d’une maladie rénale chronique, qui empêche les reins de filtrer correctement les déchets. Près de 90 000 patients sont même au stade de l’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT), une pathologie grave qui nécessite un traitement par dialyse ou une greffe de rein, selon le réseau France Rein.
Si les études scientifiques nous apportent parfois de bonnes nouvelles, avec l’espoir de nouveaux traitements, ce n’est malheureusement pas toujours le cas. Un essai clinique australien révèle que le médicament allopurinol, qui est prescrit à environ 20 % des patients atteints d'insuffisance rénale chronique, ne fonctionne pas comme il le devrait. Les résultats ont été publiés le 25 juin 2020 dans le New England Journal of Medicine.
L’allopurinol ne ralentit pas la détérioration des reins
L’allopurinol est, originellement, un traitement utilisé pour soigner la goutte et les calculs rénaux. Il agit en diminuant la production d'acide urique, ce qui permet d’abaisser son taux dans le sang et dans les urines.
Des chercheurs de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, du George Institute for Global Health et de l'Australasian Kidney Trials Network, ont examiné les données de 369 patients atteints d’insuffisance rénale chronique pendant 2 ans. Ces patients étaient suivis dans 31 hôpitaux d’Australie et de Nouvelle-Zélande, et risquaient tous de développer une maladie plus grave.
Une partie d’entre eux a été placée sous allopurinol, l’autre groupe, sous placebo. Les scientifiques ont ensuite analysé la vitesse à laquelle leur fonction rénale s’est détériorée au fil du temps. “Nous avons constaté que la fonction rénale a diminué à un rythme similaire chez les patients recevant de l'allopurinol et ceux recevant un placebo”, explique Sunil Badve, qui a co-dirigé l’étude.
Taux d’acide urique trop élevé : un simple marqueur de l’insuffisance rénale
En se basant sur des travaux antérieurs, les scientifiques pensaient que l’allopurinol pourrait réduire la vitesse de progression de l’insuffisance rénale chronique. En effet, les trois quarts des personnes qui en souffrent ont des niveaux élevés d’acide urique dans le sang. Ils ont donc supposé ces derniers étaient en corrélation avec le risque d’insuffisance rénale, et que réduire ces taux grâce à l’allopurinol pourrait retarder la progression de la maladie.
Néanmoins, le fait que la maladie progresse aussi vite chez les patients sous allopurinol, que chez ceux appartenant au groupe témoin, semble prouver le contraire. En d'autres termes, la théorie selon laquelle des taux sanguins élevés d’acide urique provoquent une détérioration plus rapide de la fonction rénale est sûrement fausse. Le Pr Badve suggère qu’ils sont sans doute, tout simplement, un marqueur de l’insuffisance rénale.
De nombreux patients suivraient ce traitement pour rien !
Si leur découverte est vraie, cela signifie que les patients actuellement traités avec de l’allopurinol pour leur IRC “prennent probablement des médicaments qui ne leur sont d’aucun intérêt, à moins qu’ils ne souffrent d’autres affections contre lesquelles l’allopurinol est efficace, comme la goutte”, précise le chercheur.
Or, comme tout médicament, l’allopurinol n’est pas exempt d’effets secondaires. Il peut notamment entraîner des réactions allergiques ou des éruptions cutanées : mieux vaut donc éviter de le prendre si ses bénéfices potentiels ne sont pas prouvés. Les scientifiques mettent toutefois en garde : les personnes qui suivent actuellement ce traitement ne doivent surtout pas arrêter de le prendre sans en discuter d’abord avec leur médecin.
Effects of Allopurinol on the Progression of Chronic Kidney Disease, The New England Journal of Medicine, 25 juin 2020.
Chronic kidney disease medication doesn’t work, shows study, News Medical, 28 juin 2020.
Ma maladie rénale chronique 2022, France Rein.
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