Débarquée tout droit des Etats-Unis, la folie "gummies" a envahi la France ces dernières années. Ces compléments alimentaires aux allures de bonbons sont proposés à l’envi sur la Toile, surfant sur un marché florissant. Dans les pharmacies et parapharmacies aussi, ces gommes à mâcher ont investi les étagères, où elles font de l’œil aux consommateurs, en quête d’un remède soi-disant naturel et sain pour les bobos du quotidien. Certains promettent de lutter contre l’anxiété, de mieux dormir, d’éviter la chute de cheveux. D’autres encore proposent une cure de jouvence pour la peau, une détox pour mieux éliminer, une cure minceur ou brûle-graisse ou encore un effet booster pour des cheveux fatigués.
Sous leurs atours affriolants, ces supplémentations semblent totalement inoffensives. Ces produits sont souvent concentrés en vitamines (souvent A, B, C et E), en minéraux comme le zinc, et sont souvent constitués d’arômes naturels ou d’extraits secs de végétaux.
Une petite gomme trop sucrée
Mais en regardant de plus près leur composition, les choses paraissent moins roses. Ses détracteurs leur reprochent de constituer de véritables petites bombes de sucres. Ces gommes à mâcher contiendraient environ 1 gramme de sucre par unité. Des sucres cachés qui viennent s’ajouter à ceux déjà présents dans notre alimentation quotidienne (souvent déjà trop sucrée) avec les aliments transformés, les boissons sucrées et les fruits que nous ingérons.
Pour rappel, l’Anses (agence nationale de sécurité sanitaire et de l’alimentation) recommande de ne pas consommer plus de 100 g de sucres totaux (glucose, fructose, saccharose) par jour (hors lactose et galactose, les sucres naturellement présents dans les produits laitiers). Or 20 à 30 % de la population française dépasse allègrement cet apport maximal recommandé. On comprend mieux pourquoi la consommation de ces gommes à mâcher (souvent deux par jour pendant des cures pouvant aller de trois à six mois), peut rapidement devenir problématique.
Des édulcorants peu recommandables
Raphaël Gruman, fait partie de ces professionnels de la nutrition qui tiquent face à l’attrait de ces gommes à mâcher. Il met en garde contre la composition nutritionnelle des gummies et le risque d’excès de sucre.
Contacté par Medisite, l’expert déconseille purement et simplement ce type de complément alimentaire : "Ce qui pose problème c’est bien sûr leur composition, notamment en quantité de sucre. Ils sont parfois aussi sucrés que des bonbons ! De plus, leur concentration en principes actifs est relativement limitée. Ils contiennent moins de substances actives que dans des gélules ou des comprimés".
Quant aux gummies qui proposent des édulcorants en place du sucre, ils ne sont pas plus enviables. "Ce n’est pas tellement mieux, notamment pour le microbiote. En effet, les édulcorants ont tendance à dégrader les bactéries du côlon et à provoquer une fermentation colique provoquant des ballonnements", prévient-il.
Un risque d’addiction au sucre
Autre bémol, avec leur allure de bonbon, ces gommes revêtent un caractère addictif. Et chez certaines personnes, il peut être tentant de dépasser la dose recommandée par les fabricants. Gare à l’excès de sucre, met en garde Raphaël Gruman. "L’addiction au sucre est connue. Elle est très forte chez bon nombre de personnes, parfois autant que certaines drogues ou que le tabac. Elle peut générer des troubles du comportement alimentaire, des dépressions et des problèmes métaboliques graves".
Il est établi que la surconsommation de sucres au-delà de l’apport recommandé a un impact direct sur la prise de poids (exposant au risque de surpoids et d’obésité), sur l’augmentation de la triglycéridémie (taux de lipides dans le sang) et de l’uricémie (taux d’urée dans le sang). Cet excès de sucre peut indirectement faire le lit de certaines maladies comme le diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires et de certains cancers, selon l’Anses.
Le paradoxe du bonbon-aliment santé
Selon notre expert, ce risque de surconsommation de sucre réside justement dans cette apparence de friandise de la gomme à mâcher. Un aspect qui a tôt fait de semer la confusion. "Je ne suis pas du tout pour cette forme galénique qui a tendance à brouiller les messages dans l’esprit des patients. Par expérience, beaucoup consomment ces gummies en excès en se disant que cela n’est pas mauvais pour la santé, et qu’ils peuvent donc en consommer davantage que les recommandations faites", observe le nutritionniste.
Un risque possible d’interaction médicamenteuse
Un autre reproche fait aux gummies tient au risque d’interaction avec d’autres médicaments. Une objection légitime qui doit inciter à ne pas prendre ces gommes à mâcher à la légère, dixit le nutritionniste : "Comme tout médicament ou tout complément alimentaire les interactions médicamenteuses existent. C’est pourquoi il ne faut pas prendre de compléments alimentaires (sous n’importe quelle forme, même des gummies) sans accompagnement d’un professionnel de santé, car ils peuvent avoir des incidences importantes sur l’organisme surtout lors d’une prise conjointe d’autres traitements médicaux. Je recommande fortement de s’adresser à des professionnels de la santé comme les micronutritionnistes notamment, formés pour adapter un protocole", précise Raphaël Gruman.
Moralité, il semblerait que les gummies ne soient pas la panacée des compléments alimentaires. Selon notre expert, les supplémentations classiques restent une meilleure option (sur avis d’un professionnel de santé). "Je conseille régulièrement des compléments alimentaires à mes patients en fonction de leurs besoins, mais je préconise plutôt les formes gélules, comprimés ou solutions buvables qui ne contiennent pas de sucre ou d’édulcorant. Et leur composition est plus importante en principes actifs".
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