Sommaire
- Qu’est-ce qu’un pervers narcissique ?
- Comment reconnaître un pervers narcissique ?
- Quelles sont les causes de cette perversion ?
- Qui sont les personnes à risques de devenir manipulateur narcissique ?
- Le test d’évaluation du trouble de personnalité narcissique
- Pervers narcissique : comment repère-t-il sa victime ?
- Comment se libérer d’un manipulateur ?
- Quels risques en restant avec un pervers narcissique ?
- Thérapies pour aider le pervers narcissique
Qu’est-ce qu’un pervers narcissique ?
Le pervers narcissique, parfois appelé manipulateur narcissique, est une personne atteinte d’un trouble de la personnalité narcissique. Le pervers narcissique peut être un homme ou une femme, un conjoint, un ami, un collègue de travail ou un membre de la famille.
Un manipulateur qui satisfait ses besoins aux dépens des autres
Le terme de "perversion narcissique" a été utilisé pour la première fois en 1986, dans un ouvrage du psychanalyste français Paul-Claude Racamier. Il définit cette pathologie comme "la propension active du sujet à nourrir son propre narcissisme aux dépens de celui d’autrui".
Ce terme a depuis été repris et étayé par d’autres auteurs pour décrire une psychopathologie reposant sur la manipulation mentale, permettant à un individu d’exercer une emprise sur un autre. Le pervers narcissique prétend vouloir le bien de sa victime, tout en l’humiliant pour saper sa confiance en elle et asseoir son emprise psychologique.
Séducteur, il charme ses victimes pour mieux les asservir, car il ne se sent exister qu’à travers le regard des autres. Il s’agit bien d’une personnalité, et non d’un simple trait de caractère de ces personnalités toxiques.
Un individu qui souffre d’une faille narcissique
Le pervers narcissique souffre d’une image dévalorisante de lui-même qui le pousse à se valoriser en rabaissant et en détruisant les autres. Il manipule et blesse sans ressentir aucune culpabilité.
Une personne dotée d’une immaturité émotionnelle
Le pervers narcissique présente une immaturité émotionnelle. Pour lui, l’autre n’existe pas, il n’est pas un individu à part entière. C’est un être qui n’est là que pour satisfaire ses besoins. Il existe 2 sortes de pervers narcissiques : ceux qui causent des souffrances à leur entourage de manière involontaire, dépassés par leurs propres mécanismes psychologiques, et ceux, plus rares, qui prennent plaisir à faire du mal.
Un égocentrique
C’est un égocentrique absolu : tout doit tourner autour de lui et il ne supporte pas la frustration.
Comment reconnaître un pervers narcissique ?
Il est souvent très difficile de démasquer le pervers narcissique derrière une personne que l’on a souvent beaucoup aimée et admirée. Une relation qui bascule dans la culpabilité, la dévalorisation, le mensonge et la jalousie doit cependant mettre la puce à l’oreille. En y réfléchissant bien, la victime peut reconstituer le puzzle des traits caractéristiques du pervers narcissique.
Il semble parfait
Le pervers narcissique se présente toujours comme gentil et particulièrement attentionné. "Ces personnes agissent de façon subtile, pointe Johanna Rozenblum, psychologue. Au premier abord, elles sont avenantes, affables, voire populaires". Le pervers narcissique n’est souvent pas avare de compliments au début d’une rencontre. Il se présente toujours sous son meilleur jour en société, où il est volontiers brillant. Son attitude change pourtant au fil du temps. Il devient alors cassant, méchant, voir agressif et violent. Il reprend néanmoins son masque de sauveur lorsque sa victime est particulièrement mal en point, pour mieux recommencer.
Il rabaisse l’autre pour se valoriser
Contrairement à ce qu’il y parait, le pervers narcissique manque de confiance en lui. Il développe une image démesurée de lui-même pour compenser. Il cherche à se procurer de beaux objets et à développer des relations avec des personnes attirantes. Il est constamment en quête de reconnaissance ou de succès. Surtout, il rabaisse sa victime pour se valoriser.
La parole est son instrument de manipulation préféré
Messages contradictoires, détournements de parole… Le langage est l’instrument de manipulation préféré du pervers narcissique. Il entretient une communication floue et noie sa victime dans un déluge d’informations contradictoires, l’empêche de prendre de la distance, de penser et de réagir.
Ce n’est jamais sa faute
Le pervers narcissique utilise le déni pour nier la responsabilité de ses actes. Il est incapable d’avouer ses torts, ne se remet jamais en question et se fait passer, au contraire, pour la victime. "Le problème vient toujours des autres, pour lui", confirme Johanna Rozenblum.
Il isole sa victime pour mieux la contrôler
Le pervers narcissique fait tout pour garder sa victime auprès de lui, l’empêcher de prendre conscience de l’anormalité de la situation et conserver son emprise. Il a besoin de proximité et d’un lien qui soit difficile à rompre, comme un lien de subordination, un lien parental, filial, ou encore amoureux. Il utilise ces liens pour assujettir l’autre.
L’angoisse de la perte
Perdre le pouvoir acquis est impensable pour le pervers narcissique. Lorsqu’il obtient une admiration totale de la part de sa victime, il ne veut pas qu’elle puisse reprendre le dessus et le quitter. Pour éviter de souffrir d’une perte, il dévalorise sa victime d’une part, la rendant moins importante à ses yeux, et il lui ôte d’autre part toute confiance et toute ressource pour s’en aller.
Il utilise une tierce personne pour parvenir à ses fins
Le pervers narcissique peut utiliser d’autres personnes pour soulager ses pulsions, comme les collègues de son souffre-douleur, par exemple. Ces derniers auront tout intérêt à participer à la dévalorisation s’ils ne veulent pas perdre leur place. Le pervers narcissique se voit alors renforcé dans son action.
Comment le pervers narcissique crée-t-il son emprise ?
La réponse de Johanna Rozenblum, psychologue clinicienne :
"Au début de la relation, il donne le sentiment de nous comprendre et de savoir mieux que quiconque répondre à nos besoins et à nos attentes. C’est le prince charmant, le sauveteur. Le sentiment évolue jusqu’à la dépendance affective. On a l’impression qu’on ne peut pas vivre sans lui : c’est la prise au piège. Mais l’idéal promis n’arrive jamais, et on est peu à peu fragilisé par des remarques, des dévalorisations, des humiliations, parfois des violences physiques".
Langage corporel : certains gestes trahissent les pervers narcissiques
Lors de sa phase de séduction
Durant la phase dite de séduction, tout a l’air merveilleux, en tout cas c’est ce qu’on essaie de vous faire croire. "Le langage corporel sera donc plus charmeur, avenant...", décrit Annabelle Boyer. "À moins d’être formé, vous ne verrez pas grand-chose de révélateur. Ils sont très difficiles à détecter dans cette phase, car le cerveau de la personne visée ne voit généralement pas grand-chose. Pour cause, le pervers narcissique flatte l’ego, complimente, répond aux besoins, écoute et échange..."
Selon l’experte, "il aura donc un langage corporel attentif : il vous regarde beaucoup, détourne peu le regard, se tient près de vous et trouvera un moyen de toucher l’avant-bras ou le bras pour créer un contact. Les jambes sont aussi croisées vers vous."
Les signes de menaces existent également, mais ils sont difficiles à percevoir, car "comme le cerveau réagit à l’attention positive que vous donne l’autre, un biais cognitif de confiance s’installe."
Voici une liste non-exhaustive certains signes révélateurs selon Annabelle Boyer :
- L’ensemble du corps est dirigé vers vous de façon faussement nonchalante ;
- Il y a une défocalisation active. Autrement dit, il ne clignent pas des yeux, même lorsqu’il changent de direction son regard ;
- Il y a moins de clignements de paupières, voire très peu ;
- Il est très rigide : c’est notamment visible à travers le tronc cérébral visible par une moins grande mobilité de la tête ;
- Il est davantage contracté au niveau de certaines articulations si vous posez des questions ouvertes ;
- Il fait des microexpressions du visage (très difficile à voir pour un néophyte) ;
- Le blanc du bas de l’œil (Sampaku) est visible lors des questions ouvertes de dévoilement.
Quand il se révèle
Dans les phases 3 et 4, le langage corporel devient plus franc et plus agressif. Il vous sera donc plus facile de détecter les signes d’alertes. Il est très probable que vous perceviez les mêmes gestes que ceux évoqués précédemment, mais d’autres indices seront identifiables.
Parmi eux, on trouve :
- Une rigidité de la cheville lorsqu’il croise les jambes ;
- L’axe rotatif est droit ;
- L’axe sagittal est supérieur ;
- Une rigidité des poignets ;
- Il a tendance à utiliser certains gestes orientés vers sa poitrine (zone de l’ego) ;
- Il utilise quelques gestes d’attaque (ex. : pointer du doigt) ;
- Il a tendance à prendre beaucoup d’espace autour de lui lorsqu’il est assis (expego) ;
- Sa poignée de main est plus rigide. Par ailleurs, la deuxième main entoure également le poignet ou le coude de façon ferme et un peu plus longue ;
- Il a tendance à éloigner les objets devant lui sur la table et les tasser sur le côté.
Quand votre propre langage corporel trahit le pervers narcissique
Si vous n’arrivez pas à observer l’autre, peut-être parviendrez-vous plus facilement à déceler ce que votre corps essaie de vous dire . "Votre propre langage corporel, lui, sera parlant tout au long des quatre phases de la relation", révèle Annabelle Boyer. "En effet, l’inconscient perçoit la menace et cherche à se protéger", souligne l’analyste.
Voici les différents gestes auquel vous devez être attentif :
- Vous croisez davantage vos jambes, et ce, à l’opposé de votre partenaire ;
- Vous avez davantage de mains en prise (mains qui s’agrippent l’une à l’autre). Elles sont plutôt basses et immobiles ;
- Vous déglutissez plus souvent ;
- Vous avez une baisse de température dans les extrémités (doigt, pieds…) ;
- Vous avez l’impression que votre cerveau ne parvient pas à traiter l’information aussi rapidement que d’habitude ;
- Votre respiration est plus courte en haut de votre poitrine ;
- En position assise, vous avez tendance à mettre les pieds sous la chaise.
Quelles sont les causes de cette perversion ?
Elles sont complexes et mal connues. Certains spécialistes estiment qu’il faut aller chercher les causes de la perversion narcissique dans une enfance dysfonctionnelle.
- Un manque d’affection dans l’enfance.
- Un manque de reconnaissance des besoins ou des peurs exprimés par l’enfant.
- Un abus émotif ou de la négligence de la part des parents.
- Une pression excessive ou des attentes démesurées.
- De la manipulation de la part des parents.
Si, dans les faits, beaucoup de pervers narcissiques semblent avoir manqué d’amour dans leur enfance ils peuvent aussi avoir été des enfants-rois.
Qui sont les personnes à risques de devenir manipulateur narcissique ?
Les personnes ayant vécu des déséquilibres affectifs dans leur enfance semblent plus à risques de devenir des pervers narcissiques. Les hommes seraient également plus touchés, même si le pervers narcissique peut aussi très bien être une femme.
Le test d’évaluation du trouble de personnalité narcissique
À la mode, l’étiquette de pervers narcissique est passée dans le langage courant de manière parfois abusive. La perversion narcissique fait l’objet d’une codification psychiatrique précise. Le trouble de la personnalité narcissique entre dans la classification des troubles de la personnalité décrits dans le Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux (DSM), ouvrage de référence des psychopathologies. Il fait partie du groupe B des troubles "dramatiques, émotionnels ou erratiques". Le trouble de la personnalité narcissique se caractérise notamment par un besoin d'être admiré et un manque d'empathie. Il est possible de trouver sur internet des tests, adaptés des critères du DSM, pour dépister une personnalité perverse narcissique.
Photo : tableau représentant Narcisse
©Richard Rappaport - CC- Licence : https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.en
Pervers narcissique : comment repère-t-il sa victime ?
N’importe qui peut se trouver sur le chemin d’un pervers narcissique. Ce n’est pas une question d’intelligence, ni de force mentale. Si une proie tombe dans ses filets, c’est parce qu’il est particulièrement difficile à démasquer. Il possède des qualités indéniables, dont il se sert pour manipuler, et il est aussi très doué pour découvrir et exploiter les failles de sa victime. Les personnes les plus sensibles constituent cependant des victimes particulièrement faciles à asservir.
Les personnalités empathiques
Elles cherchent à se mettre à la place de leur bourreau, et pardonnent facilement au pervers narcissique ses critiques et ses comportements. La victime aura tendance à croire qu’elle est à l’origine du problème.
Les personnes qui manquent de confiance en elles
Elles sont facilement atteintes par les critiques et les attaques du pervers narcissique. Dévalorisées, elles ont aussi le plus grand mal à s’extraire de ce piège.
Les personnes qui souffrent d’un manque affectif
La dépendance affective est encore plus aisée à mettre en place chez ces personnes. Elles s’attachent rapidement et complètement, et ne peuvent se résoudre à quitter l’individu dont elles sont totalement dépendantes.
Comment se libérer d’un manipulateur ?
La première étape est la prise de conscience. Ensuite, plusieurs actions permettent de sortir du piège.
Renouer avec ses proches
Sortir de l’isolement est essentiel pour retrouver de la confiance en soi et prendre de la distance. Il faut expliquer les événements et ne pas hésiter à demander de l’aide. C’est dans ce nouvel équilibre que la personne puisera la force de s’en sortir.
Cesser de se justifier
Le pervers narcissique se sent en position de force lorsque l’on se justifie. Il faut oublier les réponses telles que "je n’y suis pour rien", ou "ce n’est pas vrai". La vérité importe peu au pervers narcissique. À la place, il est possible de lui demander de préciser son accusation, et de répondre finalement qu’il a le droit d’avoir son avis et de croire ce qu’il veut.
Ne plus montrer ses émotions
Les pleurs et les cris nourrissent le pervers narcissique qui obtient alors ce qu’il veut. Au contraire, une réaction de calme le déstabilise. On doit respirer profondément avant de lui répondre ou lui opposer le silence.
Noter les faits
Garder une trace écrite permet de se couvrir, mais aussi de se rassurer sur l’impression de paranoïa induite par le pervers manipulateur. Cela peut prendre la forme d’une confirmation par e-mail, par exemple, dans le cas d’une relation professionnelle.
Oser le détester
Cesser de culpabiliser, et détester enfin son bourreau permet d’entamer le travail de deuil salutaire. Il faut arrêter de chercher à comprendre le pervers narcissique et de lui trouver des excuses.
S’éloigner
La seule façon de régler le problème définitivement est de couper court à la relation en s’éloignant définitivement. Inutile de provoquer une nouvelle crise : le départ doit être préparé et effectué dans la discrétion.
Chercher une aide auprès d’un psychothérapeute
On ne sort pas indemne d’une relation avec un pervers narcissique, et un psychothérapeute peut être très utile pour se reconstruire.
Comment se protéger des personnes toxiques ?
La réponse de Johanna Rozenblum, psychologue, clinicienne :
"Les personnes qui ont une mésestime d’elles-mêmes et cherchent de la reconnaissance chez l’autre sont davantage susceptibles de tomber dans le jeu du pervers narcissique. Effectuer un travail psychothérapeutique peut aider à se protéger des profils toxiques et, à l’avenir, à mieux les reconnaître".
Quels risques en restant avec un pervers narcissique ?
Rester avec un pervers narcissique fait encourir de gros risques : se couper de son entourage jusqu’à l ’isolement total, et subir une destruction de son intégrité psychique. Le pervers narcissique ne changera pas. Il est incapable de se remettre en question, car les autres ont forcément tort.
Thérapies pour aider le pervers narcissique
Les troubles de la personnalité narcissique sont souvent difficiles à soigner, car la personne ne reconnaît pas son problème. Dans de rares cas, elle peut chercher à entreprendre un travail psychologique après de très nombreux échecs relationnels. Plusieurs thérapies peuvent alors être entreprises :
- Une thérapie familiale, dans laquelle les membres de la famille peuvent explorer les conflits et les problèmes relationnels.
- Une thérapie de groupe, qui consiste à se trouver en présence d’autres personnes ayant le même problème pour échanger.
- Une thérapie individuelle. Sur le long terme, elle vise à restructurer la personnalité et à apprendre à entretenir de meilleures relations avec les autres.
DSM V, Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux, American Psychiatric Association.
Merci à Annabelle Boyer, analyste du langage corporel et du comportement manipulateur et auteure de Relations sous emprise