Sur son site Internet, une pandémie survient "lorsqu’un nouveau virus grippal apparaît et se propage dans le monde entier, en l’absence d’immunité dans la grande majorité de la population".
Au vu de sa propre définition, on peut s’étonner que l’organisation mondiale rechigne à utiliser ce terme dans le cas du nouveau coronavirus, présent désormais dans plus de 70 pays. Mais d’autres éléments sont à prendre en compte.
Pandémie et épidémie : une différence de "taille"
Si l'épidémie est avérée en Chine avec plus de 80 000 personnes contaminées, le nombre de malades est beaucoup plus restreint dans les autres nations touchées. Sur les 10 pays recensant plus de 100 patients atteints du COVID 19, uniquement 3 ont confirmé actuellement plus les 2500 cas (Corée du Sud, Iran et Italie).
Par ailleurs, la maladie est présente sur ces territoires par "foyers" ou "clusters", et non pas, dans toutes les régions. Or une autre des conditions pour que l’OMS décrète une pandémie est que la propagation du virus soit “à grande échelle” dans plus de 2 continents.
Le Dr Jean-Charles Gagnard, infectiologue, confirme "La différence entre une épidémie et une pandémie est uniquement la localisation de l'infection. L'épidémie est plus "locale" au sens d'une zone géographique définie (ville, département...). La pandémie touche l'ensemble du monde. Cette une définition purement géographique"
Cette différence "de taille" explique pourquoi les scientifiques classent toujours la maladie venue de Chine comme une épidémie.
Une pandémie du coronavirus SARS COV-2 fait peur
Entre la grippe, la gastro-entérite ou encore la varicelle, les épidémies font partie de notre quotidien... surtout en hiver. Si elles sont craintes, elles ne provoquent pas de panique. Il en est tout autre pour les pandémies.
Les institutions préfèrent ainsi être prudentes dans les choix de leurs mots. Le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a expliqué lors d’un point d’information sur le coronavirus "L'utilisation imprudente du mot pandémie n'a aucun avantage évident. En revanche, elle présente un risque important d’amplifier inutilement des peurs, une stigmatisation ainsi qu’une paralysie des systèmes de santé".
L’organisation mondiale craint également les conclusions hâtives. Son patron reconnaît "Cela pourrait aussi donner l’impression que nous ne pouvons plus contenir le virus : ce qui n'est pas vrai. Nous sommes dans un combat qui peut être gagné si nous faisons les bonnes choses ... Je ne minimise pas la gravité de la situation, ni le potentiel que cela devienne une pandémie, car elle a ce potentiel."
Le Dr Jean-Charles Gagnard rappelle En soit une pandémie n'est pas plus "grave" qu'une épidémie. C'est l'agent infectieux qui rend une maladie plus grave en fonction de son taux de létalité ou encore la gravité de ses symptômes".
Et pour le moment, la COVID-19 ne se révèle pas être la maladie la plus mortelle. 80%des personnes infectées ont des symptômes bénins et guérissent.
Nous sommes bien en Pandémie, selon Berlin
Si l’OMS se veut prudente, le ministre de la Santé allemand, Jens Spahn, ne mâche pas ses mots. Il a déclaré devant la chambre des députés à Berlin le mercredi 4 mars 2020 : “L'épidémie de coronavirus en Chine s'est transformée en pandémie mondiale”. Dans son pays, 240 cas ont été confirmés dans 15 des 16 Länders en ce début mars. Face à cette situation, il a annulé certains événements importants comme le salon international du tourisme de Berlin.
“Dans le doute, la sécurité de nos citoyens est plus importante que les intérêts économiques”, a-t-il expliqué face aux élus d'outre-Rhin. Il estime ainsi “Les prochains jours et semaines seront un défi”.
Que se passera-t-il si la COVID-19 bascule en pandémie ?
Si la maladie COVID-19 continue à monter en puissance à travers les continents et la pandémie déclarée, une des premières mesures seraient d’annuler les grands événements de masse comme les Jeux olympiques d’été de Tokyo.
Au niveau national, si le nouveau coronavirus poursuit sa progression, l’Hexagone en sera au niveau 3. Dans le guide sur la préparation au risque épidémique du COVID-19, les autorités françaises expliquent qu’à ce "stade épidémique (ou pandémique), le passage à une stratégie d’atténuation nécessite la mobilisation de tous les secteurs de l’offre de soins".
Le document précise ensuite “Il s’agira alors de renforcer l’offre de soins en développant une filière ambulatoire avec maintien à domicile des patients peu graves tant que leur état clinique le permet. Ce dispositif de maintien à domicile visera à ne pas saturer les capacités d’hospitalisation des établissements de santé et permettra de réserver les ressources des établissements de santé soient aux cas les plus graves”.
Et ici un véritable challenge. Le Dr Jean-Charles Gagnard prévient "Le problème d'une pandémie de ce virus (SARS CoV-2) sur l'ensemble du territoire nationale est la possibilité de réponse du système de soins, et une surcharge de patients dans des hôpitaux en plein hiver. C'est déjà un moment de l'année où il y a déjà un afflux important de patient".
Le gouvernement prévoit aussi de mobiliser à ce stade des établissements de santé, les professionnels de santé libéraux, les services de soins à domicile et potentiellement les services d’aide à domicile ou encore de renforcer les établissements médico-sociaux pour assurer la prise en charge de ces personnes fragiles.
Les Français pourraient être également enjoints à limiter leurs déplacements en privilégiant par exemple le télétravail. Certaines habitudes quotidiennes seront aussi à bannir comme fréquenter des lieux publics.
Le spécialiste ajoute qu'il est important dans cette situation de suivre les consignes des autorités. "Il faudra entre autres mettre en place systématiquement les mesures d'hygiènes classiques".
Merci au Dr Jean-Charles Gagnard infectiologue à Antony
Guide Préparation au risque épidémique Covid-19, Ministère des Solidarités et de la Santé (PDF)
Qu’est-ce qu’une pandémie ?, OMS, 24 février 2010
Why WHO Won't Call Coronavirus A Pandemic Yet, Gizmodo, 3 mars 2020
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