Depuis plusieurs jours, on ne parle que de lui sur les réseaux sociaux. Hold-up, c'est le film "complotiste" du moment, adulé par certains, et sévèrement critiqué par d'autres. Sorti mercredi dernier sur internet, sa bande-annonce a déjà été vue plus de 400 000 fois. On vous explique pourquoi il fait polémique.
Un complot mondial dont la pandémie serait l'objet
Financé par des cagnottes en ligne, dont Ulule, ce documentaire, réalisé par l’ancien journaliste Pierre Barnérias, décrit durant près de 2h40 comment les citoyens du monde entier se seraient fait "berner" par une élite corrompue. Le message est clair : la pandémie résulte d'un "complot mondial".
Le texte de présentation du film donne d'ailleurs le ton :
"La Covid-19 a donné lieu à des échanges contradictoires entre médecins, spécialistes, professeurs, hommes politiques et experts, le tout orchestré et alimenté par le feu nourri des médias. Il y a eu bien des résistants à cette machine de guerre : Raoult, Perronne, Toussaint, Douste-Blazy, Montagnier, Michel, etc. Ce film entend revenir sur ce hold-up incroyable", peut-on lire sur la page Ulule.
Le film ne s'appuit sur aucun élément tangible (l'Instut Pasteur a "inventé" le vaccin, l'OMS ne préconise pas le port du masque...) mais donne toutefois la parole à de nombreux intervenants (la députée ex-LREM Martine Wonner, le controversé infectiologue Christian Perronne, l'ancien ministre de la Santé Philippe Douste-Blazy...).
Le problème ? À peine mis en ligne, il est déjà sévèrement critiqué par les élus politiques, les experts de la santé et les ONG.
À tel point que certains intervenants du film se désolidarisent, à la manière de Philippe Douste-Blazy : "Je n'ai pas vu ce film et s'il y a le moindre caractère complotiste, je veux dire le plus clairement possible que je m'en désolidarise. La crise sanitaire que nous traversons est suffisamment grave pour ne pas ajouter de la confusion aux moments douloureux que nous vivons", résume-t-il sur Twitter.
Devant cet afflux de critiques, Dailymotion a décidé de retirer le film de sa plateforme.
La "délation rémunérée" des médecins
Selon le documentaire, les médecins auraient été "incités financièrement à signaler les cas contacts de leurs patients".
Comme preuve, une capture d'écran d'un article de CheckNews. Détail comique : ce dernier expliquait le contraire.
La Suède n’a pas confiné et compte beaucoup moins de morts que nous
"Quant à la Suède, qui n'a pas confiné, les chiffres parlent d'eux-mêmes", explique la voix off du film. En termes de décès, la différence entre la France et ce pays scandinave serait "flagrante".
Pourtant, la Suède comptait, en cumulé, davantage de morts que la France durant la première vague : au 18 juin, elle enregistrait 494 morts par million d’habitants, contre 442 par million d’habitants pour la France.
L’OMS ne préconise pas le port du masque pour le grand public
L'une des intervenantes du film, Astrid Stuckelberger, affirme que la France n'applique pas les recommandations de l'OMS "qui ne dit pas que tout le monde doit mettre un masque".
Pourtant, les dernières recommandations de l'organisation sont claires : "considérez le port du masque comme normal lorsque vous êtes avec d'autres personnes".
L’Institut Pasteur a créé le virus
C'est sûrement l'une des plus grosses accusations du documentaire.
Jean-Bernard Fourtillan, un intervenant du documentaire, affirme que le Sars-CoV-1, puis le Sars-CoV-2, ont été créés en insérant une "séquence d'ADN de la malaria", dans un virus peu dangereux.
Et l'Institut Pasteur en serait responsable, car il aurait déposé un brevet vieux de quinze ans sur le sujet. Problème : ces brevets sont des documents publics.
Avec le Rivotril, l’État a organisé l’euthanasie des seniors
Pour le pharmacien Serge Rader, interviewé dans le documentaire, l’autorisation par le gouvernement de la vente en pharmacie du médicament sédatif Rivotril est la porte ouverte à une légalisation de l’euthanasie des personnes âgées.
Pourquoi c'est faux ? Car le gouvernement, qui a adopté le décret le 28 mars donnant le droit aux pharmacies de dispenser sous "forme injectable le Ritrovil aux patients atteints du coronavirus (ou susceptibles de l'être), l'a fait pour améliorer le confort d'un malade en fin de vie. Mais il ne s'agit en aucun cas d'une euthanasie.
Une fausse information sur des "camps d’internement" Covid au Canada
Le documentaire affirme que "ce virus va jusqu'à faire construire des futurs camps d'internement au Canada".
Or, selon le Monde, le gouvernement canadien ne souhaite en aucun cas mettre en place des "camps d'internement" de Canadiens. Le premier ministre, Justin Trudeau, y a lui-même répondu, dénonçant une campagne de "désinformation".
Laurent Toubiana a prédit la fin de l’épidémie
Dans un texte écrit le 11 mars, le chercheur de l'Inserm explique : "Il est très possible d’espérer que l’épidémie atteigne son pic en Europe avant la fin mars, et avec une fin de l’épidémie vers la fin avril 2020."
On voit bien pourtant que la crise Covid-19 n'est pas prête de s'arrêter...
Le confinement n’aurait "servi à rien"
Dans le film, la voix off assure que "le virus a particulièrement sévi du 15 mars au 15 avril, période où nous étions tous confinés grâce à une mesure historique censée ne pas faire apparaître cette courbe".
Or, même si le pic est bel et bien apparu à cette période, il faut noter que les décès interviennent, en moyenne, trois semaines après la contamination.
"Il est donc logique que le pic du nombre de morts, apparu à la fin de la première semaine d’avril, ait eu lieu trois semaines après l’instauration du confinement, qui correspondait, lui, au pic des contaminations", souligne le magazine Libération.
Les tests Covid existaient déjà en 2015
Autre hypothèse avancée dans le film : un groupe d'experts aurait eu connaissance de l’existence du coronavirus bien avant 2019.
Jean-Bernard Fourtillan, un ancien professeur de chimie thérapeutique, explique qu'il a "découvert que l’on avait pris un brevet sur les tests pour détecter la maladie Covid-19 le 13 octobre 2015. Donc ils connaissaient le virus… »
Or, selon le Monde, le brevet évoqué existe, mais son origine et ses finalités ont été "déformées" par M. Fourtillan.
Il s’agit au départ d’un brevet déposé par Richard A. Rothschild aux États-Unis le 13 octobre 2015, que vous pouvez consulter ici. On y parle de systèmes d’analyses de données biométriques... mais pas de coronavirus.
L’OMS interdit les autopsies
Dans le film, on peut voir l’endocrinologue et gynécologue Violaine Guérin affirmer que "l'on a interdit les autopsies"... en raison d'une prétendue "interdiction" de l'OMS. Or, l'OMS les autorise, à condition de respecter certaines mesures de sécurité : "s’il est pris la décision d’autopsier un corps présumé ou confirmé infecté par le virus du Covid-19, les établissements de santé doivent vérifier que des mesures de sécurité sont en place pour protéger les personnes qui pratiqueront l’autopsie".
Covid-19 : dix contre-vérités véhiculées par "Hold-up", Libération, 12 novembre 2020.
Covid-19 : "Hold-up", le documentaire qui dénonce un "complot mondial", fait polémique, France info, 12 novembre 2020.
Les contre-vérités de « Hold-up », documentaire à succès qui prétend dévoiler la face cachée de l’épidémie, Le Monde, 12 novembre 2020.
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