"Il est très important de parler de sa consommation d’alcool avant que cela n’affecte irrémédiablement la santé". Ce sont avec ces mots que le professeur Christine Silvain, hépatologue au CHU de Poitiers nous prévient des dangers d’une consommation excessive d’alcool. Mais encore faut-il s’en rendre compte pour prendre les mesures nécessaires.
Suis-je dépendant à l’alcool ?
Pour déterminer la dépendance à l’alcool, vous pouvez remplir seul ou avec votre médecin le questionnaire AUDIT (Alcohol Use DIsorders Test), qui est une méthode référence pour l’évaluation de la consommation de boissons alcoolisées.
"Tout dépend de la fréquence de consommation d’alcool. Si on ne peut fonctionner sans prendre une boisson alcoolisée, alors il y a certainement dépendance", explique l’experte. Le score de l’AUDIT se lit de cette manière : "Si on obtient plus de 12 points chez l’homme et 11 points chez la femme, la personne est considérée comme alcoolodépendante".
Se faire accompagner pour s’arrêter
Lorsque vous avez établi la gravité de la situation, mieux vaut ne pas se lancer seul dans cette quête d’un mode de vie plus sain. "Il faut en parler à son médecin généraliste, qui peut vous accompagner dans votre arrêt de l’alcool", souligne la spécialiste.
Votre médecin peut vous prescrire de la vitamine B1 voire des benzodiazépines pour aider à vous sevrer, une première étape loin d’être une partie de plaisir. N’oubliez pas qu’il ne suffit pas d’arrêter quelques mois pour être sorti d’affaire. Il faut continuer à se faire accompagner par un addictologue et/ou des associations de malades pour éviter la rechute.
Les effets du sevrage sur le corps
"Si la personne est dépendante à l’alcool, elle ne va pas sentir tout de suite les bienfaits de l’arrêt de l’alcool, prévient Christine Silvain. Elle va d’abord souffrir d’un syndrome de sevrage et se retrouver dans une situation très inconfortable".
Les effets du sevrage se font ressortir aussi bien physiquement que mentalement. "Le patient va être anxieux, agité, voire déprimé. Il peut souffrir de tremblements et de sueurs", résume la spécialiste. La personne qui arrêtera l’alcool peut ressentir pendant environ une semaine des maux de tête, de la trémulation, de la fatigue, un état de manque, de la confusion, voire des hallucinations. La durée et l’intensité des symptômes dépendent des patients et de leur état de dépendance et de santé.
"Dans les cas les plus graves, des personnes peuvent souffrir de convulsions, de délirium, et doivent être hospitalisées", explique le professeur basé à Poitiers.
Les bienfaits de l’arrêt d’alcool sur le foie
"L’alcool est l’une des causes prépondérantes des maladies du foie", souligne la chef du service hépato-gastro-entérologie au CHU de Poitiers. L’arrêt de l’alcool est donc essentiel à la bonne santé de cet organe primordial au bon fonctionnement de l’organisme.
Zéro alcool en cas de cirrhose
En France, 200 000 personnes sont atteintes de cirrhose, dont 30% développent un cas sévère. Cette maladie irréversible se caractérise par une inflammation chronique, qui détruit les cellules hépatiques et dont la régénération crée des nodules. Environ 10 000 à 15 000 Français en meurent chaque année. La moitié des cas sont dus à une consommation excessive d’alcool. "Si une personne est atteinte d’une cirrhose, il faut arrêter immédiatement toute consommation d’alcool. Dans le cas contraire, la pathologie s’aggravera et pourra provoquer une décompensation hépatique", souligne Christine Silvain. Si l’arrêt de l’alcool ne permettra pas de guérir le patient, il pourra en revanche limiter les risques évolutifs de la cirrhose, décompensation et cancer du foie.
Retrouver un foie sain
Dans le cas d’un syndrome métabolique, ou foie gras, "l’arrêt de l’alcool permet une régression de la fibrose". Si vous ne souffrez pas de pathologie sévère, l’arrêt de l’alcool pourra aider votre foie à se détoxifier et retrouver une seconde jeunesse. "L’alcool est mauvais pour le foie et lorsque l’on stoppe complètement et que le foie n’est pas trop malade, il peut revenir à la norme", explique la spécialiste.
Une vie sans alcool, quels bienfaits pour le reste du corps ?
Le foie n’est pas le seul affecté par la consommation excessive d’alcool. "Arrêter l'alcool, c'est se sentir mieux dans sa tête, dans son corps", résume le Christine Silvain, qui nous liste les différents bienfaits du sevrage aux boissons alcoolisées.
Une perte de poids et un corps plus sain
L’un des points positifs de l’arrêt de l’alcool est une perte significative de poids. La consommation d’alcool reste très calorique (en sucres et lipides) et les alcoolodépendants perdent donc naturellement des kilos et fur et à mesure des semaines suivant leur sevrage. Les consommateurs de bière vont aussi voir leur ventre dégonfler. "L’arrêt de l’alcool s’accompagne d’un changement d’hygiène de vie", qui est également bénéfique à une reprise en main de son alimentation mais aussi au retour de l’activité sportive.
Le corps est de nouveau réhydraté, le foie fonctionne mieux et élimine aussi plus facilement les toxines. Cela améliore les capacités métaboliques mais est également bénéfique à la santé de la peau.
Une meilleure santé cardio-vasculaire
Un autre cercle vertueux se crée autour des fonctions cardiaques "L’alcool est mauvais pour les vaisseaux et le coeur. Arrêter l’alcool permet de réduire l’hypertension, d’autant plus que la personne perd du poids. Cela permet également de reprendre le sport, ce qui est positif pour le système cardio-vasculaire", souligne Christine Silvain. Autre bénéfice non négligeable : "Ne plus consommer d’alcool de façon immodérée réduit les risques de cancers".
Un esprit plus léger
Après la période de sevrage qui peut s’avérer éreintante pour le corps et l’esprit, le patient va pouvoir constater de nombreuses améliorations : plus de tremblements, un meilleur sommeil, moins de fatigue…
"Le patient se libère du craving (sentiment de manque), et donc de ce besoin i rrépressible de consommer la substance. Cela a des incidences positives sur la santé mentale", explique l’experte. Arrêter l’alcool représente donc une véritable libération : "les personnes se sentent plus légères à la fois dans leur corps et dans la tête".
Merci au Pr Christine Silvain, chef du service hépato-gastro-entérologie au CHU de Poitiers
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