Médicament : vous pouvez améliorer leur efficacité grâce à la chronothérapie ?

Prendre des médicaments à une certaine heure pourrait améliorer l'efficacité et réduire les effets indésirables. C’est ce qu’on appelle la chronothérapie. L’objectif de cette approche est "d’administrer un médicament donné au meilleur moment de la journée (ou de la nuit), en fonction de sa cible et des rythmes biologiques qui lui sont associés", explique l’Inserm. "En s’y prenant bien, il devient alors possible d’augmenter l’efficacité d’un traitement."

Qu’est-ce que la chronothérapie ?

La chronothérapie repose sur le principe du rythme circadien, qui se répartit sur 24 heures. En effet, presque toutes les fonctions de notre organisme sont soumises à ce cycle. "Tout au long de la journée et dans chacun de nos organes, nos cellules adaptent leur activité au programme dicté par l’horloge interne nichée dans notre cerveau", révèle l’Inserm. "C’est pour cette raison que notre niveau d’éveil, l’intensité de nos contractions intestinales ou encore notre température corporelle varie en fonction de l’heure."

Par conséquent, selon les experts, le rythme circadien n’est pas sans conséquence sur l’efficacité de certains médicaments. "Il est, en effet, bien établi que ces oscillations circadiennes peuvent modifier la sensibilité de nos cellules à certaines molécules thérapeutiques." Autrement dit, en fonction de l’heure à laquelle vous prenez un médicament, celui-ci pourrait être plus efficace, car vos organes seront plus réceptifs.

Cancers : la chronothérapie utilisée pour optimiser la chimiothérapie

La chronothérapie est notamment utilisée pour mieux optimiser la chimiothérapie. En effet, alors que ce type de traitement s’attaque aux cellules cancéreuses, ils sont également toxiques pour les cellules saines. "Ils entraînent dès lors des effets secondaires, parfois redoutables", indique l’Inserm. "Des scientifiques ont donc eu l’idée de rechercher le moment où les cellules saines d’un patient sont le moins sensible possible aux molécules de chimiothérapie antitumorale."

La chronothérapie pourrait donc devenir un moyen de mieux soigner les cancers en augmentant les doses de chimiothérapie tout en minimisant les effets secondaires. Néanmoins, cette approche pourrait être compliquée à généraliser. "L’heure optimale pour administrer une chimiothérapie varie largement d’un patient à l’autre, en fonction de son sexe, mais aussi de spécificités génétiques."

Chronothérapie : une approche qui pourrait être efficace dans d’autres domaines

Cette nouvelle approche se développe notamment en cardiologie ou dans la prise en charge de maladies inflammatoires tels que l’asthme ou les rhumatismes. "Sachant que la majorité des gènes dont l’activité est soumise au rythme circadien sont déjà la cible de médicaments (...), cette stratégie a de beaux jours devant elle", révèle l’Inserm.

Une méthode qui améliore les traitements contre les crises d'épilepsie

Par ailleurs, en novembre 2020, l’Inserm mettait déjà en avant la chronothérapie pour traiter les crises d'épilepsie. "Elles peuvent survenir à des heures très variables de la journée, mais chez un même individu, elles se manifestent le plus souvent à des moments privilégiés", écrivent les chercheurs.

Néanmoins, à ce jour, les traitements contre l’épilepsie ne s’attaquent pas aux causes de la crise. "En identifiant les gènes et protéines clés exprimés dans les moments favorables au déclenchement de la crise, on peut imaginer le développement de nouveaux traitements les ciblant, qui seraient administrés au patient selon l’heure à laquelle il est le plus vulnérable", recommandent les experts de l’Inserm.

La chronothérapie pourrait améliorer l’efficacité des traitements antalgiques

Alors que le rythme circadien régule notamment le sommeil, la température corporelle, la pression artérielle, la fréquence cardiaque, l’humeur ou encore la mémoire, l’intensité de la douleur serait également contrôlée par cette horloge circadienne interne. En effet, une équipe de chercheurs de l’Inserm situé à Lyon montre que "l’intensité de la douleur suit une courbe sinusoïdale sur 24 heures, avec une intensité maximale entre 3 et 4 heures du matin, et minimale autour de 15 et 16 heures l’après-midi. Le tout, indépendamment du comportement et de tout facteur extérieur de l’environnement."

C’est pourquoi, les chercheurs recommandent la chronothérapie pour les traitements antalgiques. "Tout comme la chronothérapeutique du cancer a fait ses preuves (...) adapter un traitement antalgique selon le même procédé, en tenant compte du rythme biologique de chaque individu, pourrait accroître son efficacité tout en réduisant la dose nécessaire et les potentiels effets indésirables", indiquent les experts dans cette étude. "Mais cette hypothèse reste à valider par des essais cliniques avant de pouvoir proposer cette approche chronobiologique aux patients."

Chronothérapie : les médicaments contre l'hypertension plus efficaces le soir ?

Il est démontré que la tension artérielle est caractérisée par une pression maximale le matin dès le lever, une baisse de la pression artérielle en début d’après-midi, une remontée en fin de journée et, enfin, un abaissement pendant le sommeil avec une pression artérielle au plus bas aux alentours de deux heures du matin. La pression artérielle commence ensuite en général à remonter dans les heures qui précèdent le réveil. Pourtant, les personnes hypertendues sont nombreuses à ne pas constater de baisse de leur tension artérielle la nuit, d'où l'idée d'instaurer une prise de médicaments antihypertenseurs le soir au coucher. Plusieurs études, notamment relayées par la Revue médicale suisse, démontrent en effet que l’administration le soir d’au moins une molécule antihypertensive, et éventuellement d’une faible dose d’aspirine, peut améliorer le contrôle de la pression de nuit, restaurer le profil jour/nuit et réduire le niveau de risque d'hypertension.