Réduire la consommation de produits carnés dans l’assiette pour davantage végétaliser son assiette. L’idée fait son chemin chez les pouvoirs publics à l’heure des ambitions climatiques.
Alors que le gouvernement planche sur la Stratégie Nationale pour l’Alimentation, la Nutrition et le Climat, une récente étude du réseau Action Climat et de la Société française de nutrition, a mis les pieds dans le plat : le collectif estime que manger deux fois moins de viande par rapport à la moyenne française actuelle permettrait de réduire fortement les émissions à effets de serre, tout en comblant l’ensemble des apports nutritionnels recommandés.
Une consommation de viande en France deux fois supérieure à la moyenne mondiale
Pour l’association de défense de l’environnement, l’évolution des habitudes alimentaires avec la baisse des produits d’origine animale et plus de végétaux dans l’assiette constitue un passage obligé pour préserver la planète mais aussi la santé du consommateur. Le collectif rappelle que "la quantité de viande consommée par habitant en France est aujourd’hui deux fois supérieure à la moyenne mondiale".
Si les Français sont de gros mangeurs de viande, ils semblent relativement bouder les fruits et légumes. "La consommation de fruits et légumes et de sources végétales de protéines (légumineuses en particulier) est largement insuffisante par rapport aux recommandations, et leur tendance n’est pas à la hausse".
Face à ces arguments, on s’interroge : sur le plan santé est-il vraiment possible et même nécessaire de réduire sa consommation de viande. Et comment faire ? Raphaël Gruman, nutritionniste, nous apporte son éclairage.
Medisite : Selon vous, les Français mangent-ils trop de viande ?
Raphaël Gruman : "Je pense que cela dépend des catégories de population. Oui, dans la majorité des cas, il y a en France une surconsommation de produits carnés. Le problème dépend aussi du type de viande que l’on consomme. Il faut privilégier les meilleurs pièces quitte à en consommer moins.
Quels sont les apports en viande recommandés ?
Raphaël Gruman : On recommande de ne pas dépasser 3 portions de viande rouge par semaine. Mais il est possible de consommer de la viande blanche en plus de ces trois portions. Plus largement, je conseille de consommer environ 3 à 4 fois de la viande et d’alterner avec du poisson.
Pourquoi est-il conseillé de ne pas dépasser 3 portions de viande rouge par semaine ?
Raphaël Gruman : C’est avant tout pour des questions de santé, notamment pour réduire le risque cardio-vasculaire. Cependant la viande apporte des nutriments essentiels comme les protéines, le fer, ainsi que des vitamines du groupe B, comme la B3, B6, B9 et B12.
Les vitamine B9 et B12 sont principalement présentes dans la viande et moins dans les autres aliments. C’est pourquoi il est important de rester vigilants à ces deux vitamines lorsque l’on décide de supprimer la viande de son alimentation.
Quelles sont les règles d'or pour manger moins de viande en comblant les besoins nutritionnels de l’organisme ?
Raphaël Gruman : Il est tout à fait possible de se passer de viande sans risque pour la santé, à condition de mettre en place une bonne substitution pour éviter des carences. Il faut s’assurer de ne pas trop réduire trop ses apports alimentaires et de diversifier son alimentation au maximum.
Quelles sont les autres protéines animales qui peuvent remplacer la viande ?
Raphaël Gruman : Si l’on cherche à réduire uniquement sa consommation de viande, il est assez facile de la remplacer par une augmentation des apports de poissons, fruits de mer et oeuf ainsi que des produits laitiers et fromage. De cette façon les protéines animales des autres familles d’aliments compensent le manque de la viande.
Une première étape intéressante peut être d’ailleurs de remplacer la viande par du poisson, car la consommation de poissons est encore trop faible en France. Je préconise de consommer au moins 3 à 4 fois du poisson par semaine dont au moins une fois des petits poissons gras comme les sardines.
Comment éviter les carences, si on exclut la viande et le poisson ?
Raphaël Gruman : Si on opte pour une alimentation végétarienne, il faut utiliser les légumineuses comme les lentilles comme substitut ainsi que des protéines végétales. Par exemple : les légumes secs comme les lentilles, haricots blancs ou rouges, fèves, flageolets, pois chiches, mais aussi le quinoa ou le soja et le seitan.
A savoir qu'il n’y a pas de contre-indication aux protéines végétales. Il faut juste faire attention pour les personnes dites colopathes (qui souffrent du syndrome du côlon irritable) car l’introduction brutale des légumes secs peut engendrer des désordres intestinaux.
Manger moins de viande : comment s'y mettre en pratique, et sans frustration ?
Raphaël Gruman : Je conseille déjà à mes patients de supprimer la viande un jour par semaine. Et sur cette journée, je conseille de ne prendre aucune protéine animale : viande, poisson ou oeuf, pour inciter mes patients à diversifier leur alimentation.
C’est un bon exercice à appliquer dans un premier temps. Puis quand on se sent à l’aise, on passe à deux jours, puis trois jours. De cette façon, on peut réduire facilement par deux sa consommation de produits d’origine animale.
Pour les plus de 60 ans, manger moins de viande n’est-il pas risqué ?
Raphaël Gruman : Pour les seniors, il faut être encore plus vigilant car le risque de sarcopénie (fonte musculaire) est encore plus important. Le fait de supprimer la viande pourrait avoir comme conséquence une fonte rapide de la musculature et ainsi un risque de morbidité plus important. Si c’est le souhait de la personne, il faut bien l’encadrer pour évaluer son poids régulièrement afin de s’assurer qu’il ne diminue pas.
A noter que chez les seniors, il est possible d’utiliser des crèmes enrichies en protéines si l’on s’aperçoit que les apports caloriques et de protéines sont insuffisants. Autrement, je conseille d’augmenter, lorsque cela est possible, les apports de produits laitiers et de fromage, ce qui aura pour conséquence secondaire d’augmenter les apports de calcium. Ce minéral est très important pour cette population car il permet d’éviter l’ostéoporose."
Dans l'assiette : 3 jours de menus sans viande
Raphaël Gruman vous propose de tester trois jours de menus sans viande, sans risque de carence.
Jour 1
· Petit-Déjeuner :
o 2 tranches de pain complet
o 2 oeufs
o 1 banane
· Déjeuner :
o 150 g de Saumon grillés
o 150 g d'épinards
o 150 g de riz complet
o 1 pomme
· Collation :
o 1 poignée d’amandes
o 1 yaourt
· Dîner :
o 200 g de soupe de légumes
o 30 g de fromage
o 50 g de pain
o 1 poire
Jour 2
· Petit-Déjeuner :
o 2 tranches de pain complet
o 30 g de fromage
o 1 cuillère à soupe de confiture
o 1 kiwi
· Déjeuner :
o 200 g de Lentilles
o 150 g de courge rôtie
o 40 g de mozzarella
o 1 grappe de raisin
· Collation :
o 1 fromage blanc
o 1 poignée de myrtilles
· Dîner :
o 1 tranche de saumon fumé
o 200 g de courgettes
o 150 g de quinoa
o 2 clémentines
Jour 3
· Petit-Déjeuner :
o 50 g de flocons d'avoine
o 1 yaourt grec
o 1 banane
· Déjeuner :
o 1 tranche de pain complet
o 1/2 avocat
o 100 g de crevettes roses
o 150 g de salade
o 30 g de fromage de chèvre
o 1 pomme
· Collation :
o 2 carrés de chocolat noir à 70% de cacao
o 1 poignée de noisettes
o 1 petit suisse
· Dîner :
o 200 g de pâtes complètes
o 200 g de tomates rôties avec du parmesan (30 g)
o 1 yaourt
o 1 poire
Merci à Raphaël Gruman, nutritionniste et auteur.
Recevez encore plus d'infos santé en vous abonnant à la quotidienne de Medisite.
Votre adresse mail est collectée par Medisite.fr pour vous permettre de recevoir nos actualités. En savoir plus.