Toute vérité n'est pas bonne à dire ! Ce proverbe reste d'actualité. Si la franchise est la clé de la réussite dans toutes les relations humaines, elle n'est pas toujours possible, ni souhaitable, y compris au sein du couple.
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Couple : 4 clés pour vivre heureux à deuxDoit-on tout se dire au sein du couple ? La transparence doit-elle être toujours de mise ? Les raisons de garder certaines vérités pour nous, dans le secret de nos âmes, sont variables. On est parfois contraint de conserver un secret pour se protéger ou pour protéger l'autre. Par exemple, certaines personnes ont peur d'avouer une faute, une erreur qu'elles estiment impardonnables. Elles craignent de ne plus être aimées. Elles préfèrent se taire par peur de blesser leur partenaire, de le choquer, de le décevoir.
D'autres ne souhaitent pas révéler leurs failles et leurs souffrances à leur conjoint. Elles manquent d'assurance et d'estime de soi. Parfois, il arrive que certaines personnes soient timides, taciturnes, empathiques… Elles évitent toute conversation difficile au sein du couple. Non-dits, tabous, traumas... Les motivations pour garder un secret peuvent, ainsi, être diverses. Il n'est pas toujours facile de délier les langues, même lorsque la complicité existe entre les conjoints.
Lorsque le secret est trop lourd à garder et qu'il devient douloureux, il est préférable de le confier à une tierce personne : un ami, un membre de la famille ou un professionnel de santé (médecin traitant, psychologue, psychiatre...). Dans ces conditions, certaines informations peuvent rester secrètes au sein du couple. Et cela pendant de nombreuses années, voire à vie. Tant qu'ils ne nuisent pas à la qualité de la relation, les secrets peuvent être acceptables. Chacun a le droit de conserver une part de mystère.
Karine, 27 ans : "Je n'ai jamais avoué mes infidélités à mon petit ami"
"J'ai connu Arnaud, mon petit ami actuel, il y a 10 ans. Nous avons commencé à sortir ensemble en classe de terminale, mais mon amour pour lui avait débuté bien plus tôt. Je l'avais repéré dès la seconde. Néanmoins, il avait déjà une copine. J'en étais très jalouse, mais j'avais été patiente. J'admirais tellement Arnaud ! Il était à la fois intelligent et "cool". Il faisait partie des meilleurs élèves de sa classe et ne se prenait jamais au sérieux. Il avait de l'humour et physiquement, il me plaisait beaucoup.
Arnaud est un grand brun aux yeux bleus, musclé. Il sait comment regarder les filles, et surtout, comment leur parler ! Lorsqu’il s'est séparé de sa copine au début de terminale, j'ai très vite organisé une soirée chez mes parents un samedi soir. Je savais qu'il me trouvait jolie et sympa. Nous partagions aussi des passions communes : l'art moderne, le volley-ball et le piano.
Ce soir-là, nous sommes sortis ensemble. Pour moi, c'était magique ! J'avais tellement attendu ce moment-là ! Petit à petit, nous avons appris à mieux nous connaître et notre relation s'est renforcée. Nous nous sommes alors installés ensemble à la fac. Mais au bout de quelques années de vie commune, je me suis lassée. Je voulais connaître d'autres hommes. Discrètement, tout en restant avec Arnaud, je suis sortie avec plusieurs hommes que j'avais rencontrés au travail. Ces relations ont été intenses, mais brèves et peu profondes. Elles m'ont fait prendre conscience du caractère précieux d'Arnaud. Aujourd'hui, je sais que je veux faire ma vie avec lui. Mais je ne lui ai jamais avoué mes infidélités."
L'avis de Camille Rochet, psychologue
"Les infidélités de Karine font partie du passé. Cette jeune femme a désormais pris conscience de l'amour qu'elle porte à son compagnon et ne souhaite plus le trahir. Dans ces conditions, il n'est pas nécessaire qu'elle lui en parle, sauf s'il y a de gros risques qu'il l'apprenne par un tiers. Ce genre de confidence peut détruire un couple et miner à vie leur confiance mutuelle. Lorsque l'erreur a été réparée et que l'on chemine vers la fidélité, mieux vaut garder ce secret pour soi. Cela vaut uniquement si l'on ne recommence pas ce mécanisme d'infidélité. Il faudra en parler si l'on se sent de nouveau en danger.
Marie, 42 ans : "Je ne peux pas lui dire que je suis non voyante de l'œil droit"
"Je suis en couple depuis une vingtaine d'années. Mon mari et moi avons deux merveilleux enfants. Nous nous sommes toujours tout dit. Nous avons traversé des moments difficiles, mais aussi des périodes de grande joie. Malgré notre complicité, il y a une chose que je n'ai jamais réussi à lui avouer.
Je suis non voyante de l'œil droit depuis ma naissance. Cela ne me gêne pas. Je vois très bien de l'œil gauche et j'accomplis toutes les tâches du quotidien sans aucun problème, mais je n'ai jamais osé en parler à mon mari.
J'ai peur qu'il me juge, qu'il me considère comme une personne handicapée et que le regard qu'il porte sur moi change. En fait, j'ai peur qu'il ne me désire plus. Je sais que mon appréhension n'est pas fondée : c'est un homme doux, bienveillant et compréhensif. Malgré tout, quelque chose me bloque. J'ai plusieurs fois essayé de lui en parler, en vain. Je n'ai jamais réussi à lui confier ce problème visuel que j'ai depuis que ma mère m'a mise au monde !"
L'avis de Camille Rochet, psychologue
"Marie a une faille dans l'estime de soi : c'est ce qui explique qu'elle garde ce secret. Elle peut tout à fait confier son handicap visuel à son mari. S'il l'aime de façon authentique, il n'y a aucune raison qu'il la rejette après un tel aveu. Il devrait même être touché par une telle confidence. Quant à Marie, elle sera soulagée et rassurée de savoir que son Marie l'aime toujours !"
Thérèse, 70 ans : "Je n'arrive pas à l'emmener chez le psychiatre"
"Mon compagnon a des problèmes psychologiques : il souffre de troubles de l'humeur depuis son adolescence. Il a des phases d'euphorie et de profonde tristesse. L'alternance entre ces deux phases est complètement imprévisible. Parfois, il peut se sentir bien en début de journée, puis tomber en déprime le soir. Dans les périodes où il se sent mieux, il arrive à rester de bonne humeur durant plusieurs mois avant de tomber dans une forme de mélancolie. C'est très étrange.
Ce qui est étonnant, c'est qu'il n'a jamais été pris en charge. Ses parents ont vécu au rythme de ses humeurs : ils ne l'ont jamais emmené chez un psychiatre. Quand je l'ai connu, il avait 25 ans et était dans le déni total de sa maladie. La première fois que j'ai constaté ses sautes d'humeur, j'en ai sangloté. J'étais horrifiée. Comme ses parents, je n'ai jamais réussi à lui en parler.
Je sais qu'il devrait être suivi par un psychiatre et qu'il devrait sûrement prendre des médicaments, mais je sais aussi qu'il n'acceptera jamais sa maladie. Aujourd'hui, tous nos proches sont au courant de son problème de santé mentale, mais personne ne fait rien. C'est un secret de polichinelle."
L'avis de Camille Rochet, psychologue
"Ce genre de discussion aurait dû être abordé durant les premières années de vie commune. C'est à ce moment-là qu'il faut mettre à plat tout ce que l'on a dans le cœur et tout ce qui ne va pas. Thérèse vit avec son mari depuis une trentaine d'années, elle a réussi à consolider son couple malgré la pathologie de son époux. Si elle arrive aujourd'hui à trouver une certaine harmonie dans son couple, il n'y a pas de raison qu'elle aborde le sujet avec son mari. Elle peut néanmoins se confier à sa famille, à ses amis ou à un psychologue lors des moments difficiles."
Merci à Camille Rochet, psychologue et autrice de l'ouvrage Les 5 croyances qui empêchent d’être heureux en couple (éditions Larousse) et de L’amour commence après trois ans (Interéditions).
Merci à Karine, Marie et Thérèse pour leur témoignage
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