C’est peu dire que la chirurgie de l’obésité, ou chirurgie bariatrique, a le vent en poupe en France : la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) a indiqué dans un rapport de 2018 que le nombre d’interventions recensées chaque année avait été multiplié par plus de 20 entre 1997 et 2016. Ce chiffre annuel est ainsi passé de 2800 à 59 300.
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Il existe deux types de chirurgie de l’obésité : la réduction de l’estomac et les techniques “malabsorptives” (il s’agit ici de diminuer l’assimilation de ces aliments par l’organisme). Parmi les techniques de réduction de l’estomac, on pratique surtout l’anneau gastrique ajustable et la sleeve. Les techniques “malabsorptives” concernent quant à elles le bypass gastrique et la dérivation biliopancréatique.
Ce sont ces opérations sur lesquelles la Haute autorité de santé (HAS) a mis en garde le 29 février 2024. La chirurgie de l’obésité “doit intervenir en dernier recours et ne doit pas être pratiquée chez l'enfant sauf cas exceptionnels. Elle implique une préparation de six mois au minimum, un suivi régulier spécifique après l’intervention et un suivi à vie de l’état de santé tout en maintenant les modifications des habitudes de vie”, assure la HAS. Un suivi auquel trop peu de patients ont accès, poursuit l’agence : “Aujourd’hui seuls 50% des patients opérés bénéficient d’un suivi à deux ans. Après cinq, 10, 15 ans, ce pourcentage diminue.”
La chirurgie bariatrique est donc loin d’être une solution miracle. Elle n’est pas ailleurs pas exempte de risques. “Il existe un risque osseux avec un sur-risque fracturaire à long terme pour les chirurgies malabsorptives. On découvre des risques émergents de la chirurgie avec un sur-risque de mortalité par suicide ou de tentatives de suicide et une forte vulnérabilité vis-à-vis du mésusage d’alcool”, indique la Société française d’endocrinologie (SFE).
Chirurgie bariatrique : peu de données disponibles sur les conséquences à long terme
La SFE poursuit : “Certains risques restent potentiels, notamment le risque carcinologique induit par le reflux acide de la sleeve gastrectomie et le reflux biliaire du bypass gastrique en oméga”, De plus, peu de données scientifiques sur les conséquences à long terme et à très long terme de la chirurgie de l’obésité sont disponibles, déplore la société.
Enfin, cette chirurgie repose sur une approche fortement discriminatoire. C’est ce qu’expliquait au journal 20 Minutes en 2021 la militante Daria Marx, fondatrice du collectif Gras politique et co-autrice de l’essai Gros n’est pas un gros mot (Flammarion, 2018): “Les femmes forment 80% des personnes opérées par chirurgie bariatrique, alors qu’il y a autant d’hommes obèses que de femmes obèses. Et les femmes sont opérées à un IMC inférieur que celui des hommes. Cela veut bien dire que la pression sur le corps de la femme grosse est multipliée.”
Obésité : “Un simple regard peut parfois affecter la relation médecin-patient”
Pour toutes ces raisons, la HAS recommande, plutôt que d’opter pour la chirurgie bariatrique, de se faire accompagner par un médecin pour changer durablement son mode de vie (“alimentation, activité physique du quotidien, sédentarité, rythmes de vie, etc”). Encore faut-il que l’ensemble des professionnels de santé soient bienveillants vis-à-vis des personnes obèses, ce qui est pour le moment loin d’être le cas.
“Nous le savons, un simple regard peut parfois affecter la relation médecin-patient, tout comme le choix des mots et l’environnement dans lequel il est reçu. Il est essentiel d’adopter une posture de non-jugement et d’écoute vis-à-vis des personnes en surpoids ou en obésité”, conclut le professeur Lionel Collet, président de la HAS.
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