La pénurie de médicaments qui frappe la France est loin d’être terminée. Pour rappel, l’Agence nationale de sécurité du médicament estime que plus de 1 200 traitements et vaccins seront concernés par des situations de rupture ou tensions d’approvisionnement cette année.
Si cette situation a déjà provoqué la colère de nombreux patients, en attente de traitement, elle inquiète également les professionnels de santé. Un collectif de 26 médecins et professeurs hospitaliers vient de publier une tribune dans le Journal du dimanche, appelant à une “relocalisation de la production” des médicaments en Europe. Ils proposent plusieurs solutions concrètes.
Ces médecins veulent que “soit rapatriée en Europe la production des principes actifs”
Comme nous l’avons expliqué dans un précédent article, plusieurs facteurs peuvent expliquer ces pénuries. Parmi eux, l’éloignement des sites de production, souvent basés en Asie ou aux États-Unis. Un même médicament peut aussi voir sa chaîne de production dispersée : le principe actif est fabriqué dans un premier pays, la conception du traitement a lieu dans un second et son emballage est encore confectionné ailleurs. Avec des usines qui travaillent en flux tendu et des contrôles très rigoureux, le moindre problème de qualité engendre nécessairement des retards de production.
Dans le JDD, le professeur Jean-Paul Vernant et un collectif de médecins hospitaliers expliquent que les laboratoires pharmaceutiques - “qui font le travail de façonnier” en ajoutant des excipients au principe actif pour donner sa forme finale au traitement - “résident pour la plupart en Occident”. Mais “la production des principes actifs de 80 % des médicaments passés dans le domaine public a été depuis plusieurs années, pour des raisons de moindre coût, délocalisée en Inde et en Chine”.
Ces professionnels de santé demandent à ce que “soit rapatriée en Europe la production des principes actifs”, rappelant qu’ils “y étaient encore fabriqués il y a une quinzaine d’années”. D’après eux, “le coût du principe actif ne représentant qu’une très faible part du produit fini, cette relocalisation ne devrait pas pénaliser significativement le prix des médicaments”.
Des stocks de “médicaments d’intérêt thérapeutique majeur” pour prévenir les pénuries
Ils réclament également la constitution de stocks de “médicaments d’intérêt thérapeutique majeur”, afin de prévenir toute pénurie et “ses conséquences pour les malades”. Car ces derniers sont “les premières victimes” des ruptures de stock, qui concernent “des médicaments du cancer, des antibiotiques, des corticoïdes, des vaccins, des traitements de l’hypertension, des maladies cardiaques, du système nerveux…”. Ainsi, plusieurs patients ont été contraints d’interrompre leur traitement, au risque de réduire leurs chances de s’en sortir.
Les signataires de la tribune soutiennent également la création d’un “établissement pharmaceutique à but non lucratif, si possible européen”, qui permettra “de prévenir les pénuries et sera la garante de la qualité des médicaments et de prix justes et pérennes”.
TRIBUNE. Pénurie de médicaments : "Il faut relocaliser la production en Europe", JDD, 17 août 2019.
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