Épilepsie : “Je joue à 200% la carte de l’adaptation”

“Mon histoire reflète un changement de point de vue majeur sur l’épilepsie. Les premières années après la découverte de la maladie, j’ai espéré une guérison définitive, mais les années passant et malgré plusieurs traitements, l’épilepsie était toujours là douze ans après. Aussi j’ai choisi de m'adapter au mieux à cette épilepsie pour mieux vivre avec. J’ai d'ailleurs publié un livre intitulé “Épileptique… et alors ?”. Tout est dans ce “Et alors ?”"

Épileptique, j’ai vécu des moments très sombres

“A l'âge de douze ans, j'ai frôlé la mort de très près lors d'une méningo-encéphalite. Cette maladie m'a laissé d'une part de graves séquelles au niveau de la mémoire, et d'autre part une épilepsie bitemporale à peu près maîtrisée par un traitement.

Dans les années qui ont suivi, j'ai récupéré une partie de ma mémoire grâce à tout un programme de rééducation dans un service de gériatrie. Sur le plan neurologique, j'espérais vraiment une disparition définitive de mon épilepsie.
Mais les difficultés étaient encore là : après une réorientation vers l'enseignement, j'ai perdu mon poste d'enseignant à cause d'un oubli (pourtant sans conséquence grave), lié directement à ma maladie de 1991. Je me suis alors réorienté vers la recherche scientifique. J'ai travaillé corps et âme pour réussir ces études difficiles... si bien que mon épilepsie s'est aggravée ! Ainsi en 2003, j'ai frôlé la mort une deuxième fois lors d'un accident de voiture due à une crise d'épilepsie au volant.

Aussi, voulant tirer un trait définitif sur cette épilepsie, j'ai visé, après la fin de mes études en 2005, la cortectomie, opération chirurgicale consistant à ôter du cortex la zone où naissent les crises. Mais cette intervention s'est avérée impossible car j'aurais perdu en même temps le langage. L'alternative trouvée par mon neurologue fut la pose d'un stimulateur électrique au niveau du nerf vague, servant à envoyer régulièrement vers le cerveau des impulsions électriques, qui évitent l'apparition des crises.

Ma formation en recherche scientifique m'a permis d'être embauché dans la foulée au CNRS, en tant que travailleur reconnu handicapé, et dans les années qui ont suivi j'ai pu, à mon grand bonheur, fonder une famille.

Mais en 2007, mes proches ont constaté que les crises d'épilepsie étaient à nouveau là.”

Épilepsie : “Au lieu de vouloir vaincre la maladie, j’ai décidé de m’adapter”

“Quand les crises sont revenues, j’avais fait du chemin depuis le diagnostic et suite à de nombreuses réflexions, j’ai complètement changé de point de vue sur la maladie : au lieu de vouloir vaincre à tout prix cette épilepsie, j'ai fait le pari de vivre avec en m'y m’adaptant. J’ai joué à 200% la carte de l’adaptation, que ce soit pour la vie professionnelle ou pour les transports, pour les loisirs ou pour le lieu de vie. Ce changement a d’ailleurs étonné les personnes de mon entourage mais je crois que cela m'a été très utile.

J’avais le choix entre rester immobile devant la maladie, ou continuer d’avancer, même en boitant. J’ai donc continué d’avancer le mieux possible malgré la maladie, grâce à mon adaptation. J’en ai même profité pour savourer les moments agréables de la vie, dans des plaisirs simples comme dans d'ambitieux projets.”

J’essaie de transmettre ma philosophie à travers une association

“Je me suis rendu compte que l’épilepsie était une maladie finalement très méconnue. En 2005, j’ai publié mon livre “Épileptique… et alors ?”, dans lequel je détaille ce cheminement et cette adaptation, et j'ai également initié le groupe local grenoblois de l’association Epilepsie-France. La pathologie souffre de nombreuses idées reçues et il manque beaucoup d’informations à son sujet. Je souhaitais également transmettre ma philosophie et mon point de vue sur la maladie.

Subir ou dompter l'épilepsie ? Je pense qu’il faut changer de regard et qu’il est important d’expliquer les différentes formes de l’épilepsie, tout en montrant qu'on peut s'y adapter, J’espère à travers mon témoignage pouvoir aider d’autres patients épileptiques.”