2%. C’est la proportion d’adultes européens affectés par la dépression saisonnière hivernale. Cette maladie touche quatre fois plus de femmes que d’hommes, et les personnes jeunes et celles ayant des antécédents familiaux de dépression sont plus susceptibles d’être concernées.
“La dépression estivale n’a jamais beaucoup intéressé ni la recherche, ni l’opinion”
Au fil des années, la science a réussi à comprendre, dans une certaine mesure, les mécanismes de ce type de dépression qui survient à l’approche de l’hiver, voire de l’automne. Celle-ci est notamment "due au déficit de soleil et de lumière naturelle", d’après le dictionnaire médical Vidal. Les jours raccourcissent, il fait froid, gris, on n’a plus envie de rien, on s’irrite pour pas grand-chose
Ce que la médecine prend moins en considération, néanmoins, c’est la dépression estivale. “En comparaison avec la dépression hivernale, elle n’a jamais beaucoup intéressé ni la recherche, ni l’opinion”, déplore le neuroscientifique Richard Sima dans les colonnes du Washington Post. Déjà, en 1984, le psychiatre américain Norman Rosenthal regrettait le manque d’informations disponibles à propos de la dépression estivale : “Cela mérite, de façon certaine, plus d'études scientifiques, et de façon tout aussi certaine, qu’on se penche davantage sur le sujet”, alertait le médecin.
Pierre*, 22 ans, est étudiant en médecine. Pour lui, chaque été est synonyme de dépression, toujours due à une “longue succession de désillusions”. “D’abord, il y a celle de se rendre compte que je ne suis pas vraiment libre, que ce ne sont pas que mes études qui m’entravent.”
Dépression estivale : “Des insomnies à répétition”
Il poursuit: “Ensuite vient le moment où cette pseudo liberté se change en une longue période d’ennui profond, rythmée par les tâches ménagères que je déteste, des insomnies à répétition qui accentuent le décalage que je ressens avec la vie des autres et l’attente des voyages qui finiront par arriver”, constate Pierre. “Je vis finalement plus la nuit que le jour.”
Depuis quelques années, le jeune homme est en couple. Sa copine l’aide à sortir et à occuper ses journées, ce qui atténue les effets de la dépression estivale. “Elle me motive à me nourrir, à utiliser mon temps. Mais c’est à double tranchant, car quand elle part, je me sens nul, incapable de me gérer moi-même”, analyse l’étudiant en médecine.
“L’hiver, j’ai moins le temps de penser à tout ça”
Chez Pierre, ce n’est pas tant le changement de température et de luminosité qui affecte son humeur et sa santé mentale, mais le désœuvrement : “L’hiver, j’ai juste moins le temps de penser à tout ça, je crois.” Pour lui, les vacances d’été sont trop longues, et son mal-être dure plus qu’une saison. “Cette incapacité à prendre soin de moi est d’autant plus frustrante, car j’ai près de quatre mois de vacances. Presque quatre mois à ne pas comprendre ce qui ne va pas chez moi, si j’ai manqué une étape dans mon développement d’homme adulte”, se confie l’étudiant.
Quand il change de pays ou de ville, cette sensation d’être étrange et différent s’estompe quelque peu : “Pendant les voyages, ça va mieux, je revis un peu.” Malgré ce tableau sombre qu’il dresse sans trop y réfléchir, Pierre concède être sauvé par sa grande curiosité. “Elle me pousse à me cultiver, à lire, parfois écrire, à commencer des projets.” Jusqu’à la rentrée prochaine, où la vie reprendra son cours.
*Le prénom a été modifié.
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