Les acouphènes sont des bruits auditifs suggestifs, seulement perçus par le patient, qui peuvent prendre la forme de bourdonnement, de grésillement ou de sifflement. Ils résultent d’un dysfonctionnement du système nerveux auditif, et peuvent être temporaires, intermittents ou continus.
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Ces bruits parasites peuvent avoir plusieurs causes, explique le Dr. Philippe Barraqué, musicothérapeute, fondateur de la méthode “Stop Acouphènes” et auteur de Dites stop à vos acouphènes (éd. Guy Trédaniel). "Ils apparaissent souvent après un traumatisme sonore, comme l’écoute prolongée (et répétée) d’une musique trop forte ou un coup de feu. Mais ils peuvent aussi faire suite à un stress important, la prise de certains médicaments, des problèmes circulatoires ou une dorsalgie".
Bruits parasites : 15 % de la population concernés
Selon l’association France Acouphènes, ce phénomène affecte environ 15 % de la population à un moment ou à un autre de la vie. Une enquête Ifop de 2018 révèle que 14 à 17 millions de Français seraient concernés par ce problème, en nette augmentation chez les plus jeunes.
S’il est tout à fait possible de vivre avec, les acouphènes peuvent générer une souffrance psychologique importante, et impacter la qualité de vie. Une étude menée auprès de 72 000 suédois et publiée au mois de mai révèle que montre que les personnes souffrant d’acouphènes sévères sont plus sujettes à l’anxiété et à la dépression. “Parmi les 16 000 répondants victimes d’acouphène, 2 404 ont déclaré avoir tenté de mettre fin à leurs jours”, soulignent les auteurs de l’étude.
La thérapie sonore fréquentielle a largement fait ses preuves
Heureusement, des solutions existent pour les atténuer, et détourner son attention de ces symptômes auditifs. Parmi elles, la thérapie sonore a largement fait ses preuves. Ce “processus d’atténuation sonore” agit sur le plan neuronal, pour modifier une pensée obsessionnelle ou un bruit parasite.
Thérapie fréquentielle : en quoi ça consiste ?
La thérapie sonore consiste à écouter des bruits blancs ou roses, dits neuroacoustiques, plusieurs heures par jour. “Ces bruits agissent comme une sorte de masquage et, à force de les entendre, le cerveau va se déprogrammer de l’acouphène”, explique le Dr. Barraqué. Pour une bonne efficacité, il faut écouter une heure de ces bruits quotidiennement, pendant au moins six mois.
S’il s’agit d’une des méthodes les plus efficaces pour atténuer les acouphènes, le spécialiste recommande toutefois de la coupler avec d’autres techniques, notamment anti-stress, afin d’en décupler les performances. “Bien souvent, c’est l’accumulation des thérapies qui permet un réel mieux être, au bout de quelques mois”.
Le biofeedback et la méditation pour réduire le stress
Le biofeedback : en quoi ça consiste ?
Validé par de nombreuses études scientifiques, le biofeedback applique les principes de psychophysiologie, qui étudie l’interaction entre le corps et l’esprit. Il consiste à mesurer ses fonctions organiques – comme le rythme cardiaque, par exemple – afin de mieux les contrôler.
Cette méthode utilise des appareils qui captent certaines informations transmises par le corps et les traduisent en signaux auditifs ou visuels. Ainsi, “vous expérimentez en direct ce qu’il faut mettre en place au niveau respiratoire, postural ou mental pour faire baisser votre tension, vos acouphènes ou votre nervosité”, écrit le Dr. Barraqué dans son ouvrage.
Biofeedback : quels résultats sur les acouphènes ?
Le biofeedback permet donc d’agir soi-même sur ses acouphènes, en détectant les mauvaises attitudes qui les aggravent. Il permet aussi d’atteindre “un état de neutralité émotionnelle” bienvenu, dans la mesure où les bruits parasites ont tendance à augmenter le stress des patients.
Des essais cliniques réalisés en Allemagne en 2007 ont d’ailleurs montré l’efficacité de cette technique. Après plusieurs semaines d’entraînement, les 21 patients étudiés ont vu l’intensité de leurs acouphènes passer de 25 dB à 16 dB ; une amélioration qui s’est maintenue au moins six mois après l’arrêt du traitement.
Chasser le stress contribue à réduire les bruits parasites
De plus en plus d’études évoquent un lien entre le stress et les acouphènes, selon l’association Acouphènes Québec. Chez certaines personnes, ces bruits parasites surviennent d’ailleurs après un choc émotionnel (deuil, burn-out, rupture...). Pour d’autres personnes, c’est l’acouphène en lui-même qui va engendrer du stress, en provoquant un signal d’alarme dans le cerveau. Un cercle vicieux peut se mettre en place, dans la mesure où l’anxiété aurait tendance à intensifier les acouphènes.
“En réduisant le stress, on peut amoindrir le niveau sonore des acouphènes, et ainsi mieux les supporter”, explique le Dr. Barraqué. Pour ce faire, les méthodes douces sont généralement les bienvenues, comme la méditation, le yoga, la sophrologie ou encore l’aromathérapie.
La méditation, plus spécifiquement, consiste à entraîner l’esprit à chasser les pensées superflues. Selon le musicologue, elle pourrait générer des changements au niveau neurochimique et neurophysiologique, et amoindrir le stress au profit de sentiments plus positifs. Méditer pourrait donc diminuer les conséquences négatives des acouphènes sur le moral, et prévenir les troubles qui les accompagnent parfois, comme l’hypertension ou les problèmes cardiovasculaires.
La digitopuncture : pour stimuler des points d’énergie
La digitopuncture consiste à stimuler manuellement différents points énergétiques définis par la médecine traditionnelle chinoise - les mêmes qu’en acupuncture. Certains points, localisés sur la tête, sont particulièrement efficaces contre les acouphènes, car ils sont directement reliés au cortex auditif. D’autres, situés sur la main, fonctionnent aussi très bien.
Digipuncture contre les acouphènes : en quoi ça consiste ?
L’un des points à stimuler, pour “couper le message d’erreur de l’acouphène”, se situe au sommet du crâne, dans le prolongement de l’axe vertébral et du sommet des oreilles. On presse ce point avec l’extrémité du pouce pendant une vingtaine de secondes, puis on relâche doucement la pression.
Pour être efficaces, les techniques de digipression doivent être réalisées deux fois par jour, de préférence le matin et avant d’aller dormir, pendant une dizaine de jours.
L’acupuncture peut, elle aussi, améliorer le quotidien des patients atteints d’acouphènes. Le praticien va essentiellement stimuler les points de deux méridiens : “trois réchauffeurs” et “vésicule biliaire”. La médecine chinoise montre donc que les acouphènes auraient un lien avec les reins et les glandes surrénales - “siège des tensions et des peurs”, indique le Dr. Barraqué dans son ouvrage.
Les thérapies cognitives, comme l’hypnose et l’EMDR
“L'hypnothérapie de préférence pratiquée avec un médecin, peut agir sur les troubles auditifs”, indique le Dr. Barraqué. Cette pratique met le patient dans un état modifié de conscience, qui le rend plus sensible à la suggestion mentale. Cette thérapie permet au patient d’explorer son mental, afin de changer certains fonctionnements de son cerveau, et ainsi de minimiser les acouphènes - voire les faire disparaître.
L'hypnothérapie particulièrement indiquée contre les acouphènes sévères
En outre, l’hypnothérapie est particulièrement indiquée pour les personnes souffrant d’acouphènes sévères, “qui sont souvent entrés en résistance contre toute forme de thérapie”, indique le musicothérapeute.
Cet état de “sommeil lucide” peut également être obtenu grâce à l’autohypnose, sans intervention d’une personne extérieure. On peut se laisser guider par une musique relaxante ou des pensées positives, et ainsi remonter à la source de ses acouphènes afin de les transformer.
L'EMDR, efficace contres les acouphènes de cause traumatique
L’EMDR, technique de stimulation sensorielle bi-alternée découverte en 1987, est particulièrement indiquée dans le traitement du stress post-traumatique, mais peut aussi être utilisée contre les acouphènes. Grâce à des mouvements oculaires, des stimuli auditifs ou tactiles, le cerveau va pouvoir retraiter des vécus traumatiques à l’origine des symptômes. Cette thérapie cognitive est donc idéale pour les personnes qui souffrent d’acouphènes suite à un “traumatisme psychique ou sonore”, indique le spécialiste.
Lors d’une séance, le praticien fait passer son doigt devant les yeux du patient de manière à induire des mouvements oculaires spécifiques. Il peut aussi lui demander de porter un casque, qui lui fera entendre un son à droite, puis à gauche, ou exercer des tapotements de manière alternée sur ses genoux.
Quelles habitudes changer pour prévenir les acouphènes ?
“L’acouphène est toujours un signal d’alarme”, avertit le Dr. Barraqué. “Au départ, celui-ci est souvent intermittent. Mais si on n’y prend pas garde dès le début, il risque de revenir et de s’installer”. Le spécialiste recommande de réagir dès l’apparition de l’acouphène, dans un premier temps en réalisant un Audioscan, pour évaluer son audition.
Il faut aussi déterminer la cause de ce trouble auditif - le plus souvent sonore, mais pas seulement. On commence donc par consulter son ORL, mais aussi son dentiste (l'acouphène peut être d'origine mandibulaire), et on investigue d'éventuels problèmes de dos par le biais de radios, ou en consultant un kinésithérapeute ou un ostéopathe.
“Lorsqu’il s’agit d’une cause sonore, comme une explosion ou l’écoute d’une musique trop forte pendant plusieurs heures, il faut agir dans les 48h. Le médecin pourra notamment prescrire un traitement à base de corticoïdes”. En effet, l’acouphène signale que les cellules ciliées de l’oreille sont endommagées. Si on n’agit pas rapidement, elles peuvent avoir du mal à se réparer et engendrer des acouphènes chroniques, ou même disparaître, ce qui peut conduire à une surdité précoce.
Dès l'apparition d'un acouphène, il faut agir très vite
Le spécialiste rappelle que “pris au début, on peut toujours éliminer les acouphènes”. Cela est beaucoup plus difficile lorsqu’ils sont installés. Quelques bonnes pratiques permettent heureusement de les prévenir. À savoir, ne pas écouter de musique trop forte, porter des bouchons d’oreilles pendant un concert, ne jamais utiliser d’oreillettes et éviter l’usage du casque de manière prolongée.
“Aujourd’hui, les jeunes sont de plus en plus touchés par les acouphènes, et ce dès l’âge de 12 ans, car on ne laisse plus assez nos oreilles au repos. L’acouphène est souvent un burn-out auditif”, déplore le musicothérapeute. Il souligne que beaucoup de personnes qui présentent ce trouble enregistrent également une baisse auditive.
L'hyperacousie vient souvent de pair avec les acouphènes
En outre, un autre problème survient parfois avec les acouphènes : l’hyperacousie. Cette hypersensibilité au bruit peut vite rendre la vie des patients insupportable. Des sons courants, tels que la mastication, le froissement des papiers ou le cliquetis des couverts apparaissent amplifiés et modifiés. Les entendre peut même s’avérer physiquement douloureux.
“Dans les cas extrêmes, l’hyperacousie provoque un état phobique ou chaque son est vécu comme une agression”. La personne qui en souffre a donc tendance à s’isoler, et s’exclure de toute vie sociale. Une réaction de protection légitime, mais qu’il faut absolument bannir, selon le spécialiste. “Pour sortir de ce cercle infernal, il faut apprendre à gérer son stress”.
Merci à Philippe Barraqué, auteur de Dites stop à vos acouphènes, éd. Guy Trédaniel.
Les acouphènes, France Acouphènes.
"Acouphènes et hyperacousie : fléaux du XXIe siècle ?" - L’enquête Ifop-JNA 2018.
Sex-Specific Association of Tinnitus With Suicide Attempts, JAMA, 2 mai 2019.
Neurofeedback for treating tinnitus, Progress in Brain Research, 2007.
Stress et acouphène, Acouphènes Québec.
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