Les premières heures de notre vie impactent notre psychisme
La naissance est un événement essentiel dans la construction d’un individu. Bien que l’on ne s’en souvienne pas, notre corps et notre mental enregistrent les événements qui se déroulent durant les premières heures de notre vie.
"Même si tout ne va pas se jouer à la naissance, celle-ci fait partie des moments cruciaux de notre vie. Si le bébé souffre durant sa naissance ou souffre de l’état de sa mère, il peut y avoir de réels impacts psychologiques. D'où l'importance d'une équipe dédiée à la périnatalité dans les institutions médicales.
Le déroulement de l’accouchement
Problèmes d'endormissement, troubles alimentaires, terreurs inexpliquées sont quelques-uns des symptômes qui incitent ainsi la plupart des professionnels de la périnatalité et de la petite enfance à demander de précisions sur les conditions de l'accouchement pour y trouver une source d'interprétation.
"Si un accouchement se passe mal et si la mère ne peut pas s’occuper à ce moment précis de son bébé, le personnel prend le relais. Il parle au bébé, le rassure. C’est très important", souligne la psychologue avant d’ajouter "que de nombreux facteurs peuvent impacter la naissance d’un enfant comme un cordon ombilical enroulé autour du cou ou encore le stress du personnel".
Mais même trente ans après, la manière dont l’accouchement se déroule reste donc une piste à explorer. Des adultes qui souffrent de syndrome d'abandon ou encore d'un grand manque de confiance en eux-mêmes ont ainsi intérêt à revisiter ces premières heures de leur vie et les conditions dans lesquelles ils ont été accueillis.
Le lien mère-enfant
"Favoriser le lien mère-enfant est essentiel et le personnel de la maternité fait tout ce qu’il peut pour l’encourager", souligne l’experte.
Malheureusement, il arrive parfois que la mère rejette l’enfant ou souffre de dépression post-partum (maladie qui touche de nombreuses femmes et hommes après la naissance de leur bébé). "Dans ce cas, le nouveau-né est rassuré et choyé par l'équipe de la maternité pour ne pas se sentir "abandonné". Rappelons que le bébé est une personne, et contrairement à ce que beaucoup d’adultes pensent, il comprend et ressent tout", précise la psychologue. Fort heureusement, tout n’est pas figé : si le bébé a vécu une situation de stress, ces angoisses peuvent se retravailler par la suite. "On ne développera pas forcément de troubles si notre naissance était compliquée, chaque cas est différent", rappelle l’experte.
Qu’en est-il des enfants nés prématurément ou par césarienne ?
Les enfants nés prématurément sont très tôt "arrachés" à leurs parents. Mais est-ce que ce début de vie si particulier influence forcément l’enfant ?
Selon Alice Maudret, encore une fois, c’est du cas par cas : "Parfois, il y a des répercussions et parfois non. Dans tous les cas, on fait en sorte que le lien mère-enfant et père-enfant ne soit pas coupé. Le personnel va limiter les dégâts et entourer le nouveau-né d’affection, de chaleur et de paroles. Il est rare que les parents soient là 24h sur 24h pour voir leur bébé prématuré, c’est pourquoi l’équipe médicale joue un énorme rôle", confirme-t-elle. Le but étant évidemment de répondre le mieux possible aux besoins vitaux de l’enfant.
Du côté de l’accouchement par césarienne, "celui-ci peut aussi bien se passer qu’un accouchement par voie basse", rappelle l’experte. Il ne faut donc pas généraliser et croire que ce dernier est forcément pire qu’un accouchement normal.
Par ailleurs, de nombreuses études conviennent à dire qu’un bébé né par césarienne aura un moins bon microbiote (l'ensemble des micro-organismes présents dans notre corps) et de moins bonnes défenses immunitaires que les autres. La raison ? En naissant par voie basse, on attraperait toutes les bonnes bactéries de la mère.
L’ordre de naissance influence notre caractère
La place dans la fratrie est un facteur déterminant dans notre construction psychique : chaque rang de naissance a ses spécificités. "L’ordre de naissance joue un rôle important dans l’évolution de notre personnalité. Les parents en sont d’ailleurs les premiers responsables puisqu’ils se comportent souvent différemment avec leur aîné et leur petit dernier", révèle l’experte.
L’aîné, le "chef de meute"
"L’ainé est le tout premier enfant des parents, c’est donc le roi, l’enfant chéri", explique la psychologue. C’est aussi le premier petit-enfant, celui que tout le monde attend.
Dans le cas de famille typique, l’enfant reçoit une quantité d’amour très importante, d’où la difficulté pour certains enfants ainés d’accepter l’arrivée des frères et sœurs puisqu’ils doivent désormais partager la quantité d’affects dont ils disposaient jusqu’à présent. Il pourra alors adopter un comportement rebelle ou conflictuel.
"Il est d’ailleurs enfant unique avant d’être aîné, ce qui lui apporte une position privilégiée. Cette place est aussi intéressante puisqu’elle responsabilise l’enfant. Souvent, il devra se battre pour ses droits (sorties, scooter…) et apprendre plus tard à s’occuper de ses frères et sœurs ce qui lui insuffle bien souvent un esprit prudent et consciencieux", affirme l’experte.
Le cadet, le conciliant
L'enfant du milieu est souvent dominé par le premier, qui est plus vieux, plus sage. "Mais il est difficile à catégoriser, car il n’a ni la place privilégiée de l’aîné, ni la place du petit dernier adoré", signale Alice Maudret. "Cependant, cela ne l’empêche nullement de frayer son chemin, et d’affirmer sa personnalité."
On retrouvera tout de même chez l’enfant du milieu certaines caractéristiques : il reçoit parfois un peu moins d’attention que l’aîné ou le benjamin et il profite d’un peu plus de laxisme de la part de ses parents. Ces derniers sont en effet souvent moins stricts avec leur deuxième enfant, ils lâchent "du lest". L’enfant du milieu, de part sa position de fin négociateur, développe bien souvent de nombreuses qualités : il est généralement conciliant et sociable.
Le benjamin, le "chouchou"
Quand le dernier enfant de la fratrie arrive, les parents sont souvent épuisés et ont moins tendance à tout gérer de près. Ils sont plus flexibles dans l'éducation et la discipline qu’ils apportent à ce dernier.
Pour l’experte, "c’est l’enfant qui bénéfice de parents assez calmes. Ils se font plaisir et sont plus décontractés. Les frères et sœurs aident même souvent les parents à s'en occuper, ce qui permet aux parents de souffler". Cette liberté peut influer la personnalité du benjamin.
En général, il est bien dans sa peau, car il n’a pas subi le poids de l’inquiétude parentale. Il a aussi moins l’habitude de se "battre" pour avoir ce qu’il veut.
L’enfant unique, le "mini adulte"
"L’enfant unique, c’est l’enfant qui grandit avec des adultes", explique la psychologue. Il reçoit beaucoup plus d’exigences de la part de ses parents. Il est l’unique enfant de ses parents, de ce fait, il reçoit toute l’énergie de ces
derniers, qu’elle soit positive ou négative.
On retrouve également certaines similitudes chez tous les enfants uniques : "il a été assez seul et il a des habitudes d’enfant seul, à moins que les parents l’aient très tôt sociabilisé avec des cousins ou d’autres enfants", indique l’experte. Sans généraliser, il arrive souvent que la notion de partage soit moins développée chez cet enfant. Il a également un plus grand besoin de tranquillité.
Lorsque cet enfant a été très fortement désiré (car il y a eu une difficulté dans la procréation) et que c’est une forme de "miracle" pour ses parents, il va être très choyé, très gâté, très cajolé ce qui aura des répercussions dans sa vie future.
"Il peut développer de grandes insécurités à l'âge adulte, à cause de la perte de cette place "d'enfant roi". Il devra apprendre à se débrouiller seul et à n'être plus mis sur un piédestal par les autres", signale Alice Maudret.
Pour la psychologue, "l’excès dans un sens ou dans l’autre, c’est-à-dire trop d’affection ou pas assez – perturbe négativement l’équilibre psychique de l’enfant.
En outre, l’angoisse d’un parent, et plus particulièrement de la mère au cours de la première année, peut avoir des répercussions lourdes sur l’enfant si cette dernière n’est pas suffisamment entourée ou aidée. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à consulter lorsqu'il existe ce type d'insécurités.
Quel est l'impact du genre dans la fratrie ?
"La culture du sexe opposé a un impact très sain sur la personnalité de l’enfant concerné. Il y a une vraie connaissance de l’autre et un respect aussi envers ce genre. Par exemple, un garçon peut parfois développer une certaine sensibilité en vivant avec des sœurs, et, dans tous les cas, ce sera un "expert des filles", révèle la professionnelle.
Par ailleurs, si la différence d’âge dans la fratrie est de plus de cinq ans, les effets liés au rang de naissance s’atténuent. Dans le cas d’une différence d’âge moins importante, des groupes peuvent également se former.
La saison de naissance détermine notre tempérament
Bien que l’on manque de recul par rapport à ces recherches, une récente étude présentée à l’European College of Neuropsychopharmacology Congress par des chercheurs hongrois rapporte que la saison pendant laquelle nous naissons a un impact sur notre type de tempérament, qui lui-même influence le risque de développer certains troubles de l’humeur plus tard.
Les résultats montrent que les personnes nées en été ont plus souvent un tempérament cyclothymique (alternance de périodes euphoriques et dépressives) que celles nées en hiver. Les personnes nées au printemps et en automne ont plus tendance à avoir un tempérament hyperthymique c’est-à-dire un tempérament exagérément positif, à la limite de l’exubérance.
Ceux qui sont nés en hiver sont moins susceptibles d’avoir un tempérament irritable que les personnes nées à un autre moment de l’année. Quant aux personnes nées en automne, elles ont moins tendance à avoir un tempérament dépressif que celles qui sont nées en hiver.
Ces résultats démontrent une association entre les tempéraments affectifs et la saison de naissance. Mais il faudra creuser plus de pistes pour établir des conclusions solides.
"Season of birth shows a significant impact on the distribution of affective temperaments in a nonclinical population", European College of Neuropsychopharmacology Congress, Berlin, Octobre 2014.
"La libération des mémoires prénatales et de la naissance", auteure Christine Louveau.
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