

L’année 2024 a été marquée par la pluie et un ensoleillement très limité. Du jamais vu depuis plus de 30 ans, selon Météo-France. "Les précipitations, abondantes et régulières, ont été excédentaires sur la majeure partie du pays. Les cumuls mensuels ont dépassé une fois et demie la normale en février, mars, mai, septembre et octobre 2024", constate Météo-France dans un bulletin. Une grisaille encore bien présente malgré le redoux de ces derniers jours, qui plombe à la fois le ciel et le moral des Français.
Il fait gris
La quasi-totalité des grandes villes de France a affiché un déficit en lumière. Celui-ci a atteint près de 15 % par endroit. Le ciel est resté gris près d’un jour sur deux sur la moitié nord du pays. Seuls le pourtour méditerranéen et la Corse ont pu profiter d’un ensoleillement proche de la normale. "Le soleil a brillé 2 944 heures à Marignane, dans les Bouches-du-Rhône, mais seulement 1 509 heures à Paris", précise la station de météorologie française.
Ce déficit en luminosité peut devenir un vrai poison pour notre santé, avec des conséquences à la fois psychologiques et physiologiques : troubles dépressifs, fatigue, prise de poids… toutes les dimensions de l’organisme sont touchées.
Dépression saisonnière
En cause : le dérèglement de l’horloge biologique, plus connu sous le nom de cycle circadien. "La lumière stimule les cellules de la rétine et envoie des signaux électriques à notre horloge interne pour donner un rythme à tout l’organisme et le faire fonctionner correctement", explique au Monde Armelle Rancillac, chercheuse spécialiste du sommeil à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale et au Collège de France.
Cette horloge biologique, située dans l’hypothalamus une partie de notre cerveau, est très sensible à la lumière. Elle synchronise notre organisme avec les variations journalières de notre environnement. "L’hiver, la grisaille met ce système à rude épreuve", explique à MediSite Marie-Victoire Chopin, docteure en psychologie à l’AP-HP Sorbonne Université DMU Neurosciences.
Luminothérapie
Le manque de luminosité agit également sur les hormones. La production de mélatonine, une molécule synthétisée dans le cerveau pour aider à s’endormir, va être augmentée, d’où l’augmentation de la fatigue et l’envie de se jeter dans les bras de Morphée. Quant à la sérotonine, l’hormone du plaisir, son taux baisse durant les jours de mauvais temps.
Autre impact : le manque de vitamine D. "Lorsqu’elle est exposée aux rayonnements ultraviolets du soleil, la peau produit de la vitamine D3, un précurseur de la vitamine D que l’organisme convertit ensuite en vitamine D active", explique l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un communiqué.
Alors, comment puis-je supporter le mauvais temps en attendant le printemps ? Voici des conseils de spécialistes.
S'exposer à la lumière du jour

"Il faut s’exposer à la lumière du jour, notamment le matin, et même s’il ne fait pas beau, car l’intensité lumineuse reste nettement plus importante à l’extérieur qu’à l’intérieur", explique au Monde Armelle Rancillac.
Faire du sport à l'extérieur pour sortir de la dépression

L'activité physique et la pratique sportive diminuent le niveau de stress, améliorent l'estime de soi, réduisent l'anxiété et ont un effet sur la régulation de l'humeur en favorisant la sécrétion des hormones du plaisir, comme la dopamine et la sérotonine.
Lutter contre la dépression en mangeant sainement

"Notre alimentation constitue une source d’approvisionnement en vitamine D, principalement via la consommation de poissons, d’œufs et de fromages qui contiennent de la vitamine D2 (ou ergocalciférol)", indique l'Inserm dans un communiqué.
Les oméga-3 peuvent aider à améliorer l'humeur et à chasser la dépression en réduisant l'inflammation et le stress oxydatif, et en régulant les voies des neurotransmetteurs ainsi que la signalisation cellulaire. Les poissons gras comme le saumon, les sardines, le maquereau, le hareng, les anchois, ainsi que les huîtres et l'huile de foie de morue sont d'excellentes sources d'oméga-3. Pour les végétariens, les noix, l'huile d'algues, les graines de chanvre, de lin ou de chia sont une alternative.
Des recherches ont démontré que de faibles niveaux de vitamine B6 et de folate sont liés à des troubles de l'humeur comme la dépression. Les haricots et les lentilles sont riches en zinc, en magnésium, en sélénium et en fer non héminique, des éléments reconnus pour influencer positivement l'humeur.
Les amoureux du chocolat noir seront ravis : une étude menée en Corée auprès de 18 adultes révèle que la consommation quotidienne de 30 g de chocolat noir à 85 % de cacao pendant trois semaines chasse la mauvaise humeur.
Avoir des interactions sociales pour combattre la dépression

Des études scientifiques ont démontré que l’isolement social est associé à un risque accru de troubles mentaux. À l’inverse, les relations sociales constituent un facteur de protection de la santé mentale.
Garder un rythme circadien, un remède

"Nous sécrétons notre pic de cortisol 30 à 45 minutes après le réveil, ce qui nous permet de bien commencer la journée. Avec un réveil à 7 ou 8 heures du matin, la chute de cette hormone se situe vers 2 à 4 heures du matin. Si l'on décale notre heure de coucher, cela entraîne des perturbations des rythmes circadiens, notamment en modifiant les niveaux d’hormones, et cela crée des décalages qui, à terme, affectent notre santé", explique à MediSite la Dr Marie-Victoire Chopin.
Prendre des compléments alimentaires

"En cas de déficit d’ensoleillement, d’impossibilité de s’exposer suffisamment, ou encore chez les personnes dont l’organisme synthétise moins bien la molécule, un coup de pouce peut s’avérer nécessaire", précise l'Inserm dans un communiqué. Cependant, l'institut met en garde contre la prise de compléments alimentaires : elle doit être suivie par un médecin généraliste. "Une supplémentation excessive peut conduire à un taux de calcium dans le sang trop élevé, avec des conséquences notamment cardiologiques et rénales. Un excès de vitamine D peut aussi engendrer des maux de tête, des nausées, des vomissements, une perte de poids ou encore une fatigue excessive."
Se balader en pleine nature

En 2021, Cecil Konijnendijk, chercheur néerlandais en foresterie urbaine, a émis la règle des "3-30-300" pour une bonne santé mentale : pouvoir voir au moins trois arbres depuis son domicile, son travail ou son école ; bénéficier d’au moins 30 % de surface arborée dans son environnement immédiat ; et ne pas habiter à plus de 300 m d’un espace vert accessible. Une théorie confirmée par une équipe de recherche espagnole dans une étude publiée en 2022 dans la revue ScienceDirect.