Sous un ciel brumeux, un bus repeint en blanc surprend les passants devant la mairie de Gennevilliers. Le visage d’une femme est dessinée en rose fluo, en dessous est écrit "bus santé femmes". "Ce n’est pas mon bus apparemment", se demande ce jeudi matin un homme à la recherche de son moyen de transport pour se rendre sur son lieu de travail. "Celui-ci vient en aide à l’isolement des femmes", répond Caroline, employée à la mairie de Gennevilliers.
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Bientôt des cabines de télémédecine dans les supermarchés ?Ce centre de soins itinérant, financé par le département des Hauts-de-Seine, unique en France, a été créé en 2019 pour venir en aide aux femmes isolées dans les Hauts de Seine et les Yvelines et ainsi lutter contre les inégalités d’accès aux soins.
Le Dr Souames, en charge des évaluations et actions des Hauts de Seine met en avant l’importance de la prévention. "Dans les zones de précarité, beaucoup de femmes n’ont pas accès aux soins pour différentes raisons comme la méconnaissance des structures d’accueil, des empêchements personnels et familiaux, ou alors une vulnérabilité".
Coordinatrice du projet, Caroline installe une femme sous une tente qui fait office de salle d’attente. Elle lui tend un questionnaire à remplir. "Il arrive souvent que nous devions les aider pour remplir le formulaire. De nombreuses femmes ne savent ni lire, ni écrire en français".
Assise devant les portes, l’une d’entre elles, âgée de soixante-dix ans, complète scrupuleusement la fiche de renseignements, plusieurs plaquettes de prévention étalées devant elle.
"Nous attendons environ une trentaine de femmes sur une durée de 4 heures. Mais selon les villes, cela peut monter jusqu’à une centaine explique le Dr Souames. Les femmes sont informées par les réseaux sociaux, le bouche à oreille ou parfois le hasard"
Monique est habitante de Gennevilliers depuis 65 ans. Elle a découvert ce bus grâce au journal de la mairie. "J’étais curieuse, j’ai un médecin qui me suit mais il n’est jamais disponible donc je suis venu ici", explique-t-elle.
Aujourd’hui, Monique souhaite rencontrer le médecin pour avoir une consultation de diabétologie. Elle s’installe à l’arrière du bus sur une banquette aux sièges gris, décorés de coussins roses.
Dans cet espace exigu et insonorisé par de fines cloisons, des affiches de préventions sont placardées sur toutes les vitres rendues opaques. Monique attend son tour pour voir Juliette, l’interne de médecine générale. A la suite de sa consultation, elle sort le sourire aux lèvres : "Mon taux de glycémie est bon, je vais pouvoir continuer les gâteaux."
Lutter contre les inégalités d’accès aux soins
Juliette, interne en médecine générale, travaille quatre fois par mois dans ce transport de santé itinérant. Pour elle, ce projet est indispensable pour lutter contre l’isolement et les déserts médicaux.
"La prévention est notre mission principale, dit-elle. Je n’ai pas le droit de prescrire de traitement". Son rôle est d’orienter les femmes en fonction de leurs besoins dans une structure de soins adaptée.
L'isolement a un impact sur tous les aspects de la santé, qu’elle soit mentale ou physique. "Il existe un vrai problème général d’accès à un suivi par un médecin généraliste et aux médecins spécialistes qui explique que de nombreuses femmes ne suivent pas leurs pathologies chroniques.
Dans le département des Hauts-de-Seine, 11% des femmes n’ont pas de médecins traitants. Pour des femmes en situations irrégulières, être suivi par un médecin gynécologue est parfois impossible".
Les problèmes de santé mentale au centre de la prise en charge
Pour le Dr Soames, l’aspect pluridisciplinaire est important pour aider les femmes. "Nous avons une avocate qui aide les femmes en précarité de logement ou en grosse difficulté financière, une psychologue est aussi présente pour évaluer les problèmes de santé mentale. Elles sont toutes deux installées à l’avant du bus, juste derrière l’emplacement du chauffeur. Un infirmier et un médecin sont présents à l’arrière du bus pour le volet somatique".
Depuis sa création, ce transport de soins itinérants joue de sa popularité auprès des mairies qui en demandent le passage régulier. "Nous n’avons plus besoin de faire de publicité, les mairies nous connaissent et font appel à nous". Le "bus santé femme" circule d’une ville à l’autre mais n’est pas suffisant pour répondre à l’augmentation constante du nombre de femmes isolées sans suivi médical.
D’autres projets se sont mis en place depuis 2022 pour élargir la prise en charge notamment auprès des jeunes en faculté et en milieu scolaire qui sont en première ligne face à l’augmentation des problématiques liées à la santé mentale.
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