Prostate: les réponses du Dr Hervé Baumert
Sommaire

Que pensez vous de la curiethérapie à la place de l'ablation totale de la prostate, peut de personne ne parle de cette solution pourquoi?

La curiethérapie fait partie des traitements validés du cancer de la prostate. Ce traitement donne de bons résultats à condition que des critères stricts soient respectés. Le patient doit présenter une petite prostate (inférieure à 50 grammes), avoir un taux de PSA inférieur à 15, des cellules cancéreuses peu agressives avec un score de Gleason inférieur ou égal à 6, voire exceptionnellement un scores de Gleason à 7 (3+4) que le patient ne présente pas de trouble urinaire significatif, et que la tumeur soit strictement localisée au niveau de la prostate, ceci devant être confirmé par la réalisation d’une IRM prostatique.

Sur ces patients sélectionnés, ce traitement donne un taux de guérison comparable aux autres techniques. En revanche en cas de récidive, un traitement de cette récidive dit « de rattrapage » est délicat. C’est la raison pour laquelle par prudence, on ne préconise pas ce type de traitement chez les patients les plus jeunes. Cette technique a, en revanche, pour avantage d’être chez l’immense majorité des patients peu douloureuse et de permettre une bonne récupération de la fonction urinaire et érectile. A noter tout de même l’apparition de troubles de l’érection fréquents après quelques années.

J'ai un taux de PSA de 7,94 j'ai donc fait 2 échographies qui ont décele un adénome de la prostate, il n' y a eu aucune évolution en 2 ans de la grosseur et rien de spécial, mon médecin veut que je consulte un urologue vu l'augmentation de mon PSA qui est passé de 6,54 à 7,94? qu'en pensez vous?

Votre taux de PSA qui est élevé, supérieur à la normale (généralement de 4 ng/ml) peut être parfaitement lié à votre adénome de la prostate. Votre augmentation du taux de PSA justifie tout de même, comme le préconise votre médecin, de voir un urologue.

Un contrôle du PSA avec la réalisation d’un PSA total et PSA libre pourrait être réalisé dans votre situation ; le rapport entre le PSA libre et total permettant de s’orienter vers un adénome ou plutôt vers un cancer de la prostate.

Est-ce qu'un jet urinaire bifide est un signe de trouble prostatique?

La présence d’un jet bifide est généralement le signe soit d’un obstacle sur la prostate, soit d’un rétrécissement du canal de l’urètre. Une endoscopie permettrait de retrouver une cause de ce trouble généralement sans gravité.

A partir de combien de temps peut on retrouver une érection satisfaisante après une ablation totale de la prostate?

Cette récupération n’est possible que si le chirurgien a conservé un ou idéalement les deux nerfs érecteurs situés de part et d’autre de la prostate. Cette récupération peut être longue et peut nécessiter au maximum deux ans après l’intervention. En attendant des érections satisfaisantes, il est préconisé de stimuler la fonction érectile soit par la réalisation d’injections intra-caverneuses (piqûre dans la verge permettant des érections), soit en prenant régulièrement des médicaments en comprimé.

Plusieurs études ont montré que cette stimulation de la fonction érectile augmentait la probabilité de récupération.

Est-ce que l'adénome de la prostate a pour corollaire systématique l' inflammation de cette dernière ? 2 avis de médecins divergent sur la réponse.

L’inflammation de la prostate n’entraîne pas un adénome. En revanche, l’adénome de la prostate qui entraîne une mauvaise vidange vésicale peut favoriser les infections urinaires elles-mêmes à l’origine d’inflammation et d’infection prostatique.

En cas d'hypertropie bénigne de la prostate, que penser de l'intervention au laser (green ligth) plutôt que l'intervention classique (résection endoscopique trans urétrale) ? Y a-t-il moins de risque d'incontinence ou d'impuissance secondaire?

Les chirurgies au laser permettent de réduire le risque de saignement opératoire. Ceci permet ainsi de limiter le temps de sondage et la durée d’hospitalisation. Les risques d’incontinence et d’impuissance secondaires à cette intervention sont quasi nuls. En revanche, il est vraisemblablement préférable d’être opéré avec les dernières générations « de laser Green » manifestement plus efficaces que les premières générations.

J'aimerais savoir si l'opération de la prostate entraîne vraiment des troubles érectiles?

Tout dépend du type d’intervention. S’il s’agit d’une chirurgie pour un adénome de la prostate consistant à élargir le canal de l’urètre, cette intervention n’entraîne pas de trouble érectile. Il existe en revanche ce que l’on appelle une éjaculation rétrograde (remontée du sperme dans la vessie lors de l’éjaculation). Ceci ne change rien à l’orgasme perçu par le patient.

En revanche en cas d’ablation complète de la prostate, pour cancer (prostatectomie radicale), cette intervention risque de léser les nerfs érecteurs se trouvant de part et d’autre de la prostate. Si le cancer est limité, une conservation de ces nerfs peut être réalisée, notamment lorsque l’intervention est effectuée par des équipes entraînées. Chez les jeunes patients présentant des érections normales, la conservation bilatérale des nerfs érecteurs peut permettre une récupération chez 80% des patients.

J'aimerais aussi savoir si l'opération de la prostate peut entraîner des problèmes urinaires... Une incontinence...?

Là encore, il faut distinguer la chirurgie de l’adénome de la prostate, de celle du cancer de la prostate.

Il n’y a pas de risque d’incontinence lorsqu’on effectue une chirurgie pour un adénome (résection endoscopique classique ou au laser). En revanche en cas d’ablation complète de la prostate, la majorité des patients ont des fuites urinaires à l’effort temporaires. Une très forte proportion de patients récupère une continence normale dans les trois mois.

Une petite proportion de patients (environ 5%) peut garder quelques fuites minimes lors d’effort. Là encore, les résultats sur la récupération dépendent avant tout de l’expérience de votre chirurgien. Pour les patients présentant ces quelques fuites, des solutions médicales ou chirurgicales existent pour traiter ces incontinences résiduelles lorsqu’elles sont invalidantes.

Le toucher rectal est-il toujours nécessaire dans le dépistage du cancer de la prostate? Je n'ai pas du tout envie de m'y soumettre.

Oui, cet examen est nécessaire. En effet, il apporte des informations que ni le PSA, ni une échographie prostatique permettront d’obtenir. Cet examen permet notamment de sentir d’éventuels nodules de la prostate qui peuvent être cancéreux même si le dosage de PSA est normal.

Le cancer de la prostate est-il héréditaire?

Il existe effectivement une prédisposition génétique. L’existence d’un et surtout de deux cancers ou plus de la prostate au sein d’une même famille augmente de façon très significative ce risque.

Les dépistages nationaux sont de plus en plus décriés. Ils entraîneraient des chirurgies non nécessaires notamment. Qu'en pensez-vous?

Il existe effectivement une controverse sur l’intérêt du dépistage du cancer de la prostate. Il a pourtant été démontré que ce dépistage permettait de limiter le risque de mortalité par cancer de la prostate mais également d’évolution vers une maladie généralisée avec métastases osseuses. Ce dépistage précoce permet donc de limiter ces risques.

A l’opposé, il peut entraîner le diagnostic de cancer non évolutif qui a pu aboutir à des traitements inutiles. Pour éviter cela, la plupart des urologues proposent quand cela est réalisable de réaliser une simple surveillance active chez des patients porteurs d’un cancer peu évolutif. Cette surveillance évite le « sur-traitement ». Elle a également pour avantage de réagir rapidement si l’urologue constate que le cancer diagnostiqué chez les patients est agressif.

Ces protocoles de surveillance active sont très stricts. Il faut que le PSA soit inférieur à 10 ng/ml, qu’il y ait maximum trois carottes biopsiques positives, qu’aucune carotte biopsique ne retrouve de cellule cancéreuse sur plus de 3 mm, que le score de Gleason (score permettant d’évaluer l’agressivité des cellules) soit inférieur ou égal à 6.

Quel est le taux de rémission après une chirurgie pour un cancer de la prostate? A-t-on des chances de s'en sortir?

Le taux de guérison est de 90% lorsque la tumeur est bien limitée à la prostate, que les cellules ne sont pas anormalement agressives (score de Gleason inférieur ou égal à 7), et que le chirurgien est passé partout en zone saine. Ce taux de Gleason est en revanche moins bon quand la tumeur s’est développée en dehors de l’enveloppe prostatique (capsule).

Dans un pareil cas, une radiothérapie complémentaire peut être effectuée ce qui permet chez la majorité des patients lorsqu’elle est réalisée tôt pour obtenir des érections.

Le dépistage du cancer de la prostate fait polémique. Meurt-on beaucoup en France de ce cancer?

Le cancer de la prostate est le plus fréquent chez l’homme. Il touche environ un homme sur six entre 60 et 79 ans. Ce cancer est la deuxième cause de mortalité par cancer chez l’homme et la première après quarante ans. Environ 19 000 patients décèdent chaque année en France de cette pathologie.

Cette mortalité a diminué d’un tiers au cours des 20 dernières années, notamment grâce au dépistage permettant des diagnostics à des stades plus précoces donc plus facilement curables.

Mon mari ne veut pas entendre parler de dépistage du cancer de la prostate. Comment le convaincre?

Vous pouvez juste l’informer qu’il s’agit du cancer le plus fréquent chez l’homme, ce qui doit l’inciter à effectuer un tel dépistage. En revanche, ce dépistage n’est plus nécessaire au-delà de 70 ans. En effet, statistiquement lorsqu’un cancer localisé de la prostate est diagnostiqué chez un patient de plus de 70 ou 75 ans cela ne modifie pas son espérance de vie, raison pour laquelle ce dépistage n’est plus préconisé au-delà de cet âge.

J'ai eu des problèmes de prostate. Suis-je plus à risque de cancer prostatique?

Si vous entendez par problèmes de prostate : des troubles urinaires. Ils sont très vraisemblablement liés à un adénome de la prostate (pathologie bénigne). Cet adénome n’est pas un facteur favorisant de cancer. On ne peut cependant éliminer une origine cancéreuse à vos troubles urinaires. Il serait donc souhaitable que vous consultiez un généraliste et/ou un urologue.

J'aimerais savoir quels sont les premiers signes d'un cancer prostatique.

Le cancer de la prostate à un stade débutant, localisé donc curable, n’entraîne aucun trouble d’où la nécessité d’un dépistage. A un stade localement avancé, il peut entraîner du sang dans les urines et des troubles urinaires (jet faible, fréquent et pressant).

Ces troubles peuvent également être liés à un simple adénome de la prostate. A un stade généralisé, le cancer se développe sous forme de métastases osseuses entraînant des douleurs osseuses, voir des fractures y compris au niveau de la colonne vertébrale pouvant entraîner des paralysies irréversibles.

Certains sexologues disent que les femmes ont une prostate. Les hommes peuvent avoir des cancers du sein. Les femmes peuvent-elles avoir un cancer prostatique?

Non, la prostate est un organe exclusivement masculin. Cette pathologie n’existe donc pas chez la femme.

Quel est le poids normal d'une prostate à 55 ans ?

Une prostate normale pèse environ 20 grammes. Celle-ci augmente généralement en vieillissant. Cependant, il n’existe pas de corrélation entre le volume prostatique et les troubles de cette augmentation de volume peut engendrer.
L’augmentation du volume prostatique n’est donc pas un problème en soi. Seule l’existence d’une gêne urinaire et/ou d’une augmentation importante du PSA justifient une consultation spécialisée auprès d’un urologue.

Comment agissent les medicaments pour le traitement de l'adénome bénin de la prostate ? Est ce qu'ils diminuent l'adénome ou est ce qu'ils agissent sur d'autres facteurs ?

Il existe trois catégories de médicaments pour l’adénome de la prostate. Les plus fréquemment utilisés sont des alpha-bloquants. Il s’agit de médicaments qui relâchent les fibres musculaires présentes dans la prostate. Ce relâchement induit une ouverture du canal de l’urètre passant au centre de la prostate, favorisant ainsi un meilleur jet urinaire. Ces médicaments n’entraînent pas de diminution du volume de la prostate.

La deuxième catégorie est représentée par les inhibiteurs de la 5 alpha-réductase. Ces médicaments entraînent une diminution du volume prostatique d’environ 30%. Cette réduction s’accompagne d’une amélioration des troubles urinaires.
Enfin, les médicaments à type de phytothérapie pourraient avoir une action notamment sur les envies fréquentes et pressantes d’uriner. Ces médicaments ont l’avantage de ne pas induire d’effet secondaire. En revanche, leur efficacité réelle n’a pas été à ce jour démontrée.

Opéré d'une prostatectomie radicale sur adénocarcinome prostatique il y a 1 an, mes P PSA post opératoires et 6 mois après étaient à 0,01. Au bout d'un an elles sont à 0,02. Mon praticien me dit d'attendre > 0,07. Que dois je en penser?

Monsieur votre médecin a tout à fait raison. Il n’y a aucune urgence actuellement. On ne parle de récidive biologique que quand le PSA après prostatectomie radicale est supérieur à 0.20 ng/ml. Par ailleurs, il faut au minimum deux dosages successifs en augmentation pour confirmer cette récidive. Il n’y a pas lieu d’envisager de traitement avant ce taux et notamment une éventuellement radiothérapie complémentaire. Quelques glandes prostatiques non tumorales situées au contact de la vessie ont pu être laissées en place et entraîner cette légère sécrétion de PSA.

En ce qui concerne les traitements de ces récidives biologiques, il est exact qu’elles doivent être traitées tôt généralement pour des valeurs inférieures à 0.5 ng/ml. La période idéale pour envisager un tel traitement se situe donc entre 0.20 ng/ml et 0.50 ng/ml.

Quelle est la meilleure prévention contre le cancer de la prostate? Est-ce vrai qu'avoir plusieurs éjaculations éviterait le cancer de la prostate? Et prendre beaucoup de thé éviterait le cancer de la prostate?

L’effet protecteur de l’éjaculation répétée face au cancer de la prostate n’est absolument pas confirmé. Plusieurs études ne montrent aucune influence de ce facteur (référence JAMA april 2004 : 291 (13) : 1578-86). En revanche, la consommation de thé vert permet, grâce aux anti-oxydants qu’il contient, de limiter le risque de cancer de la prostate.

Notre Newsletter

Recevez encore plus d'infos santé en vous abonnant à la quotidienne de Medisite.

Votre adresse mail est collectée par Medisite.fr pour vous permettre de recevoir nos actualités. En savoir plus.

Partager :