Vous vous êtes fait opérer ces dernières semaines ou ces derniers mois ? L’opération s’est bien passée mais vous souffrez depuis de douleurs persistantes ? Il s’agit peut-être de douleur chronique post-opératoire (DCPO), une douleur qui n’est pas liée à une complication chirurgicale. Ce n’est pas non plus une douleur qui existait avant l’opération. 

A l’occasion du congrès annuel des médecins-anesthésistes qui s’est tenu à Paris en septembre 2024, Medscape, un journal en ligne dirigé et destiné aux médecins revient sur la DCPO et sur ce qui s’est dit lors du grand rassemblement de ces spécialistes. L'occasion de comprendre les grandes lignes de ces douleurs spécifiques. 

Qu’est-ce que la douleur chronique post-opératoire (DCPO)

Les médecins estiment que l’on peut parler de DCPO quand la douleur dure depuis plus de trois mois et que les bilans radiologiques et biologiques (réalisés en post-opératoire) sont normaux (on ne peut donc pas relier la douleur à une quelconque infection). 

« Sur les 10 millions de patients opérés par an en France, on considère qu’environ 10 % vont développer des douleurs chroniques post-opératoires, soit 1 200 000 patients » a exposé le Dr Cyril Quémeneur, spécialiste en anesthésie et douleur (CHU Pitié-Salpêtrière, Paris).

Un problème en constante augmentation (et qui ne risque pas de s’atténuer avec le vieillissement de la population) qui suit la croissance des opérations chirurgicales en France. 

Des douleurs difficiles à identifier et à traiter

A quoi sont dues ces douleurs ? Généralement à une lésion nerveuse qui a lieu pendant la chirurgie.

Malheureusement, rappelle la Professeure Valéria Martinez, médecin-anesthésiste à l’hôpital Raymond Poincaré de Gaerches (92), une fois installée, ces douleurs sont difficiles à traiter car pas toujours connues (y compris par le patient ou le médecin).

Ces douleurs peuvent être très invalidantes par leur intensité, leur chronicité et les répercussions sur la qualité de vie. Ces douleurs sont encore peu reconnues. Elles sont à l’origine d’une grande errance diagnostic, d’une multiplication de consultations et d’examens, et parfois à l’origine de reprises chirurgicales non bénéfiques.” 

C’est d’autant plus ennuyeux que le temps est un élément clé ici : plus le problème est pris en charge tôt, meilleures sont les chances de réussite

Des structures dédiées à la douleur chronique trop peu nombreuses en France ?

Une douleur chronique, qu'elle soit port-opératoire ou pas, demande une prise en charge particulière, pour éviter la sur-médication. Idéalement, dans un centre de le douleur dédié. 

« On dispose aujourd’hui de 275 structures dédiées à la douleur chronique sur le territoire, en capacité d’accueillir entre 300 000 et 400 000 patients. Sachant que la pose de prothèse de genou – dont l’incidence est en forte augmentation – entraîne des douleurs post-chirurgie chez 20 à 30 % des patients opérés, la question de la prise en charge de ce type de douleurs va le devenir encore plus à l’avenir », explique encore le Dr Cyril Quémeneur. 

C’est trop peu. D’où l’importance de mettre en place des protocoles  pour améliorer la situation de tous ceux qui sont confrontés aux douleurs post-opératoires. 

Douleurs post-opératoires : les 3 solutions avancées par les spécialistes  

Prévenir (quand cela est possible) et mieux soigner la DCPO, voilà tout l’enjeu aujourd’hui. Les médecins ont ainsi répertorié plusieurs pistes :

  • Identifier les patients les plus à risque de douleurs post-chirurgie dès la consultation d’anesthésie, de façon à les suivre dans la période post-opératoire.
  • Repérer les chirurgies les plus à risques. Toutes les opérations chirurgicales ne sont pas pourvoyeuses de DCPO. Les plus à risques sont la chirurgie du sein (mastectomie), la chirurgie thoracique et du rachis, les amputations ou encore la pose de prothèse de genou. Plus étonnant, la chirurgie en cas de hernie inguinale (grosseur au niveau de l’aine), pourtant très courante, provoque régulièrement des douleurs chroniques. On estime que 10% des opérés sont touchés.
  • Catégoriser les douleurs. La DCPO se distingue d’autres formes de douleurs (comme la douleur aiguë, celle que l’on ressent quand on nous marche sur le pied). Ici, on parle plus de sensation de brûlure, de décharge électrique, de fourmillement ou d’engourdissement. 

Les opioïdes augmentent le risque de douleur post-opératoires 

Dernière information essentielle recueillie pendant ce congrès : le rôle des médicaments antidouleur, notamment les opioïdes, dans la survenue des DCPO. Quand ils sont pris avant l’opération (pour une autre pathologie par exemple), ils augmentent notablement le risque de DCPO.

Mieux vaut donc, d’après les médecins, trouver d’autres alternatives, de manière à ce que la réponse à la douleur ne soit pas uniquement médicamenteuse.

Les spécialistes prônent également une meilleure sensibilisation des malades et des médecins généralistes sur ces problématiques de douleurs chroniques post-opératoires et vous invitent si vous êtes touchés à en parler avec un médecin de la douleur (algologue).